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Pierre Moscovici

Une première. La décision de la Commission européenne, annoncée le 23 octobre, de renvoyer le projet de budget italien et de réclamer à Rome une autre copie, est sans précédent. La veille, le premier ministre, Giuseppe Conte, n’avait consenti aucun infléchissement des paramètres budgétaires malgré les mises en garde préalables du Commissaire à l’Economie qui avait pointé un « dérapage particulièrement grave ». Pierre Moscovici s’était même indigné : « l’Italie est le seul pays qui prévoit un budget expansionniste ».

Techniquement, ce qui est reproché à Rome est de prévoir une augmentation du déficit « structurel » de 0,8 point, là où Bruxelles attendait une diminution de 0,6 point. Or la dette publique s’élève à 131% du PIB, soit plus du double de la norme autorisée par ledit Pacte de stabilité, martèle-t-on à Bruxelles. Pire : le gouvernement italien – formé par l’alliance entre la Ligue et le Mouvement cinq étoiles – assume ce choix sacrilège, là où les pays pécheurs, d’habitude, jurent leurs grands dieux qu’ils vont au plus vite se mettre en règle.

« Nous devons éviter que l’Italie réclame des conditions spéciales qui conduiraient à la fin de l’euro si elles étaient concédées à tous » – Jean-Claude Juncker

C’est ce qui explique qu’un déficit annoncé à 2,4% du PIB pour 2019 soit jugé intolérable, là où le projet français prévoit 2,8% sans susciter la colère des gardiens du temple. Surtout, le président de la Commission l’a répété : il est inacceptable que ce gouvernement italien ne tienne pas l’engagement de 0,8% pris en juillet dernier par son prédécesseur. Jean-Claude Juncker avait en outre prévenu : « nous devons éviter que l’Italie réclame des conditions spéciales qui conduiraient à la fin de l’euro si elles étaient concédées à tous ».

On aurait tort de ne voir dans tout cela qu’une querelle de chiffres. Les rappels de M. Juncker suffisent à montrer à quel point le dossier est politique, et pourrait avoir des conséquences considérables dans la prochaine période. Car le chef de l’exécutif communautaire a raison sur un point : si les orientations budgétaires, et plus largement économiques, divergent entre pays de la zone euro, la monnaie unique est irrémédiablement condamnée. C’était précisément, dès le début, la raison d’être du carcan que constitue le Pacte de stabilité : contraindre les Etats membres à suivre la même voie, en l’occurrence celle de l’austérité.

Surtout, le reproche fait à un gouvernement de ne pas se sentir lié par les engagements bruxellois du précédent n’a rien d’anodin. Il signifie très précisément que les électeurs peuvent voter, mais quel que soit leur choix, c’est la même politique qui doit se poursuivre, en tout cas dans ses aspects essentiels. On le savait, mais l’affrontement présent avec l’Italie le confirme de manière explicite et éclatante : entre l’euro et la démocratie, il faut choisir. La patronne du Fonds monétaire international avait pour sa part opiné : « quand on est membre d’un club, on en respecte les règles » ; et ce, quelques soient les « aléas électoraux » (c’est-à-dire la volonté des citoyens).

Le problème, c’est qu’à marteler cette évidence, l’oligarchie bruxelloise prend le risque que l’option de sortir dudit club apparaisse et monte dans le débat public. Selon un récent sondage lancé par la Commission, une majorité d’Italiens considèrerait désormais que l’appartenance à l’UE a plus d’inconvénients que d’avantages.

La Commission était donc face à un impossible dilemme : ne pas sévir aurait détruit sa crédibilité. Mais exiger du gouvernement italien qu’il abandonne son programme la met désormais en collision directe avec le peuple, précisément au moment où l’équipe de M. Conte, au pouvoir depuis mai 2018, jouit d’une popularité exceptionnelle (dont n’osent même plus rêver Emmanuel Macron, Angela Merkel et la plupart de leurs collègues).

Et maintenant ?

Et maintenant ? Théoriquement, Rome a trois semaines pour revoir sa copie, faute de quoi une procédure de sanctions serait engagée. Le vice-premier ministre Matteo Salvini a trompeté que le gouvernement ne reculera pas d’un centimètre. Pour l’heure, M. Conte et son ministre des Finances ont affiché leur intention de dialoguer avec Bruxelles, et assuré qu’il n’était pas question de quitter l’euro.

Les dirigeants européens comptent discrètement que la « pression des marchés financiers » (et les agences de notation) ramène les autorités « sur la voie de la raison ». Bref, il s’agit de faire monter l’étranglement du pays (au risque de déstabiliser d’autres pays de la zone).

Dès lors le choix va apparaître clairement

Dès lors le choix va apparaître clairement : ou bien ...

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Ruptures : l’édition d’octobre est parue ​​​​​Actu

Sommaire de l’édition d’octobre du mensuel  Une 79
Tag(s) : #Allemagne
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