Ce jeudi, les éditorialistes de la presse française sont défavorables à une interdiction de manifester annoncée la veille par le président de la République, en conseil des ministres, si les « biens et des personnes » étaient menacés. « Autant la sanction des déprédateurs est justifiée, autant la menace d'une interdiction générale de manifester est exagérée », estime Laurent Joffrin, dans les colonnes de Libération.
Et d'avertir : « La violence antidémocratique ne doit pas faire reculer la démocratie, dont les principes et les procédures doivent être maintenus, même dans des circonstances difficiles. »
Jean-Emmanuel Ducoin, de L'Humanité, lui, laisse exploser sa colère devant une telle décision : « Manuel Valls puis François Hollande, ont suggéré l'idée qu'ils puissent désormais interdire les manifestations. Toutes les barrières sont éventrées. Ils sont devenus fous ! »
François Hollande a annoncé mercredi en conseil des ministres qu'il n'y aurait plus d'autorisation de manifester si la préservation des « biens et des personnes » ne pouvait être « garantie », a rapporté le porte-parole du gouvernement Stéphane Le Foll, au lendemain de nouvelles violences lors d'une manifestation à Paris contre la loi travail.
Certes, « les violences s'accumulant ont pour conséquence l'exigence de plus de répression et d'autorité », reconnaît Bernard Stephan, de La Montagne, avant de lancer : « Mais attention à ne pas ouvrir la porte à des mesures liberticides, mises en cause de l'État de droit et des principes républicains ».
Pour Matthieu Verrier, de La Voix du Nord, l'annonce du chef de l'État montre que : « La République est arrivée à un point où l'équilibre entre liberté et sécurité vacille. » Paul-Henri du Limbert, du Figaro, rappelle pour sa part que « l'état d'urgence commande de proscrire toute sorte de manifestations ». « Ne confondons pas autorité et autoritarisme », prévient dans La Dépêche du Midi, Jean-Claude Souléry qui relève : « Notre démocratie considère que le droit de manifester appartient au domaine des libertés publiques. »
Didier Rose, des Dernières Nouvelles d'Alsace, voit dans « l'interdiction » des rassemblements « une mesure si radicale, ou alors si tardive, qu'elle n'est pas à l'avantage du gouvernement ».
« La violence n'est pas non plus l'apanage des manifestations syndicales », signale dans La Croix Guillaume Goubert. « Il va bien falloir faire quelque chose pour éviter que le sillage des défilés légaux ne charrie des opportunistes violents », s'inquiète Michel Klekowicki, du Républicain lorrain, avant de conclure : « Mais avant d'en arriver à la prohibition, il y a de l'espace pour des mesures qui respectent le droit de manifester calmement et la manifestation du droit à la sécurité. »