Le verdict sans appel des Britanniques pour le Brexit provoque la panique de la soit-disante "'élite" de notre pays. Le "Bloody Friday", titre du supplément ECHO&ENTREPRISE du Monde, conduit son directeur, Jérôme Fenoglio, à exprimer sans retenue l'étendue du "désastre" dans son éditorial du 25 juin :
"L'Union européenne (UE) vient de subir un désaveu majeur. Elle a été rejetée, jeudi 23 juin, par une majorité de Britanniques (...) Par quelque bout qu'on prenne cette triste affaire, elle est une défaite pour l'UE, qui en sort affaiblie à l'intérieur de ses frontières et dont l'image à l'extérieur est celle d'une entité sur le déclin"
Ces moments de vérité, si rares dans le quotidien, sont à souligner. Faut-il que Jérôme Fenegli- et ses commanditaires - aient accusé le coup pour mettre ainsi à nu ses sentiments.
Cette homélie nous comble d'aise.
Mais, prenons garde, ces messieurs doivent regarder à la loupe les textes fondateurs de l'UE, pour y chercher quelque formule alambiquée, une virgule bien à propos, pour mettre en cause le verdict des électeurs britanniques et faire revoter ceux-ci. Cela ne serait pas la première fois : les Irlandais, entre autres, en savent quelque chose.
Monsieur Juncker n'a-t-il pas dit, au moment de la crise grecque, que « Il ne peut y avoir de choix démocratique contre les traités européens. »,
Les règlements bruxellois priment donc sur une consultation démocratique.
De quoi inquiéter les Britanniques...
On peut lire sur francetvinfo de ce jour :
Brexit : un million de Britanniques signent une pétition pour réclamer un nouveau référendum
Dans l'immédiat, en France, la rancœur de l'oligarchie politico-médiatique sévit à longueur d'antenne. Et la rage aidant, ils ne contrôlent plus leur langage. C'est ainsi que, sur France Culture, vendredi 24 juin au matin, un intervenant, outré que chaque voix ait la même valeur, a osé dire :
"Un ministre et un ignorant comptent chacun pour une voix" !
Faudrait-il, à ses yeux, réserver le vote aux anciens élèves de SciencePo, pour éviter que la "canaille" vienne troubler l'eau claire du scrutin ? Ou mieux, rétablir le suffrage censitaire a fin que seuls les propriétaires puissent être consultés ?
Cette attitude conduit la couche réduite de ceux qui possèdent les moyens de production et d'échange et à leurs hommes-sandwiches de la politique et des médias, à épancher leur haine, hier, des manants, aujourd'hui des couches populaires, dangereuses par essence.
Nous sommes presque retournés deux siècles en arrière quant Saint Marc Girardin, conseiller d'État, écrivait dans le Journal des Débats du 8 décembre 1831, au lendemain de la révolte des Canuts :
« La sédition de Lyon de 1831 a révélé un grave secret, celui de la lutte intestine qui a lieu dans la société entre la classe qui possède et celle qui ne possède pas.. Notre société commerciale et industrielle a sa plaie comme toutes les autres sociétés ; cette plaie, ce sont les ouvriers. Point de fabrique sans ouvriers, et avec une population d'ouvriers toujours croissante et toujours nécessiteuse, point de repos pour la société [...].
Les barbares qui menacent la Société ne sont point au Caucase ; ils sont dans les faubourgs de nos villes manufacturières ».
Dans ces conditions, le droit de vote du peuple, des ouvriers en premier lieu, n'est-ce pas là une pratique d’un passé révolu?
Selon la 'morale' européenne en vigueur à Bruxelles...