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'L'Obs' : « L’exemple du vote sur le Brexit nous a offert en quelques mois un condensé de perversion démocratique, une extravagante illustration de ce qu’il ne faut pas faire.

Donner la parole au peuple,

c'est, selon L'Obs..la

Tyrannie de la majorité

Quel naufrage, et quelle ironie, de voir les inventeurs du régime parlementaire sombrer sous les coups de boutoir de la démocratie directe ! « Le référendum, ça blesse, ça brûle, ça divise », a justement rappelé au lendemain du scrutin le commissaire européen Pierre Moscovici devant la tentation exprimée par quelques populistes français d’imiter nos voisins britanniques.

On connaît depuis longtemps en effet les limites de l’exercice. Le caractère binaire de la question posée ne permet pas une campagne sereine. Il ouvre grand la porte à la caricature, aux mensonges et aux raccourcis. Plus le sujet est complexe, plus la réponse est décalée. Car sa portée, alors dévoyée, se transforme souvent en plébiscite ou en rejet de son initiateur.

Quant à son résultat, forcément aussi manichéen que son intitulé, il revient à exercer une forme de tyrannie de la majorité faisant bien peu de cas des avis contraires. Il suffit, pour s’en convaincre, de voir aujourd’hui le désespoir de la jeunesse anglaise.

Arme de frustration massive

Enfin et surtout, en matière d’affaires européennes, le référendum peut devenir une arme de frustration massive si son verdict se révèle trop compliqué à appliquer. On l’a vu en 2005 à propos du traité constitutionnel européen, en 2015 avec Aléxis Tsípras en Grèce et demain – qui sait ? – avec le Brexit.

L’Europe n’est pas exempte de critiques, loin de là. Elle est même clairement responsable du divorce à bas bruit qui couve entre ses élites et les opinions publiques. Elle a besoin de se réformer, bien sûr, de manière urgente et profonde, pour devenir plus efficace, plus transparente et plus démocratique.

Mais ce changement doit être conduit par des représentants élus sur la base de programmes clairs. On n’a pas attendu le Brexit pour découvrir que la somme des intérêts particuliers ne dessine jamais l’intérêt général. Ni qu’un référendum – notre passé bonapartiste l’a montré – pouvait parfois se révéler liberticide ! »

Matthieu Croissandeau, 

L’Obs, le 29 juin 2016

Tag(s) : #Libertés
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