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L'Europe unie...L'Europe unie...

L'Europe unie...

Réseau International

Le journaliste et analyste géopolitique irlandais Gearóid Ó Colmáin revient sur les suites du « Brexit » dans les îles britanniques et leurs tenants et aboutissants, du point de vue de la lutte de classes au micro de Sputnik France et en français, le 6 septembre 2016.

Après ses réponses à l’interview que vous pouvez trouver ci-dessous, il nous livre un résumé du sens de son intervention, afin de finir d’éclairer ces aspects concrets des turpitudes politiques que nous vivons actuellement, et qui sont les soubresauts d’un système oligarchique agonisant… 

Will Summer

 

L’indépendance et la souveraineté d’un pays sont toujours indispensables à la liberté des citoyens. Les Parlements Nationaux sont l’aboutissement d’un long processus historique de démocratisation politique. En centralisant tous les pouvoirs démocratiques à Bruxelles dans une Commission qui énonce ses diktats sans mandat démocratique, l’Union Européenne se révèle comme une institution véritablement anti-démocratique.

La classe ouvrière, à l’intérieur des pays de l’Union Européenne, ne peut pas réaliser de progrès sans disposer du pouvoir d’influencer les décisions des Parlements Nationaux. C’est la raison pour laquelle la classe ouvrière britannique a voté majoritairement pour le Brexit.

Cependant, il a été observé que la « gauche » britannique désirait demeurer à l’intérieur de l’Union Européenne. Pourquoi? Parce que l’Union Européenne a toujours été présentée comme un projet progressiste visant la paix, la sécurité sociale et les « Droits de l’Homme ». Ce sont bien évidemment des valeurs bourgeoises et ce fut la gauche « petit-bourgeois » qui militait au Royaume-Uni pour le maintien dans l’Union Européenne. Cette gauche « petit-bourgeois » a beaucoup parlé du « racisme » des gens qui voulaient quitter l’Union Européenne. Cette accusation de racisme est parfois bien fondée. Il y a sans doute eu des militants d’extrême-droite qui ont voté en faveur du Brexit pour des raisons xénophobes. Mais de grands syndicalistes et des militants communistes ont également été favorables au Brexit parce qu’ils avaient compris qu’une telle victoire nationale contre l’impérialisme US aurait aussi fait avancer les intérêts de la classe laborieuse britannique. Car l’Union Européenne a toujours été un instrument des élites financières dirigé contre le peuple, et ces élites ont vendu l’idée d’une « Europe sociale » avec le concours de la gauche bourgeoise et de la « Sociale-Démocratie », qui sont et ont toujours été les agents du capitalisme dans le mouvement ouvrier.

Mais la décision britannique de quitter l’Union Européenne soulève des questions complexes. L’Écosse a voté contre le Brexit, l’Irlande du Nord aussi. Donc, les nationalistes en Écosse et le Sinn Féin en Irlande appellent à un référendum sur l’indépendance dans le cas de l’Écosse, et sur l’unification dans celui de l’Irlande.

L’unification de l’Irlande a toujours été désirée par la majorité des Irlandais. Mais le Sinn Féin a depuis longtemps cessé d’être un parti progressiste et anti-impérialiste. Leur silence sur les bombardements de la Libye par l’OTAN et à propos de la guerre contre la Syrie en disent beaucoup sur un parti politique censé défendre la « libération nationale » et qui entretenait jadis de fortes relations avec des mouvements et des pays anti-impérialistes comme les FARC de Colombie, Cuba et la Libye de Qaddafi.

Aujourd’hui, le Sinn Féin est un parti de l’establishment qui vise le contrôle du pouvoir sur toute l’île et qui représente les mêmes valeurs que les « Démocraties Sociales ». Donc, l’unification de l’Irlande serait dans ces circonstances une victoire pour l’impérialisme étasunien, car elle renforcerait l’Union Européenne et sa politique d’austérité, de guerres coloniales et de traité transatlantique. L’Irlande se trouve donc ainsi coincée dans un contexte géopolitique extrêmement complexe. La seule unification de l’Irlande qui menacerait l’impérialisme est l’unité qui était naguère promue par les grands penseurs et militants marxistes qu’ont été James Connolly et Neil Gould. Malheureusement, en Irlande aujourd’hui nous n’avons pas de parti politique qui prenne véritablement la défense de tous les ouvriers de l’île.

La frontière actuelle entre l’Union Européenne et le Royaume-Uni se situe en Irlande. Quand à l’Écosse, ce pays n’a jamais vraiment milité pour son indépendance et le projet de l’indépendance écossaise est pour cette raison, me semble-t-il, assez artificiel. L’Écosse « indépendante » resterait dans l’Union Européenne et dans l’OTAN, et serait donc de facto sous diktat étasunien.

Les stratèges de la construction européenne ont depuis longtemps privilégié la régionalisation de l’Europe. Dans le livret « The United States of Europe, a Eurotopia » [« Les États-Unis de l’Europe, une Eurotopie« , NdlR] écrit en 1992, le militant européiste et grand homme d’affaires Freddy Heineken a dessiné la carte d’une telle Europe. Il est possible d’y voir l’Espagne, la France l’Allemagne et tous les grands pays d’Europe divisés et morcelés. L’impérialisme a perpétuellement besoin de diviser les peuples pour rendre plus difficiles les actions communes contre l’oligarchie. C’est dans ce contexte qu’il faut songer à la possibilité d’une « indépendance » de l’Écosse. Dans cette période de grandes manipulations des masses et de confusion idéologique, il faut tenir compte de la complexité géopolitique internationale et de l’influence qu’elle exerce réellement sur la vie des ouvriers.

Gearóid Ó Colmáin


 

Tag(s) : #Europe
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