Franceinfo nous rappelle opportunément que des nostalgiques du fascisme manifestent librement et régulièrement leur attachement à ceux des leurs qui, sous l'Occupation, furent au premier rang de la collaboration avec les nazis. Robert Brasillach est l'un d'eux. Ecrivain admirateur de Mussolini et d'Hitler, est rédacteur en chef de de Je suis partout, l'hebdomadaire antisémite par excellence des années trente. Naturellement, il collabore avec l'envahisseur. Dés lors, "Je suis partout" appel à tuer les juifs et les politiciens de la Troisième république. Dans le numéro du 25 septembre 1942 on peut lire : "Il faut se séparer des Juifs en bloc et ne pas garder les petits".
Fusillé pour intelligence avec l'ennemi le 6 février 1945, enterré au cimetière de Charonne, il est, chaque année, célébré le plus librement du monde par ses amis d'aujourd'hui...Ces manifestations annuelles, les personnes qui y prennent part, ne semblent pas, aujourd'hui, créer problème ni à Castener, ni à Griveaux, ni à Macron, qui, à les écouter, ont déclaré guerre à "l'antisémitisme".
Qu'un manifestant isolé dans une manifestation de gilets jaunes s'en prenne grossièrement à Finkielkraut, à partir d'un vocabulaire salafiste, voilà tout le gouvernement retourné, tonnant contre la foule accusée collectivement d'antisémitisme aggravé menaçant la société française...
Mais les nostalgiques du nazisme, non.
franceinfo
L'école est finie, le soleil décline. Dans le 20e arrondissement de Paris, lundi 18 février, des élèves rentrent chez eux en coupant par le petit cimetière de Charonne. Une petite fille et sa mère cherchent Grisou, le chat qui rôde dans ce lieu encerclé par quelques immeubles d'habitation. Une retraitée s'arrête devant la pierre tombale de la famille Malraux. Mais ce jour-là, personne ne s'attarde sur une tombe qui se trouve le long de la courte allée principale : celle de Robert Brasillach, figure de l'antisémitisme français et collaborationniste, qui a été fusillé le 6 février 1945.
Cela ne signifie pas que la sépulture de cet écrivain et journaliste de l'hebdomadaire Je suis partout est à l'abandon. Au contraire, sa tombe et celle de son beau-frère Maurice Bardèche, connu pour être le premier négationniste français, sont parmi les plus fleuries et les plus entretenues du cimetière.
La tombe de l'auteur antisémite et collaborationniste Robert Brasillach, au cimetière de Charonne, à Paris, le 18 février 2019. (LOUIS SAN / FRANCEINFO)
Le lieu est devenu un point de ralliement pour certains antisémites français, des individus au cœur des préoccupations des autorités quelques jours après les rassemblements contre l'antisémitisme et l'annonce de la hausse de 74% des actes antisémites en France en 2018.
Une cérémonie d'hommage chaque année
Sur la tombe de Robert Brasillach se trouvent notamment des fleurs blanches à peine flétries et un ruban tricolore dénoué. L'ensemble a été déposé, le 9 février, lors d'une cérémonie à la mémoire de l'auteur pro-nazi, qui a notamment écrit "il faut se débarrasser des Juifs en bloc et ne pas garder les petits". Yvan Benedetti, ancien président de L'Œuvre française, groupe pétainiste dissout en 2013 après la mort de Clément Méric, a participé à ce rassemblement qui a lieu chaque année, pour célébrer l'anniversaire de la mort de l'auteur.
Le porte-parole du Parti nationaliste français, également directeur du site d'extrême droite Jeune Nation, est un habitué de cet hommage. Il dit à franceinfo y participer depuis au moins trente ans. Mais celui qui s'était lui-même présenté, en 2011, comme "antisioniste, antisémite et anti-juif", n'est pas l'organisateur de l'événement. C'est le Cercle franco-hispanique qui est à l'origine de l'initiative. Ce dernier a été fondé par Olivier Grimaldi et son épouse, en 1982, pour la défense et le souvenir du phalangisme espagnol. Hélène Grimaldi poursuit les activités de son mari mort en mars 2014, et les fleurissements perdurent. Contactée par franceinfo, elle n'a pas donné suite à nos sollicitations.
Parmi les habitués, il y a également Pierre Sidos, 92 ans. Il dit y participer depuis 1952. Ce fils d'un collaborateur fusillé à la Libération a fondé L'Œuvre française, en 1968. Il est présenté par la revue Charles (article payant)comme "un personnage aussi secret qu'important de l'extrême droite française", et comme "le mentor" d'hommes politiques de la droite traditionnelle comme Gérard Longuet, Alain Madelin et Patrick Devedjian.
Prières et chant militaire
D'après les images disponibles en ligne, entre trente et quarante personnes ont participé cette année au dernier rassemblement annuel au cimetière de Charonne. Des visages plus jeunes étaient présents, à l'image d'une militante qui se présente sur Twitter comme "catholique et nationaliste convaincue, amoureuse de sa patrie charnelle".
Florian Rouanet est un autre représentant de la jeune génération. Né en 1990, il se présente sur Facebook comme "conférencier", "militant catholique et nationaliste". Il n'a pas souhaité répondre aux questions de franceinfo, tout en précisant ne pas s'être rendu au dernier rassemblement en date. Mais il y était en 2015. Le groupuscule Paris nationaliste, qu'il a lancé, a posté sur internet une vidéo montrant l'intégralité de cette cérémonie. On y voit les participants, dont Hélène Grimaldi, Florian Rouanet et Yvan Benedetti, enchaîner les discours et réciter des prières catholiques. La minute de silence étant considérée comme "d'origine maçonnique", ils effectuent un "appel des morts" : "Robert Brasillach" est ainsi crié, ce à quoi l'assitance répond "Présent". Enfin, ils entonnent le chant militaire La Cavalcade, coutumier des parachutistes et des légionnaires, pour clore la cérémonie.