Alors que le général Gaïd Salah, qui s’était imposé comme l’homme fort de l’Algérie actuelle, vient de décéder, quelles leçons tirer du récent scrutin présidentiel ?
Par Pierre Vermeren, professeur à Paris 1 en Histoire des sociétés arabo-berbères contemporaines. A récemment publié chez Albin Michel, Déni Français. Notre histoire secrète des liaisons franco-arabes, Paris, octobre 2019.
Depuis février 2019, une immense et durable protestation populaire s’est levée en Algérie, parfois qualifiée de révolution. Le Hirak – mot-à-mot le mouvement en arabe – évoque immanquablement les « printemps arabes » qui, en 2011, ont renversé en quelques mois des pouvoirs présentés comme inébranlables, sans toujours y parvenir vraiment (en Syrie et en Egypte notamment). L’Algérie, alors riche de sa rente pétrolière, encore traumatisée par sa récente guerre civile – dite « décennie noire » (1992-2000/02) – était passée à côté de ces évènements.
Rien de tel en 2019. Tout au long de l’année, une vague populaire a successivement contesté le cinquième mandat d’Abdelaziz Bouteflika (grabataire et presque muet depuis son AVC de 2013), l’élection de son successeur à la hussarde en moins de trois mois conformément à la constitution, et enfin la présidentielle du 12 décembre dernier, orchestrée par le chef d’état-major, le général Ahmed Gaïd Salah – décédé brutalement le 23 décembre – au profit de son obligé Abdelmadjid Tebboun.
Toutes les semaines, des centaines de milliers, voire des millions, de manifestants pacifiques, à l’humour corrosif, ont défilé dans de nombreuses villes du pays, et spectaculairement à Alger, les mardi (étudiants) et les vendredi (tous manifestants). Ces immenses cohortes ont obtenu la décapitation du système de Bouteflika, notamment des deux clans principaux qui se partageaient avec une violence feutrée le pouvoir et le surplus de la rente pétrolière, une fois réalisées les dépenses nécessaires.
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