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et consumimur igni 

Macron et Philippe s’enlisent en voulant imposer leur réforme des retraites 

A Bordeaux de policiers manifestent 

L’exécutif apparait de plus en plus comme une simple courroie de transmission des fonds de pension. Macron a récemment rencontré les représentants du fonds de pension Black Rock[1].

On sait que le but ultime de la réforme des retraites est de serrer la vis aux pensions de retraite pour obliger les salaires moyens et un peu au-dessus de la moyenne a cotisé auprès d’une boutique qui gérera nos retraites, tout en prenant un petit pourcentage au passage. Macron, Philippe et Delevoye sont les employés totalement corrompus du capitalisme financier version assurance. Mais les choses ne se passent pas comme ils le voudraient. Macron est sans doute fou, et comme il est à la tête du troupeau des bras cassés LREM, il croit qu’il en est le guide, c’est une illusion, il est lui-même contrôlé par le grand capital, ceux qui l’ont mis là.

Donc le 11 décembre le lobbyiste Edouard Philippe a fait sa déclaration de guerre aux futurs retraités. Je passe sur les détails. En gros cette réforme d’une retraite par points ne s’appliquerait qu’à ceux qui sont nés après le 1er janvier 1975. Et donc si cette réforme a une utilité celle-ci ne sera révélé que dans au moins vingt ans. C’est dire que cette réforme n’avait aucun caractère d’urgence, car personne ne sait de quoi sera faite l’économie en 2040.

Une des raisons de cette incertitude vient de ce que la mondialisation touche à sa fin, on le voit avec la sortie du Royaume Uni de l’Union européenne, avec la guerre commerciale sino-américaine, mais aussi avec la paralysie de l’OMC, fer de lance de la mondialisation[2].

D’autres éléments comme la dégradation plus rapide que prévue de l’environnement et du climat[3] risque d’obliger à réviser la totalité des critères sur lesquels est fondée l’économie d’aujourd’hui. Sur ce dernier point Macron et son gouvernement n’a strictement rien prévu : ils considèrent que la réforme des retraites est plus urgente que de lutter contre le réchauffement climatique ou la dégradation rapide de l’environnement.

On voit ce que sont les priorités politiques de ces gens-là. En vérité Edouard Philippe le menteur qui est aussi répugnant que son patron, a tenté de faire en sorte que ceux qui sont nés entre 1960 et 1975 ne se sentent pas concernés par la grève. Mais son mensonge a été dévoilé par L’Obs, pourtant journal macronien de longue date, qui a bien précisé que toutes les personnes nées entre 1960 et 1975 devraient travailler plus pour avoir une retraite décente[4].

De même il a encore menti en disant que le minimum de retraite serait de 1000 € par mois pour un smicard, sans préciser toutefois que ce montant ne serait accordé qu’à ceux qui ont travaillé 44 ans à temps plein, les années de chômage ne comptant pas, les chômeurs de longue durée, qui sont aussi les plus pauvres seront fortement pénalisés, comme les séniors peu qualifiés qui ont dès la cinquantaine des difficultés à retrouver du travail. La tactique est de mentir ouvertement pour tenter de gagner encore un peu de temps et imposer cette réforme pourrie qu’ils vont tenter de faire passer sans doute au printemps prochain. 

Macron et Philippe s’enlisent en voulant imposer leur réforme des retraites 

Vannes des policiers manifestent aussi 

On a vu que même les prophètes de la mondialisation échevelée, Jacques Attali et Alain Minc, ont vertement critiqué la méthode de brutes épaisses mise en œuvre par l’exécutif. Mais maintenant ce sont les policiers qui manifestent ou qui se font porter pâle. Sarkozy lui-même a déclaré qu’il ne comprenait pas les choix de Macron, une manière polie pour dire que cette réforme c’était de la merde[5].

Cependant la nouveauté du jour c’est que les policiers aussi ont manifesté un peu dans toute la France. Un millier de CRS se sont fait prescrire des arrêts de travail pour s’éviter la corvée de fracasser les manifestants désarmés[6].

Certes ils n’en sont pas encore à défiler avec les Gilets jaunes et à mettre la crosse en l’air, mais tout le monde a compris que si les miliciens lâchent Macron, ce dernier devra demander l’asile politique et se réfugier avec Delevoye et Philippe à Sigmaringen. Suite à la déclaration de guerre civile de Philippe qui équivaut à un crachat dans la figure, les syndicats sont remontés comme des coucous. Même les plus mous se disent qu’il faut arrêter le massacre, stopper Macron. Et donc élargir le mouvement, c’est le cas de la CFDT et de l’UNSA. C’est ainsi qu’on a vu le leader du syndicat jaune, Laurent Berger, piquer une grosse colère et à appeler à l’action[7]. Le gouvernement a franchi la ligne rouge, a-t-il dit. Il est heureux qu’il s’en aperçoive avec 2 ans de retard. Mais enfin, nous sommes contents qu’il nous rejoigne. En tous les cas, se mettre à dos un syndicat aussi complaisant que la CFDT est tout de même une performance qui, au-delà de la volonté de guerre civile, en dit long sur l’incompétence de l’exécutif.

Comme on le voit la base de la contestation s’élargit, même Marine Le Pen soutient les grèves ! C’est dire que le socle de soutien à Macron est de plus en plus réduit. Le seul soutien qu’il a obtenu officiellement est celui de Geoffroy Roux de Bézieux le président du MEDEF. Celui-ci est bien connu pour ses positions extrémistes en matière économique et sociale qui feraient passer Pierre Gattaz pour un gauchiste. Ce soutien turbulent au projet macronien de destruction totale des acquis du CNR fait apparaître la réforme des retraites pour ce qu’elle est : une baisse radicale des pensions et une privatisation des fonds de retraite.

Car c’est bien de ça qu’il s’agit : après avoir bradé la Française des Jeux[8], tenter de vendre ADP à un prix d’ami à la canaille qui a soutenu l’ascension de Macron vers le pouvoir les voilà qu’ils s’attaquent aux retraites pour nous les voler en plein jour. Car si on privatise les retraites, c’est bien d’abord pour que ceux qui pourront y mettre la main dessus puisse encaisser des bénéfices. Tout le monde sait que la Sécurité sociale est un organisme qui ne coûte pas très cher en frais de gestion, on les évalue à 4% de l’ensemble des cotisations : demain il n’en sera pas de même, les marges des assureurs du secteur privé sont comprises entre 7,5 et 13%.

Cette ponction ne peut se faire qu’au détriment de la valeur des pensions. Mais en outre, il y a le risque dans cette évolution à l’Américaine de voir les fonds de pension faire faillite si les cours de la Bourse évoluent à la baisse. En 2008, avant la chute, le CAC40 était évalué à 6600 points. Aujourd’hui il l’est à 5800, la baisse a été de 12 % en 11 ans, alors que le cours est bien remonté depuis 5 ans. Et donc il vient que si la valeur des pensions complémentaires est fondée sur la cote boursière, elles fluctueront comme elle.

Certes les fonds de pension ne concerneront pas toutes les retraites, mais une bonne partie de celles-ci. On vendra l’idée que grâce à ce système le capitalisme français pourra se financer pour la croissance de ses investissements. Disons les choses plus clairement encore, les pensions seront largement à l’avenir conditionnées par la croissance économique. Pour faire confiance en un tel système, il faut avoir une foi inébranlable dans l’avenir du capitalisme financier mondialisé ! 

Macron et Philippe s’enlisent en voulant imposer leur réforme des retraites 

Laurent Berger appelle la CFDT à rejoindre le mouvement de grève 

 

Comme on le comprend, Macron est en train de vendre donc une partie de la Sécurité sociale a des fonds vautours. C’est pour cela qu’il gèle les salaires : en effet, les cotisations sociales sont basées sur les salaires, et une hausse des salaires permettrait de financer facilement les déficits futurs.

Autrement dit la déflation salariale à l’œuvre depuis 1983 en France, présentée soit sous forme de stagnation des salaires depuis cette date ou encore plus sournoisement par les allégements périodiques des cotisations sociales sur les bas salaires pour soi-disant combattre le chômage et relancer la croissance, a préparé les déficits des organismes de Sécurité sociale, Santé et Retraites de façon à pouvoir les livrer au secteur privé, arguant qu’ils sont mal gérés. Sur le graphique suivant on voit que la baisse de la part des salaires est très nette depuis 1983, et encore est-elle masquée par le fait que sur toutes ces années les hauts salaires ont continué d’augmenter. 

Macron et Philippe s’enlisent en voulant imposer leur réforme des retraites 

Part du travail dans la valeur ajoutée (Part en % du coût du travail dans la valeur ajoutée brute aux coûts des facteurs) Source : Insee, calculs Gilbert Cette et Jean-François Ouvrard 

Cette tactique au long cours est bien rodée depuis le milieu des années soixante-dix et justifie ex-post la volonté de la canaille politicienne de livrer le bien public aux « amis » qui les financent pour leur campagne électorale. Le CICE est typique de cette volonté, pensé par Macron, soutenu stupidement par Hollande, il s’agissait de compenser pour 20 milliards d’euros les cotisations salariales. Ce sont maintenant 140 milliards d’euros qui sont passés tranquillement des caisses de l’Etat dans les poches des milliardaires. C’est le plus gros hold-up de tous les temps. Notez que ces 140 milliards volés à la collectivité vont permettre à la crapule de la finance d’acheter ce que Macron est sensé leur vendre, ADP, la Française des Jeux et encore quelques babioles.

 Macron et Philippe s’enlisent en voulant imposer leur réforme des retraites 

Dans toute cette question de « réforme des retraites », il y a des conséquences qui ne sont pas du tout calculées. On comprend bien que d’une manière ou d’une autre, c’est le pouvoir d’achat des salariés qui va encore être sacrifié au nom de la nécessité d’innover et d’investir – dans quoi, on se le demande.

Or tout le monde vous dira les cheveux gris sont maintenant un marché important : les séniors alimentent par exemple le marché des loisirs et du tourisme en dehors des périodes de haute fréquentation. Ils consomment aussi plus soins de santé et de médicaments que les plus jeunes. Ils soutiennent également les plus jeunes qui ont des difficultés pour se loger et pour trouver un emploi. On parle d’un marché de 150 milliards d’euros par an pour la silver économie. Mc Kinsey pense que d’ici à 2030, 60% de la hausse de la consommation sera le fait des retraités.  

Aujourd’hui il y a près de 16 millions de retraités, ils seront 20 millions en 2030[9]. Massacrer les retraites aujourd’hui, c’est réduire la demande à moyen et long terme. Sans même parler du fait que les retraités sont aussi très impliqués dans diverses formes de bénévolat qui permettent à l’Etat d’économiser des sommes importantes pour l’aide sociale.

On voit qu’en jouant le « travailler plus » pour financer les retraites, le gouvernement qui est formé de personnes qui n’ont jamais travaillé, combat en réalité la « société des loisirs ». Le but est d’enchaîner le plus longtemps possible des individus à leur travail pour des sommes dérisoires. 

Macron et Philippe s’enlisent en voulant imposer leur réforme des retraites Bayonne, manifestation le 12 décembre 2019 

Le caractère réactionnaire, rétrograde, de ce gouvernement est ici dévoilé : revenir en arrière sur l’idée qui avait soutenu durant tout le XXème siècle le développement du capitalisme, progresser vers des charges de travail moins lourde et une plus grande liberté dans l’usage du temps individuel. Cette idée stupide, macronienne, n’a strictement aucun avenir, même si ponctuellement elle permettra à quelques groupes financiers de capter de la valeur. Le temps du capitalisme sauvage du XIXème siècle est révolu, Macron ne le restaurera pas.

Il est difficile de faire le point sur les réactions après la déclaration de guerre d’Edouard Philippe. Dès le 12 décembre un grand nombre de manifestations ont eu lieu pour protester sur le fond et sur la méthode, Paris, Rennes, Bayonne, la liste est très longue. Ailleurs, comme à Marseille c’est l’accès aux installations portuaire qui se trouve bloqué. A Nantes une galerie marchande a été envahie, et le périphérique bloqué. Anne-Laure Cattelot, une députée macroniste, particulièrement connue pour ses positions extrémistes, a vu devant sa maison des Gilets jaunes et des syndicalistes venir protester. Elle l’a mal vécu. Ces manifestations se font dans un grand désordre, sans coordination, presque spontanément, c’est dire si l’exaspération des travailleurs a atteint un niveau élevé. 

Macron et Philippe s’enlisent en voulant imposer leur réforme des retraites 

Manifestation à Paris le 12 décembre 

Il semble bien que Macron et Philippe n’ont pas mesuré vraiment le rejet de la réforme. Mais devant la bronca que le discours de Philippe a déclenchée, Ils ont commencé à reculer. Bruno Le Maire et Edouard Philippe nous disent maintenant qu’ils veulent négocier.

En vérité il semble que le discours maximaliste de Philippe avait pour but de faire semblant de reculer. Il est probable qu’il va revenir sur l’âge pivot de 64 ans et donc le ramener à 62. Evidemment avec une décote. Mais la balle n’est plus dans son camp, ce sont maintenant les syndicats qui ont l’initiative. Tout le monde va se préparer pour la manifestation de mardi 17 décembre. Ils ont le soutien très large de la population qui commence à comprendre que le blocage de l’économie, c’est d’abord la responsabilité de Macron. Ils peuvent donc exiger l’annulation pure et simple de cette réforme ignoble.

Une des conséquences de l’entêtement imbécile du patronat et de sa valetaille macronienne est justement qu’ils risquent, en voulant tout, de n’obtenir rien. A Supposer qu’ils fassent passer cette loi maudite, il suffira au candidat arrivé au second tour contre Macron – si celui-ci franchit le cap du premier tour – de dire qu’il va annuler cette loi maudite pour rafler la mise. 

Macron et Philippe s’enlisent en voulant imposer leur réforme des retraites Rennes, manifestation contre la réforme des retraites, le 12 décembre 2019


NOTES :

[8] La vente de la Française des Jeux a rapporté 2 milliards à l’Etat, sachant que cela représente moins de 8 années de bénéfice. Pour ceux qui ont investi dans cette affaire le rendement est excellent. Sur 20 ans la perte pour l’Etat sera donc approximativement de 450 millions x par 12 ans, soit au moins 5,4 milliards d’euros.

Tag(s) : #Grèves
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