De gauche à droite : l'ancien Haut-Commissaire à la réforme des retraites Jean-Paul Delevoye, le président de la République Emmanuel Macron et le président de l'Assemblée nationale Richard Ferrand (image d'illustration).
RT France
En plein mouvement social, le gouvernement met en avant l'urgence d'une réforme du système des retraites présentée comme inéluctable. Mais cet argument est-il fondé ?
Certains observateurs opposés au projet de loi en doutent. Afin d'expliquer aux Français le bien-fondé du projet de réforme des retraites qu'il défend, le gouvernement met en avant un système unique censé être financé par les cotisations de retraite de tous les salariés.
Toutefois, une des dispositions prévues dans le rapport Delevoye (ancien Haut-commissaire à la réforme des retraites) envisage d'exclure du futur système de retraites, dit universel, une partie des sommes actuellement cotisées par les salariés les mieux rémunérés.
Vers un manque à gagner de 71 milliards d’euros ? Alors que le texte prévoit «une cotisation plafonnée de 25,31 % qui s’appliquerait aux salaires jusqu’à 120 000 € bruts/an, soit une limite correspondant à trois fois le plafond annuel de la sécurité sociale [également connu sous l'acronyme PASS]», plusieurs observateurs s'inquiètent de cet abaissement du plafond de cotisation, qui peut actuellement atteindre jusqu'à huit fois le PASS, soit 324 192 €.
Ainsi, à partir de 120 000 € de rémunération annuelle, le rapport Delevoye prévoit la mise en place d'une cotisation déplafonnée minime de 2,81% (soit près de dix fois moins que le taux de cotisation plafonnée), afin de «faire contribuer solidairement les plus hauts revenus au financement du système de retraite». «La différence entre le système actuel et la réforme de Macron réside ici : tous les salaires compris entre 120 000 € et 324 000 € sortiront du régime des retraites à partir de 2025, année de son entrée en vigueur», note ainsi l'équipe de la chaîne YouTube d'actualité politique Osons Causer, dans une vidéo publiée ce 20 décembre.
Citant un chiffrage des services de l’AGIRC-ARRCO (le système français de retraite complémentaire des salariés), l'Union générale des ingénieurs, cadres et techniciens CGT (UGICT CGT) évoque alors la perte considérable de ressources qu'une telle réforme pourrait faire peser, selon l'organisation, sur le système de financement des retraites par répartition. «L’étude démontre que le manque à gagner en termes de cotisations serait de près de 4,8 milliards en moyenne annuelle, soit en cumulé de 2025 à 2040 de plus de 71 milliards d’euros», affirme en effet l'UGICT CGT dans un communiqué daté du 18 décembre, grâce auquel la chaîne YouTube Osons Causer explique avoir pu obtenir de précieux chiffres. «En discutant avec le syndicat, nous avons pu avoir accès à l’évaluation – encore non rendue publique – du régime de retraite des cadres – AGIRC-ARRCO», peut-on en effet lire en préambule d'un article d'Osons causer.
Le système de retraites par répartition en danger ? Même constat alarmant du côté du Fil d'Actu, autre chaîne YouTube d'analyse politique, qui aborde également la question dans une vidéo parue le même jour, sans toutefois évoquer les chiffres donnés par l'UGICT CGT. «A application, les personnes déjà en retraite qui touchaient de hauts salaires vont continuer à percevoir le même niveau de pension alors qu'il y aura moins de cotisations pour les financer», pointe par exemple la présentatrice de la chaîne, Tatiana Ventôse.
Celle-ci évoque en outre les risques qu'une telle mesure pourrait comporter quant à la préservation du système français de retraites par répartition, dont le fonctionnement s'oppose au système par capitalisation, un processus d'épargne individuel basé sur l'autofinancement. «Est-ce que les personnes qui touchent un salaire de 27 000 €/mois [soit 324 000 €/an, qui correspondent au plafond de cotisation actuellement en vigueur] vont accepter de voir leur retraite réduite au niveau de ceux qui en touchent 10 000 ?», s'interroge en effet la Youtubeuse, estimant pour sa part que l'argent qui ne sera plus injecté dans le nouveau système dit universel pourrait finalement «alimenter un système de retraite parallèle, une retraite par capitalisation», modèle que le gouvernement s'est pour l'heure toujours défendu de prôner...
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Fabien RIVES