Le 30 juin, le deuxième réacteur de la centrale de Fessenheim, située en Alsace sur les bords du Rhin, sera déconnecté du réseau électrique. C'est la fin d'une longue histoire pour la centrale, dont la construction a été décidée à la fin des années soixante par les présidents Charles de Gaulle puis Georges Pompidou. Sa mise en service date de 1977. « Les Echos » reviennent sur sa fermeture.
La centrale de Fessenheim emploie de nombreuses personnes, directement et indirectement. Selon une étude de l'Insee publiée en 2014, 850 salariés d'EDF travaillaient directement sur le site.
A ce nombre s'ajoutaient 510 salariés travaillant chez des sous-traitants d'EDF et autres prestataires de services, ainsi que 550 emplois régionaux induits par la consommation des familles de ces salariés. « Au total pour la région, l'existence de 1.900 emplois et les revenus de 5.000 personnes dépendent de la centrale », estimait l'Insee.
REPRIS SUR
Des militants, dont certains déguisés en ours blancs, manifestent devant les locaux de Greenpeace France, à Paris, le 29 juin 2020. NW / « Le Monde »
« Vandalisme climatique ! », « Le nucléaire pour le climat ! ». Curieuse inversion des rôles : ils sont une quarantaine, lundi soir, devant les locaux de Greenpeace France, à crier des slogans et brandir des pancartes contre la fermeture du deuxième réacteur de la centrale de Fessenheim (Haut-Rhin).
Cette fois, ce ne sont pas les activistes écologistes, habitués des happenings et des actions médiatiques, qui tiennent le haut du pavé, mais des militants pro-nucléaires beaucoup moins rompus à l’exercice, et un peu étonnés de se retrouver là. « On est là pour dénoncer les contre-vérités de Greenpeace sur le nucléaire », explique Myrto Tripathi, ancienne cadre d’Areva, qui anime désormais le collectif Les Voix du nucléaire.
Pourquoi interpeller une ONG, alors que la décision de fermer la centrale de Fessenheim a été prise par le gouvernement ? « Il y a un amalgame qui est fait entre le nucléaire et les énergies fossiles, et on voit que ces éléments, diffusés par des associations comme Greenpeace, sont repris jusqu’au gouvernement », détaille Mme Tripathi.
Face aux portes closes de l’ONG, les militants pro-nucléaire, dont certains déguisés en ours blancs, ont respecté une minute de silence pour la fermeture de la centrale alsacienne, en dénonçant un « crime climatique ». Le groupe, plutôt jeune et masculin, ne comptait pas que des salariés de la filière nucléaire.
Fabrice, la trentaine, salarié dans l’automobile, explique ainsi : « J’ai très peur du changement climatique, je fais le maximum dans ma vie personnelle, je prends peu l’avion, je circule à vélo. Mais, en analysant la situation je me suis dit qu’on n’avait pas d’autre choix que le nucléaire pour faire face à l’urgence climatique. Ce n’est pas l’énergie idéale, mais c’est la moins mauvaise de toutes. »
Un argument répété par de nombreux militants présents, qui affirment ne pas défendre bec et ongles la filière nucléaire et ses emplois, mais penser d’abord que l’énergie nucléaire, très peu émettrice de CO2, est une solution face au défi climatique.
Pour compenser la perte engendrée par la fermeture, l'Hexagone donc peut compter sur d'autres centrales nucléaires et thermiques mais aussi sur les énergies renouvelables, notamment dans l'Est de la France.
En outre, en cas de demande importante sur le réseau, la France pourra importer de l'électricité des pays voisins. Notamment, elle pourra procéder à des échanges avec l'Allemagne. Simplement, cela risque d'avoir un impact environnemental négatif puisque le mix énergétique allemand est constitué à 38% de charbon, une énergie fossile très polluante.
La fermeture engagera-t-elle une hausse des émissions de CO2 ?

C'est fort probable ! Le nucléaire est une énergie relativement peu carbonée. Selon la Société Français d'Energie Nucléaire (SFEN), le maintien de Fessenheim "aurait donc permis à l’Europe d’émettre entre 6 et 10 millions de tonnes équivalent CO2 de moins chaque année".
Si la France fait appel à des centrales thermiques à gaz ou à charbon pour compenser la production d'électricité nucléaire mécaniquement, les émissions de gaz à effet de serre augmenteront. D'ailleurs des militants pro-nucléaires ont essayé de faire valoir cet argument sous la forme d'un happening devant les locaux de Greenpeace France, le 29 juin.