Le Xinjiang dans la Chine
Urumqui, capitale du Xinjiang, est une grande et belle ville, moderne, dotée d’un métro, reliée à Beijing par un TGV et bien sûr par un aéroport, une ville où, apparemment, il fait bon vivre.
Urumqui,
De manière générale, il faut penser le Xinjiang comme une très ancienne terre de culture, de rencontre et de civilisation. Il faut également penser le Xinjiang comme un terre chinoise. Les Occidentaux croient, dans leur masse, que l’on est Chinois si l’on a les yeux bridés. Les Chinois ne raisonnent pas de cette façon. On est Chinois parceque l’on est né dans un territoire constitutif de la Chine, de parents nés sur cette terre. Les Ouighurs sont des Chinois. Les généraux de la dynastie Han étaient au Xinjiang bien avant que la Américains y fourrent leur nez.
En même temps que la route de la soie, les trois religions s’y sont installées : bouddhisme, islam, christianisme. Le Xinjiang n’est pas une terre ou une région musulmane. C’est une terre chinoise, pluri-culturelle et pluri-religieuse que les empereurs de la Chine ont pacifiée avec obstination et continuité, ayant à faire face à une population qui, tout en étant remuante et parfois rebelle, a néanmoins trouvé avantage, à l’ombre de la muraille de Chine et des armées chinoises, à prendre place dans l’ensemble impérial chinois.
La grande bourgeoisie américaine, leader de l’Impérialisme, cherche à transformer cette région de culture en zone d’attentats et de troubles graves, d’une part pour tenter de déstabiliser le régime socialiste chinois, et d’autre part pour jeter le trouble et le doute quant à la viabilité de la nouvelle route de la soie.
Je ne pense pas que ces gens imaginent pouvoir un jour installer dans cette région des missiles pointés sur Beijing. Ils savent que le gouvernement de la Chine ne le permettra pas. Mais sait-on jamais? Ce sont des aventuriers, des joueurs de poker, des pistolleros stupides. Ils s’illusionnent sur leurs capacités. Ils pensent encore dans les termes «d’avant». Ils louchent sur les ressources minières dont l’Ouest chinois est doté et c’est sûr qu’ils mettent le paquet pour y foutre la merde. Le Xinjiang fut une région de rencontre et de culture, et cela en raison de l’influence chinoise et de ses armées pacificatrices. Les dirigeants américains ne rêvent que d’une chose : la transformer en un lieu de mort et de barbarie. Je vais développer 3 points.
1) Les Ouighours seraient l’objet d’un génocide
A) Le Xinjiang abrite 24 millions d’habitants dont 40%, soit 9 millions, sont Ouighours. Peut-on imaginer que 1/10 d’entre eux soient en camp de concentration sans que cela soit perçeptible même pour les visiteurs? En outre, c’est mal connaître les Chinois que de penser qu’ils resteraient indifférents et passifs devant ce phénomène. Il est devenu impossible de contrôler les mobiles, qui font désormais partie de la vie économique ou sanitaire courante. Un tel emprisonnement massif entrainerait une réaction par le biais des téléphones mobiles, de la part des Oughours eux-mêmes, ce qui n’est pas le cas.
B) Il serait intéressant d’utiliser les statistiques annuelles chinoises pour suivre la démographie de cette région. En 2016, les trois taux démographiques de base (taux de naissance, de décès, de croissance naturelle) étaient respectivement, pour la Chine entière et le Xinjiang les suivants : 12.95; 7.09; 5.86 et 15.34; 4.26; 11.08. C’est curieux, quand même, dans une région où la population la plus nombreuse serait soumise au génocide, d’observer une démographie aussi dynamique.
C) Ce qui est visible est le déploiement policier. Pour des raisons diverses, certains Ouighours sont sensibles à l’infiltration américaine et aux mots d’ordre terroristes. Ils ont déjà tué plusieurs fois en Chine. Les gouvernants chinois craignent des attentats, cela paraît clair. Tout comme en France, il existe des Basques et des Corses qui haïssent la France, il existe des Ouighurs qui haïssent la Chine. Le gouvernement français craint les attentats. Il en est de même en Chine. Mais ce risque n’est pas combattu par un emprisonnement massif ou par la stérilisation des femmes ouighures. Il est d’abord combattu par un contrôle policier rigoureux. Il est ensuite et surtout combattu par une intégration économique visant le long terme. Je vais revenir sur ce point.
2) La religion musulmane, majoritairement pratiquée par les Ouighours, serait l’objet d’une répression féroce.
Cette sottise est typiquement orientée vers des esprits américains en même temps que le produit d’esprits américains. L’Amérique s’est fondée idéologiquement sur la liberté religieuse. Et comme ce sont quelquefois des ânes bâtés, ils estiment que tous les pays du monde ont suivi le même chemin qu’eux. L’observation de la vie en Chine montre de manière rapide et évidente que cet argument est sans fondement.
A) Les Chinois (à commencer par les Hans) sont, dans leur masse, indifférents à ce que nous appelons la religion. De manière générale, ils ne se demandent pas ce qui est vrai, comme c’est la cas dans les zones culturelles monothéistes. Ils se demandent ce qui est juste. Cette différence est, selon mon interprétation, une différence très profonde avec les sociétés de type occidental.
B) Cela dit, les gouvernants tiennent compte de la religion, au sens occidental du terme, et notamment de la religion musulmane. Une illustration visible de mon propos est que, dans toutes les universités, existent des restaurants hallals. J’ai pratiqué celui de l’Université de l’économie et des finances, à Shanghai. De manière plus fréquente, j’ai pratiqué celui de l’Université médicale de Nanning, où j’ai passé 2 ans à temps plein. Les enseignants s’y rendent car si la nourriture y est un peu plus chère, elle est aussi meilleure, épicée, parfumée.
C) En Chine, le voile n’est pas un problème social. Personne n’y prête attention.
D) Les Ouighours ne sont pas les seuls musulmans de Chine. Dans le Xinjiang, la minorité Hui, numériquement importante, est musulmane. Comment la répression soit disant religieuse, menée contre la population des Ouighours au Xinjiang, pourrait-elle ne toucher que les Ouighours? C’est impossible. Si le gouvernement chinois voulait humilier les Ouighurs en se comportant de mauvaise manière envers la religion musulmane, ils se mettraient du même coup à dos d’autres populations, notamment Hui, importantes numériquement dans le Xinjiang. Une telle action serait politiquement stupide.
E) Ce que j’ai observé, pendant mon voyage de 2019 dans le Xinjiang, ce n’est pas la destruction des divers lieux saints de la religion musulmane. C’est au contraire leur restauration. Le tourisme est l’une des activités sur lesquelles table le gouvernement chinois pour éliminer la pauvreté. Et l’on a, ici, un exemple de ce que peut signifier l’économie de marché socialiste : le gouvernement laisse à l’initiative privée le soin des voyages touristiques, des visites organiséees, des hôtels, etc. Et lui-même accomplit les restaurations basiques nécessaires, la construction de nouvelles «vieilles cités», etc., ou construit les infrastructures indispensables. Les bus publics sont un moyen pas cher, au sein des villes, pour visiter ces monuments.
Bref l’argument religieux émis par les impérialistes est typiquement surréaliste.
3) Démocratie bourgeoise procédurale et Démocratie populaire substantive.
Les 3 piliers de la démocratie bourgeoise américaine sont :
a) la liberté religieuse totale, qu’il s’agisse des religions établies ou de celle des sectes;
b) la liberté absolue de l’entreprise;
c) les modalités procédurales du fonctionnement démocratique (droit de vote des citoyens, institutions, séparation des pouvoirs, etc).
En revanche, la démocratie américaine n’est pas substantive. C’est à chacun de se débrouiller pour assurer son existence, sa retraite, sa santé et même sa sécurité.
Par contraste, la démocratie populaire chinoise est d’abord substantive. Elle vise à assurer le bien-être économique de la totalité de la population chinoise. J’insiste à nouveau sur le point suivant : être Chinois, en Chine, ne désigne pas une ethnie particulière. Cela désigne le rapport à un territoire et à son régime. Les Ouighours sont des Chinois. Et tous les Chinois bénéficient de la démocratie substantive. Le gouvernement chinois a entrepris une vaste politique de stabilisation des déserts et de plantation d’arbres. Les Ouighurs en ont également le bénéfice.
En Chine, l’égalité des Chinois, avec pour complément l’existence de procédures compensatrices (par exemple égalité de revenu entre villes et campagnes), est une préoccupation réelle alors qu’aux Etats-Unis, où les citoyens sont supposés égaux politiquement, il est évident qu’ils ne le sont pas économiquement sans que le gouvernement fasse grand chose pour compenser ces inégalités, au contraire.
La différence existant entre démocratie bourgeoise procedurale et démocratie populaire substantive est pertinente pour comprendre les limites de l’intervention trublionne américaine au Xinjiang et les raisons prévisibles de son échec.
Les attaques menées contre la Chine pour mettre en cause la nature socialiste et démocratique de son régime et préserver obstinément, par contraste, la nature capitaliste et impérialiste de la société nord-américaine, le sont au nom «des droits de l’homme» (les internements massifs dont les Ouighours seraient les victimes) et au nom de la liberté religieuse (les humiliations qui seraient apportées contre la religion musulmane). Ces attaques peuvent séduire certains esprits très faibles de l’opinion publique américaine ou française (les lecteurs de Libération, par exemple). Mais elles sont inconsistantes et feront long feu.
Cela dit, les gouvernants de la Chine ont compris qu’ils ne pouvaient en rester à ce constat. Le développement économique ayant accompagné la réforme et l’ouverture, à la fin des années 1990, s’est accompagné d’un déséquilibre de l’économie chinoise entre sa partie maritime (la Chine de l’Est) et sa partie continentale (la Chine du centre et de l’Ouest).
L’une des caractéristiques d’une économie socialiste est de pouvoir réagir de façon volontariste et rapide pour contrer ou dépasser les effets pervers de ces déséquilibres. Les résultats de cette politique volontariste sont déjà visibles. Elle se traduit par le développement des communications terrestres, férroviaires, aériennes et électroniques entre le Xinqiang et le reste de la Chine. Ce développement permet le tourisme, facilite l’écoulement et l’échange inter-régional des produits, les financements, la circulation des hommes. Elle se traduit par une politique régionalisée de développement urbain intermédiaire, visant à stabiliser autant que possible la population dans ses lieux de vie ancestraux, au lieu de la voir se précipiter vers les zones maritimes d’emploi. Cela se traduit par une politique d’éducation de la population, de réduction de l’analphabétisme et de la misère. Enfin, les ressources minières du Xinjiang et plus généralement du Nord-Ouest de la Chine sont de plus en plus exploitées, ce qui apporte emplois et revenus.
Les modestes informations que je peux apporter à ce bilan global sont, d’une part, que pour l’embauche, la population du Xinjiang (pas seulement les Ouighurs) est prioritaire. Elles sont d’autre part le témoignage d’une forme particulière d’intégration de la population fermière du Xinquiang aux visites touristiques et aux revenus qu’elles engendrent. En voici une illustration. Après avoir visité les fermes à raisins de Toulupan, leur système d’irrigation, et divers autres endroits, les groupes s’arrêtent généralement dans une ferme. Les filles et les fils de la famille accueillent les hôtes. On leur propose alors un spectacle sans manières de danses locales, ainsi qu’une collation appréciée de tous. Les produits locaux sont en vente (jujubes séchées ou fraîches selon la saison, raisins secs, pépins de raisins séchés, vendus broyés pour leurs vertus médicinales).
C’est dire que, avec persévérance, le gouvernement central chinois et ses relais locaux mettent en oeuvre, selon des formes multiples, diversifiées, une démocratie substantive, dont bien des citoyens français au américains aimeraient certainement bénéficier. Je dois dire enfin que la lutte contre le Covid19 n’a pas été moindre au Xinjiang et plus particulièrement envers les Ouighours de cette province que partout ailleurs en Chine.
Quelques mots pour conclure mon propos. Le Xinjiang est une terre aride et dure. Ses habitants depuis des siècles ont su domestiquer l’eau des montagnes et en faire un facteur de vie. A l’ombre de ses arbres et de ses maisons, dans des grottes, ou, plus surement, le long de la muraille de Chine prolongée, une culture de communication et d’échanges a pris racine dans cette terre hostile. Les armées impériales, depuis la dynastie Han (206 avant JC-226 après JC), lui ont apportée les éléments d’une vie nouvelles. C’est cette culture ancienne que veut détruire la grande bourgeoisie américaine avec le support de ses piteux alliés. Mais cette grande bourgeoisie confond la culture et le baratin. Elle n’a rien à apporter si ce n’est le mensonge et parfois même le crime ou l’attentat.
Les mensonges des impérialistes ont une portée très courte. La démocratie procédurale peut momentanément semer le trouble chez certains mais elle ne nourrit pas son homme et repose sur une propagande aussi médiocre que minable. C’est pourquoi la démocratie substantive et solidaire l’emportera, inévitablement. Quant aux attentats, toujours horribles, ils buttent contre la muraille de la sécurité policière chinoise, avec le soutien de la population, car tous les Chinois, Ouighurs compris, apprécient la paix et la sécurité.
Jean-Claude Delaunay