Au Mali, de jeunes blogueurs, à travers des hashtags, véhiculent leur vision pour le changement d’un pays qu’ils veulent voir faire «peau neuve». Incontournables, ces mots clés évoquent les priorités des populations. Les internautes espèrent ainsi faire bouger les lignes pour se reconnaître dans la charte de la transition des jours à venir.
#MaTransition et #MonNouveauMali. C’est sous ces deux hashtags, lancés par des blogueurs au Mali après le renversement du régime de l’ex-Président Ibrahim Boubakar Keïta (IBK) le 18 août dernier, que la jeunesse du pays présente sa vision et ses aspirations sur les réseaux sociaux.
Elle entend ainsi prendre pleinement part à l’avènement d’un tout nouveau système politique efficient de gestion du Mali.
Mali.
Le hashtag #MaTransition est une initiative de la communauté des blogueurs du Mali Doniblog, mise en place pour réunir toutes les propositions des jeunes Maliens sur la Toile.
Conscients qu’ils ne peuvent pas tous être reçus par le Comité national pour le salut du peuple (CNSP) –la junte militaire au pouvoir qui sera chargée de mettre en place la transition–, les jeunes veulent faire entendre leur voix et contribuer à l’édification du nouveau système.
Depuis son lancement le 25 août, le hashtag #MaTransition est devenu viral sur la Toile et plusieurs jeunes internautes maliens y donnent de la voix. Le blogueur Touré Yahaya pense, à titre d’exemple, qu’il faut une «limitation des partis politiques à quatre au maximum, l’instauration d’un régime présidentiel et une rupture totale avec la France en mettant fin aux accords militaires, au franc CFA, à la présence de la Minusma, à Barkhane, à la Force Takuba et autres ingérences initiées sans l'avis des Maliens».
«Nous nous sommes dit que les jeunes, depuis leur salon ou leur maison, via leur téléphone, peuvent se faire entendre et dire ce qu’ils attendent de la transition. C’est ce qui nous a motivés à lancer le hashtag #MaTransition qui permet à tous de s’exprimer»,, explique à Sputnik Abdoulaye Guindo, président de Doniblog.
«Pour que chaque jeune comprenne que c’est sa transition à lui, nous avons opté pour le pronom possessif "ma" afin que chacun s’attribue la paternité de la transition en proposant les réformes qu’il veut voir mises en œuvre pendant cette période», ajoute-t-il.
En saluant l’initiative du hashtag qui donne la parole aux Maliens sur la Toile, en leur permettant de dire ce qu’ils aimeraient apporter à cette nouvelle page de l’histoire politique du pays, le tweetos Seybasima, quant à lui, pense que cette transition attendue «doit inclure tout le monde» –des hommes, des femmes, des jeunes et des personnes du troisième âge depuis le milieu rural jusqu’aux grandes villes. Dans la démarche pour une transition réussie, «la diversité est importante car le changement passe par tout le monde». C’est pourquoi la participation de toutes les classes sociales et les religieux n’est pas à occulter.
En ce qui concerne les débats sur la durée de la transition au Mali, les chefs d’État de la Cedeao (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest) proposent 12 mois avec un civil à la tête de l’État. Mais certains analystes estiment qu’elle pourrait aller jusqu’à deux ans.
Pour l’internaute Abdoul Aziz Traoré, le cas du Mali est «spécifique». Il considère qu’il faut «sortir de ce copier-coller classique qui veut que la transition ne dure pas». La jeunesse, décidément tournée vers le changement, pense que «le nomadisme politique est un danger pour la bonne gestion de la République. Son interdiction, plus qu’une nécessité, est un impératif», estime ainsi Dramé Yacouba, un autre jeune intervenant dans le débat via #MaTransition.
Lancé le 25 août dernier, «l’impact de #MaTransition est considérable», confie Abdoulaye Guindo à Sputnik. En effet, le hashtag a fini par capter l’attention des partenaires internationaux du Mali qui auraient demandé, selon Guindo, qu’un «document scientifique regroupant l’ensemble des propositions» des internautes sur la transition soit réalisé.
Ce document va être soumis au Comité national pour le salut du peuple (CNSP) lors des journées de concertation nationale des 5 et 6 septembre prochains dans la capitale.
Après cette étape, le hashtag va continuer sa mission avec le suivi de la mise en œuvre des réformes qui seront décidées, assure le président de Doniblog.
«Nous allons mener une campagne pendant la transition en utilisant toujours le hashtag pour rappeler au comité de gestion de la transition les décisions prises concernant des organes à mettre en place, si elles tardent à être mises en œuvre», prévient-il au micro de Sputnik.
Toujours pour que la transition soit réussie et aboutisse à un réel changement dans le pays, l’Association des blogueurs du Mali (ABM), en libéralisant la parole sur la Toile, a elle aussi lancé le hashtag #MonNouveauMali.
L’objectif, selon le journaliste et président de l’ABM, est de permettre à la jeunesse malienne qui n’a pas accès aux instances de décision de s’exprimer et de contribuer à l’écriture de cette nouvelle page politique ouverte au Mali depuis la démission du Président Ibrahim Boubacar Keita.
«Nous voulons être toujours sur la même longueur d’onde qu’avant le départ d’IBK, et mettre la pression sur les nouvelles autorités pour qu’ils sachent que rien n’a changé, que nous sommes toujours là et que nous veillons», confie Malick Konaté à Sputnik.
Ils sont nombreux les internautes qui utilisent le hashtag #MonNouveauMali pour parler de leur vision pour le pays.«J’ai espoir en un nouveau Mali où la jeunesse se sentira beaucoup plus concernée et contribuera davantage aux prises de décision», écrit par exemple Koumba Coulibaly sur son compte Twitter.
Solo Boureima, quant à lui, aspire à un «Mali du mérite et non du favoritisme, du clientélisme et du népotisme».
Le rendez-vous à l’occasion duquel les internautes maliens espèrent faire entendre leur voix est la concertation nationale. Celle-ci débutera les 5 et 6 septembre 2020 à Bamako et dans les capitales régionales avant de se poursuivre, dans le cadre d’un second round, du 10 au 12 septembre 2020 avec la participation de la diaspora, selon l’annonce du CNSP face à la presse ce 3 septembre.