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Manifestation contre la condamnation du rappeur Pablo Hasél et pour la liberté d'expression à Madrid, le 7 février 2021 (MUDDY IGNACE/DYDPPA/SHUTTERSTOCK/SIPA / SHUTTERSTOCK)

Arrestation du rappeur catalan Pablo Hasel  par la police à l'université de Lleida, (à 150 kms à l'ouest de Barcelone), le 16 février 2021 où il s'était barricadé. (J. MARTIN / AFP)

 

franceinfo

Devenu pour certains un symbole de la liberté d'expression en Espagne, le rappeur Pablo Hasél, condamné à la prison pour des tweets attaquant la monarchie et les forces de l'ordre, a été arrêté mardi matin afin de purger sa peine.

"Ils ne nous arrêteront pas, ils ne nous feront jamais plier, malgré toute la répression", a crié, le poing levé, ce rappeur, escorté par des policiers, selon des images de son arrestation diffusées par la télévision espagnole. "C'est l'Etat fasciste qui m'arrête. Mort à l'Etat fasciste!", a-t-il encore clamé en regardant les caméras au moment d'entrer dans un véhicule des "Mossos d'Esquadra", la police régionale catalane.

"Fausse démocratie"

 

Pablo Hasél -- de son vrai nom Pablo Rivadulla Duró -- avait jusqu'à vendredi soir pour se rendre volontairement en prison et commencer à y purger la peine de neuf mois qui lui avait été infligée par la justice espagnole.

Reconnu coupable d'apologie du terrorisme, ainsi que d'injures et calomnies à l'encontre de la couronne et de l'Etat, il avait été condamné pour des tweets dans lesquels il qualifiait notamment les forces de l'ordre espagnoles de "mercenaires de merde", les accusait de torture et d'assassinats et s'en prenait également à la monarchie.

Des termes en ligne avec les textes antifascistes et marxistes de ce rappeur massif, portant la barbe et parfois des lunettes et peu connu du grand public.

Proche de certains mouvements d'extrême gauche

De son vrai nom Pablo Rivadulla Duró, Hasél est l'un des représentants de la scène rap indépendante et engagée en Espagne, proche de certains mouvements d'extrême gauche.

Enregistrant depuis 2005, Hasél, qui a découvert le rap à l'âge de dix ans grâce à l'album culte Straight Outta Compton du groupe américain NWA, diffuse souvent gratuitement ses morceaux sur internet.

Des titres aux textes crus et révolutionnaires, comme Mort aux Bourbons, dans lesquels il s'attaque notamment à la famille royale espagnole qu'il accuse d'être l'héritière du régime franquiste. Ses paroles visent également le Parti populaire de droite ou le parti de gauche radicale Podemos, membre de l'actuel gouvernement de coalition.

Hasél multiplie aussi les références à des organisations armées d'extrême gauche comme les Groupes de résistance antifasciste du 1er octobre (Grapo), accusé d'un millier d'actions violentes entre 1975 et 2003 en Espagne, dont 80 assassinats et tentatives de meurtre.

Soutien du monde de la culture en Espagne

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"Ils devront venir m'enlever et cela servira aussi à dépeindre l'État sous son vrai visage, celui d'une fausse démocratie", avait déclaré à l'AFP ce rappeur catalan de 32 ans vendredi par téléphone.

Plusieurs manifestations parfois tendues en soutien à Pablo Hasél avaient eu lieu ces dernières semaines à Madrid et Barcelone, tandis que plus de 200 personnalités du monde culturel hispanophone, dont le réalisateur Pedro Almodóvar et l'acteur Javier Bardem, avaient signé une tribune en sa faveur.

Les signataires y affirmaient notamment que la condamnation de Pablo Hasél constituait une "épée de Damoclès" au-dessus de tous les artistes et accusaient l'Espagne d'agir comme "la Turquie ou le Maroc".

Epine dans le pied du gouvernement

L'affaire était devenue une véritable épine dans le pied du gouvernement de gauche de Pedro Sanchez, à plus forte raison à l'approche des élections catalanes de dimanche dernier.

La porte-parole de l'exécutif, María Jesús Montero, avait ainsi reconnu la semaine dernière "un manque de proportionnalité" dans la peine infligée au rappeur.

Sur la défensive, le gouvernement avait également promis "une réforme" pour que les "excès verbaux commis dans le cadre de manifestations artistiques, culturelles ou intellectuelles" ne relèvent plus du droit pénal et ne se traduisent plus par des peines de prison.

Partenaire des socialistes au sein du gouvernement, le parti de gauche radicale Podemos a vertement dénoncé mardi l'arrestation du rappeur.

"Tous ceux qui se considèrent progressistes et se vantent de la 'pleine normalité démocratique' (de l'Espagne), devraient avoir honte. Vont-ils fermer les yeux ? Il n'y a pas de progrès si nous ne voulons pas reconnaître les manques démocratiques actuels", a twitté Podemos.

L'exécutif promet une réforme pour libérer la parole artistique

Le gouvernement aussi s'est ému. La peine prononcée contre Pablo Hasél est marquée par "un manque de proportionnalité que l'exécutif avait déjà identifié à la suite de la publication de ce jugement", a reconnu mardi sa porte-parole, Maria Jesus Montero.

Dans un communiqué publié lundi 8 février, le gouvernement, formé par une coalition entre les socialistes de Pedro Sanchez et la gauche radicale, a indiqué qu'il préparait "une réforme" pour que les "excès verbaux commis dans le cadre de manifestations artistiques, culturelles ou intellectuelles" ne relèvent pas du droit pénal. Selon ce communiqué, sanctionner pénalement ces débordements "découragerait la liberté d'expression".

Le ministère de la justice proposera donc des peines "dissuasives" mais pas d'emprisonnement, et uniquement pour sanctionner les "conduites représentant clairement un risque pour l'ordre public ou l'incitation à des conduites violentes".

Tag(s) : #Espagne Résistance
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