Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Chine, la dictature high-tech 

C'était au temps où les entreprises de High-Tech chinoises dominaient l'économie, avec les risques pour le système et le rôle premier du Parti Communiste Chinoiis

Quand "Le Monde" s'effraie des mesures antioligarchiques prises par Pékin...

Vendredi 6 août 2021

Editorial du « Monde »

 

La tech chinoise sous la férule du régime 

La radicalité de la mise au pas du secteur par Pékin interpelle sur la compatibilité de la nature du régime avec le fonctionnement d’une économie de marché.

La mise au pas du high-tech chinois par le régime de Xi Jinping n’est pas nouvelle mais elle est en train de prendre une ampleur inédite. Ces derniers jours, les fleurons du secteur ont subi un sérieux tour de vis réglementaire qui a provoqué une vague de défiance parmi les investisseurs internationaux. Alors que ces entreprises promettaient jusque-là des taux de croissance attractifs, l’heure est au doute aujourd’hui. En quelques jours, leur capitalisation boursière s’est effondrée de plusieurs centaines de milliards d’euros.

Les attaques portées contre ces géants chinois de l’Internet sont tous azimuts. Il y a quelques mois, Jack Ma, le fondateur d’Alibaba, le numéro un du commerce électronique, avait déjà subi les foudres du régime, l’obligeant à renoncer brutalement à l’introduction en Bourse d’Ant, sa filiale spécialisée dans les prêts financiers.

Aujourd’hui, d’autres entreprises sont dans le collimateur du gouvernement. Didi, le leader chinois de services de voitures de transport avec chauffeur, a fait l’objet d’une enquête approfondie de cybersécurité, jetant ainsi le discrédit sur la société au lendemain de ses débuts en Bourse. De leur côté, les entreprises du secteur de l’éducation privée doivent se transformer en sociétés à but non lucratif. Quant aux jeux vidéo, ils sont désormais considérés par la propagande officielle comme un « opium du peuple ». Tencent, qui réalise un tiers de son chiffre d’affaires dans cette activité, a lourdement chuté en Bourse.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi  Avis de tempête sur les géants chinois cotés à Wall Street

Pour justifier son offensive régulatrice, Pékin dit vouloir lutter contre des entraves à la concurrence, tout en veillant à la sécurité des données personnelles et au respect des droits des utilisateurs. La formulation est surprenante de la part d’un pouvoir qui multiplie les atteintes à la vie privée pour asseoir son propre monopole politique.

Contours flous

Par ailleurs, il est légitime de s’interroger sur la valeur à accorder au droit de la concurrence dans un pays où les règles peuvent changer d’une semaine à l’autre en fonction des intérêts du pouvoir politique. Quant à la sécurité nationale, invoquée à tout bout de champ, les contours sont si flous sur le plan juridique qu’ils laissent libre cours à toutes les interprétations.

La priorité serait désormais de « réduire le fardeau financier des ménages » au détriment de la croissance des stars du Web. Derrière l’objectif louable de protéger les droits des collaborateurs de ces plates-formes, le pouvoir d’achat des parents soucieux de l’éducation de leur enfant ou les intérêts des petites entreprises face à la puissance des mastodontes de l’Internet, le régime cherche surtout à contrôler un secteur dont l’autonomie et la puissance sont de plus en plus perçues comme une menace pour la suprématie du Parti communiste chinois et la stabilité du régime.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi  « Xi Jinping n’est pas homme à tolérer longtemps qu’un morceau de Chine, fût-il tout petit, échappe au système central »

Que le high-tech soit sous la surveillance grandissante des gouvernements n’est pas spécifique à la Chine. Depuis des années, l’Union européenne et, plus récemment, les Etats-Unis cherchent à réguler le secteur. La différence est que cette reprise en main se déroule dans le cadre d’un Etat de droit, parfois au prix de procédures longues et fastidieuses mais qui garantissent le respect de la propriété privée.

Xi Jinping a choisi une autre voie, plus radicale. Les investisseurs occidentaux doivent plus que jamais se poser la question de la compatibilité de la nature du régime avec le fonctionnement d’une économie de marché. En Chine, celle-ci a tendance à se transformer en un théâtre d’ombres.

Le Monde

Tag(s) : #Chine, #Socialisme
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :