Le blog de David Noël, militant communiste et syndicaliste du Pas-de-Calais
Le secrétaire national du Parti communiste français et député du Nord Fabien Roussel a présenté lundi son programme pour l'élection présidentielle depuis le siège de la place du Colonel-Fabien à Paris
Fabien Roussel a la tête de l’emploi. Premier visage communiste sur les affiches électorales de la présidentielle depuis quinze ans, le député du Nord affiche une bonne humeur à toute épreuve. A l’image des « jours heureux » dont il a fait son slogan pour cette campagne présidentielle et dont les lettres barrent depuis quelques jours la mythique façade du siège du PCF, place du Colonel-Fabien à Paris.
La semaine dernière dans le baromètre OpinionWay/Kea Partners pour Les Echos et Radio Classique, le candidat est brièvement passé (3 %) devant sa rivale socialiste Anne Hidalgo (2 %) dans les intentions de vote pour le premier tour. Une péripétie sondagière, mais très symbolique, car jamais vue depuis les années 1970.
« Notre pari depuis le début, c’est que Fabien Roussel gagne à être connu et que plus il le sera, plus il va gagner en popularité », promet son directeur de campagne, l’adjoint à la maire de Paris Ian Brossat. Le communiste espère franchir ce premier obstacle de la notoriété grâce, en partie, à une accalmie sur le front sanitaire. « Les oreilles se tendent, on a eu quelques moments de visibilité pour percer le mur du son et quand il joue sa musique, on l'écoute », se réjouit Guillaume Roubaud-Quashie, porte-parole de la campagne. Le candidat a été bien aidé par une récente polémique née sur les réseaux sociaux après son apologie de la « gastronomie française » qu’il a résumée par « un bon vin, une bonne viande, un bon fromage ». Fabien Roussel a entretenu soigneusement la controverse, notamment avec une visite à l’École professionnelle de boucherie à Paris la semaine dernière.
Pique. Ces polémiques « sont révélatrices » car « elles montrent en même temps à quel point une partie de la gauche et des écologistes est véritablement coupée du peuple », assurait-il la veille de ce déplacement à l’occasion de ses vœux à la presse. « Pour certains, [...] le sujet c’est d’interdire : interdire la viande, le foie gras, les voitures, les sapins de Noël et même les centrales nucléaires ! », avait-il encore taclé. C’est le deuxième objectif de la campagne : marquer sa différence, notamment au sein d’une gauche morcelée comme jamais. « Sa spécificité commence à être entendue. Il est populaire, il dit des choses que les autres ne disent pas car ça n’est pas dans leur scope », affirme Ian Brossat.
« Le revenu universel, qui n’est rien d’autre qu’un revenu d’assistance garanti, nous n’en voulons pas »
Lundi, lors de la présentation de son programme, Fabien Roussel s’est d’ailleurs employé à lister ses divergences. Comme sur la question du travail, sujet sur lequel il a proposé d’instaurer un « droit universel à l’emploi ». « Nous voulons passer d’une France des bas salaires, du chômage, des allocations-chômage à une France des salaires élevés, une France du travail et du revenu issu du travail. Et donc le revenu universel, qui n’est rien d’autre qu’un revenu d’assistance garanti, nous n’en voulons pas », a déclaré le candidat communiste. Sans oublier d’adresser une pique à ses adversaires qui, à droite, célèbrent ses passes d’armes avec les écologistes et louent ses positions fermes sur la sécurité et la laïcité.
« Favori de la droite ». « Quand on me dit que je suis le candidat favori de la droite, ils n’ont pas dû bien lire mon programme. Maintenant, ils vont l’avoir sous les yeux », a ironisé le patron du PCF. Hausse généralisée des salaires, smic à 1 500 euros net par mois, rétablissement et triplement de l’ISF, création d’un demi-million d’emplois publics, blocage des délocalisations, nationalisation de BNP-Paribas, de la Société générale et d’Axa... Le projet labellisé communiste ne souffre en effet aucune ambiguïté. « C’est le candidat de la gauche simple avec des propositions qui paraissaient assez banales avant, mais qui, dans un univers d’une gauche un peu bizarre, ont parfois l’air exotiques », souligne Guillaume Roubaud-Quashie.
Tous les communistes ne goûtent pas pour autant la virée en solitaire de leur secrétaire national. Le député de Seine-Maritime Sébastien Jumel a annoncé son ralliement à Jean-Luc Mélenchon lors de son « meeting immersif » à Nantes, le 16 janvier dernier. Le maire de Dieppe Nicolas Langlois a depuis fait de même, après celui de Stains Azzedine Taïbi dès le mois de décembre. Face à la perspective d’autres défections, Fabien Roussel reste de marbre. « Un de perdu, dix de retrouvés ! [...] Ça relève le défi, ça donne envie d'être encore meilleur, plus fort, plus convaincant, plus déterminé et ça me renforce », s’est-il emballé. Avant de lâcher dans un large sourire : « L’adversité, ça n’a jamais été un problème, ça peut même être un moteur. »
Raphaël Proust
Source : L'Opinion
25 janvier 2022