Hier, en France, les enfants fêtaient Mardi Gras. Aux Etats-Unis, le "super Tuesday" dominait l'actualité.
Quel raport entre les deux évènements ?
D'un côté, c'est le dernier jour du carnaval, de l'autre, aux USA, le rodéo électoral continue : les acteurs demeureront masqués jusqu'au 4 novembre, jour des élections présidentielles. Et tout au long des dix mois qui nous séparent du scrutin, les candidats déguiseront leurs intentions !
Donc, à l'issue des consultations qui ont eu lieu le mardi 5 février dans 21 Etats américains, pour départager les candidats, les chiffres n'ont pas donné de résultats définitifs. Le 'suspense' continue, tant du côté Démocrate que Républicain. Hillary Clinton a dominé dans 8 Etats, dont certains, comme ceux de New-York et de Californie, rassemblent la population la plus nombreuse, la plus urbanisée. Barack Obama a remporté le plus grand nombre de suffrages dans 13 autres Etats, soit du Sud, à forte proportion d'afro-américains, soit ruraux. Au total, selon les premiers pointages, Hillary Clinton totalise pour l'instant, 829 mandats, et Barack Obama, 750. Pour être désigné candidat officiel du Parti démocrate, il lui faudra obtenir un minimum de 2025 mandats, sur les 4049 à répartir.
Donc, les jeux ne sont pas encore faits.
Selon les sondages quotidiens qui accompagnent la campagne électorale, et qui déterminent souvent le choix des électeurs, Hillary Clinton, qui se présente comme la plus compétente, la plus au fait dans la connaissance des dossiers, apparaît comme la candidate de la continuité. Elle aurait le soutien des femmes, en particulier celles de plus de cinquante ans. Barack Obama, lui, se veut être, à 46 ans, l'homme du changement. Il joue, tout en s'en défendant, de sa couleur de peau, de sa double origine, d'un côté kéniane par son père, blanche et protestante de l'Amérique profonde, par sa mère. Il en tire sa volonté de rassembler le peuple étatsunien, multiethnique et "drapeau étoilé". Faire du 'changement' la pierre de touche de la politique, demeure le meilleur moyen d'attirer tous les déçus des politiques précédentes, et qui veulent une 'rupture' avec elles.
Nous en connaîssons le prix en France, avec l'élection de Nicolas Sarkozy !
Si nous en croyons Bernard Guetta, Obama serait "moins à gauche" qu'Hillary Clinton ! C'est tout dire. Si les jeunes de 18 à 30 ans, lui accordent massivement leur confiance, il aurait également, selon le chroniqueur de France Inter, celle des électeurs dont le revenu annuel dépasse 100.000 dollars... Elément à rapprocher avec l'ampleur des fonds que le candidat démocrate reccueille pour sa campagne. Il totalise, juste derrière Hillary Clinton, mais bien avant le Républicain le plus doté, Mitt Romney, la plus grosse cagnotte, comptée en milliards de dollars ! Les riches donateurs n'ont pas l'habitude de galvauder leur fortune. Ils savent l'investir à bon escient.
La surprise viendrait plutôt du côté Républicain. John McCain, vient largement en tête. Pourtant, les pronostiqueurs politiques ne misaient guère sur son nom, il y a encore quelques semaines. Alors, pourquoi ce revirement ? Mitt Romney, un fidèle de George Bush, à la fortune bien assise, conservateur en diable, est sans doute victime de sa proximité avec l'actuel président. L'électorat républicain est en quête, lui aussi, de 'changement'. Et John McCain, lui, s'est démarqué du locataire de la Maison Blanche, tant sur le plan des libertés - il a violemment combattu l'usage de la torture - que sur son attitude militariste, en particulier au sujet de l'Irak. Ancien pilote au Viet Nam, il a fait été prisonnier et, dit-il, torturé. Il jouit de la qualité de 'héros' . Quant au troiième larron, Mick Huckabee, ancien pasteur et confit dans la religion, il se veut plus 'social', ce qui ne lui vaut guére de sympathie dans le camp républicain.
Ainsi, le suspense continue, et va se poursuivre, au fil des mois, jusqu'aux conventions des deux partis.
Ce qui est étonnant - le phénomène n'est pas nouveau - c'est l'mportance démesurée donnée en France aux élections américaines. Nous devons partager avec le peuple étatsunien chaque sondage portant sur telle ou telle primaire, les commentaires quotidiens d'outre-atlantique comme ceux de nos médias, les appéciations portées par nos journalistes sur chacun des candidats US. En plus, nous devons subir des enquêtes d'opinion visant à mesurer l'adhésion fictive des Français pour chacun de ceux-ci !
Jamais, vis-à-vis des élections allemandes, britanniques ou italiennes, nos concitoyens ne sont sollicités, jour après jour, sur les différents candidats et partis en présence, ni sur leur choix et leurs préférences. L'information existe, mais sans commune mesure avec celle prodiguée quand il s'agit des Etats-Unis. Ceux-ci aparaissent comme "la maison-mère" dont la France serait la "succursale" ! On mesure, ainsi le degré de "vassalisation" de notre pays vis-à-vis des 'maîtres américains'.
C'est si vrai que les candidats qui visent la Maison Blanche, ont, les uns et les autres, le même regard dominateur sur le globe terrestre. Daniel Vernet, dans Le Monde, daté du 6 février, écrit :
"Le second constat concerne le leadership américain dans le monde. Les candidats peuvent varier dans leurs définitions, mais tous quatre louent les Etats-unis comme une 'nation unique' (Mitt Romnet), qui "doit guider le monde par ses actes et par l'exemple' (Barack Obama). Car 'le monde compte sur le leader ship américain' (Hillary Clinton), dont la forme est 'unique' ( Jonh McCain)".
Pas étonnant, dans ces condiions, que les politiques et les médias français, à l'échine souple, se proccupent avec autant de constance, du nom de leur futur "boss"...