avec le secrétaire-général
du Parti communiste hongrois
Gyula Thurmer :
"L'avenir de l'Europe se décidera dans la rue, pas dans les Parlements "
Jeudi 22 septembre 2011
Interview de Martin Delgado,
pour La Republica,
journal communiste espagnol
Nous avons réalisé une nouvelle interview de Gyula Thürmer, président du Parti communiste ouvrier hongrois. Selon le dirigeant communiste hongrois, nous sommes confrontés à une crise profonde que le Capitalisme ne résoudra pas, et où l'option d'une Révolution n'est pas exclue.
Il nous explique que le Capital n'a pas intérêt à une renaissance du mouvement communiste, voilà pourquoi il a mis en œuvre une série de mesures légales, comme par exemple les tentatives pour éliminer les Jeunesses communistes de République tchèque (interdites en 2006 et après une victoire judiciaire, re-légalisées en 2010), interdire les symboles communistes (l'étoile rouge, la faucille et le marteau), comme cela s'est produit en Pologne et en Hongrie, ainsi qu'en faisant adopter des lois qui mettent sur le même plan fascisme et Communisme et en transformant la remise en cause de la propagande sur les prétendus crimes de l'époque soviétique en un crime passible d'emprisonnement.
Autres mesures, hors de la sphère proprement légale, la tentative d'intégrer les Partis communistes au système bourgeois, comme cela s'est passé, selon Thürmer, avec le Parti de la gauche européenne (PGE), organisation qu'a abandonné le Parti communiste ouvrier hongrois en 2009.
Pour Thürmer, deux des principales erreurs que commettent certains partis communistes sont : renier l'expérience des pays socialistes, parler de stalinisme et de dictature, c'est-à-dire adopter des positions révisionnistes, et d'autre part, abandonner ou renier l'Internationalisme, en limitant ses objectifs politiques au cadre national.
Nous l'avons interrogé sur un phénomène que l'on observe depuis quelques temps, sur une possible irruption du fascisme sur la scène politique. Le dirigeant communiste hongrois nous répond que le fascisme est un outil entre les mains des forces capitalistes. Le capital européen actuel cherche à éviter d'avoir à utiliser le fascisme, car l'opinion publique a en mémoire l'Histoire : « C'était alors un péril, et ça l'est encore aujourd'hui ». « Le capital ne considère pas l'utilisation du fascisme comme nécessaire, mais si la crise s'aggrave et si le mouvement communiste progresse, alors le capital aura recours au fascisme ».
Notre interlocuteur considère que nous n'en sommes pas arrivés encore jusque-là, mais on constate actuellement que le système démocratique bourgeois devient de plus en plus autoritaire, comme par exemple avec l'adoption de lois anti-terroristes.
Par ailleurs, certains pays permettent aux partis fascistes de se renforcer et d'entrer au Parlement, comme dans le cas de la Hongrie,« de sorte qu'un parti d'extrême-droite ait accès au financement et aux médias, tout en étant prêt à utiliser les mêmes termes que les communistes. Mais comme le Parti communiste ouvrier hongrois est une force extra-parlementaire, il n'a pas les mêmes possibilités (accès au financement, aux médias...) pour pouvoir contrer la propagande de l'ultra-droite ».
En tout cas, pour Thürmer avec une démocratie bourgeoise, il est impossible de changer les lois. « L'avenir de l'Europe se décidera dans la rue, pas dans les Parlements » et il a réaffirmé que, « si la crise s'aggravait, on utiliserait d'autres méthodes ».
Sur cette question, Thürmer a mentionné la Grèce, où se sont produits plusieurs attaques fascistes.
Quant à l'intervention armée de l'OTAN à Libye, il nous répond qu' « en Libye, il n'y a pas eu de Révolution ». Les forces impérialistes, États-Unis et Israël à la tête, veulent faire de place à de nouveaux visages, de nouvelles générations de leaders qui maintiendront le statu quo.
Nous mentionnons les déclarations de Viacheslav Titiokin, ancien rédacteur de “ Sovietskaya Rossia”, analyse de politique internationale, et membre du Comité central du KPRF (Parti communiste de la Fédération de Russie) selon qui « la chute de la Libye et de la Syrie signifierait une défaite stratégique de la Russie ». Sur cette question, le dirigeant communiste hongrois répond que le capital russe veut s'entendre avec les États-Unis. La Russie n'est pas l'URSS, c'est un pays capitaliste et il n'est pas aussi fort que l'était l'URSS. Mais il met en garde tout de même :
« Si la Syrie tombe, la Russie sera un pays encore plus faible ».
Concernant les prochaines élections en Russie en 2012, et le bonnes prévisions qui ressortent des intentions de vote pour le Parti communiste de la fédération de Russie, notre interlocuteur nous garantit qu' « il est impossible qu'il y ait un président communiste en Russie ».
Nous finissons notre interview en nous intéressant à la Biélorussie :
« Les États-Unis et l'Union européenne veulent détruire le système politique de Biélorussie car c'est le seul pays européen qui s'oppose aux politiques impérialistes », nous dit Thürmer. Ils pensaient que le système politique biélorusse était faible, mais ce pays a une économie forte, ses habitants vivent bien et mieux que ceux des nations voisines.
Les États-Unis sont intervenus à ce jour de deux manières en finançant l'opposition et en adoptant des sanctions économiques contre la République de Biélourssie. « Ils ont tenté d'utiliser les élections de décembre 2010. Le capital allemand, suédois et avant tout polonais a un grand intérêt à détruire la Biélorussie ». « Ils ont incité l'opposition à descendre dans la rue mais cela a échoué ». Parmi les autres méthodes qu'ils peuvent mettre en place à partir de l'Occident, c'est la guerre économique et y compris la création d'un gouvernement en exil.
L'attentat terroriste perpétré dans le métro de Minsk, en avril 2011, se voulait être un moyen de tester la réaction populaire mais cela n'a pas eu non plus les résultats escomptés.
Tout cela met la Russie dans une situation problématique et très contradictoire car, en Russie, on ne veut pas d'un président pro-américain, mais pas non plus d'un président qui rentre en conflit avec l'Occident.
Le modèle économique de la Biélorussie n'est ni celui d'un État capitaliste ni celui d'un système d'économie planifiée, selon Thürmer, le modèle est semblable à celui de pays comme le Vénézuela
TEXTE REPRIS SUR
LE BLOG DE JACQUES TOURTAUX