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L’affaire L’Oréal-Pouvoir politique :

les leçons d’une crise

 

Par Jean LEVY

 

Jour après jour, des éléments nouveaux viennent s’ajouter au dossier, qui fait toujours la « une » de l’information : le couple  L’Oréal - Pouvoir politique.

Hier, jeudi, les partisans du président de la République exultent : l’ex-comptable de Liliane Bettencourt revient sur les assertions de Médiapart. Elle dément avoir affirmé que des enveloppes garnies de billets aient été remises directement à Nicolas Sarkozy pour financer la campagne de Balladur en 1995. Le secrétaire général de l’Elysée, Claude Guéant, considère donc l’affaire comme close. Et tous les leaders de l’UMP emboîtent le pas, tirant à boulets rouges contre le site d’Edwy  Plenel

Par contre, l’ex-comptable confirme à la police le versement de 150.000 euros (dont 100.000 viendraient frauduleusement de Suisse), à la « cagnotte » du parti présidentiel, en 2007.

Tout le monde s’accorde sur le fait que Liliane Bettencourt, la troisième fortune de France, distribuait des sommes considérables à des politiciens amis. Et personne ne nie que le ministre du Budget de l’époque, Eric Woerth, était chargé, en tant que trésorier de l’UMP, de collecter des fonds auprès de sociétés, qu’il était, en tant que ministre, chargé de contrôler. Son épouse oeuvrait, de son côté,  à « optimiser » les avoirs de la patronne de l’Oréal.

En fait, la vraie question n’est pas de connaître le jour et l’heure des versements patronaux, de leurs montants à un euro près, et à quels intermédiaires ils étaient remis.

 

Le problème unique réside dans le lien étroit existant entre le pouvoir de l’argent et le pouvoir politique.

Mais cette réalité ne tient-elle pas à la nature même du système dans lequel nous vivons?

Quand les forces économiques, les « marchés », pour reprendre la terminologie  actuelle, dominent notre société, n’est-il pas logique que les politiciens à son service entretiennent des relations  étroites avec les grandes entreprises, les multinationales dont ils exécutent la politique ?

Y compris sur le plan des magouilles financières ?

 

Cette situation n’est pas nouvelle. De scandales retentissants accompagnent l’histoire de nos dernières républiques. Ce qui est nouveau aujourd’hui, avec la Vème République, c’est la concentration du pouvoir exécutif aux mains d’un clan qui s’estime au-dessus des lois. Le pouvoir en place tend à réduire le contrôle judiciaire, à étouffer les « affaires » en opposant, par exemple,  le « secret défense » dans les enquêtes sur les frégates de Taiwan ou les sous-marins de Karachi, ou par la clôture des instructions judiciaires comme pour l’affaire Boulin, l’un des trois ministres assassinés du temps de Giscard.

 

L’affaire L’Oréal a pris, toutefois, une dimension particulière. Il ne s’agit pas là d’une escroquerie commise par une personne en particulier. C’est tout le système qui est mis en cause. Ce scandale, de part son caractère collectif, met à nu, pour le plus grand nombre, le fond même de la société capitaliste.

Il est significatif que les médias sont contraints maintenant d’aborder les vraies questions, certes avec réticence et modération. Mais le rôle déterminant de l’argent roi sur l’action politique, les liens permanents entre la finance et les gouvernements, la population qui en paye le prix et les « riches » toujours plus riches, deviennent des sujets récurrents sur les ondes publiques.

 

C’est maintenant le moment, pour les forces qui se réclament de la « justice sociale », et d’abord du communisme, de poser, s’appuyant sur l’actualité,  le problème du changement de société comme priorité absolue.

Faute de cette orientation, notre pays risque le pire : sombrer dans un nouveau fascisme. Le climat pourri dans lequel nous baignons pourrait devenir le terreau d’un pouvoir ouvertement totalitaire. Il pourrait être issu du pouvoir actuel qui voudrait se survivre. Ou provenir de l’extérieur, prenant appui sur la défiance de masse de la population envers sa classe politique, faute de perspectives révolutionnaires…

 

On mesure ainsi les enjeux qui sont les nôtres.

Tag(s) : #Politique française
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