vendredi 23 mai 2014, par Comité Valmy
http://www.googleplussuomi.com/photos.php ?id=105428419249082327013&limit=600&sort=plus
Communiqué du
Comité Valmy
Régulièrement présentée par la presse et par les politiques comme un boulet, la SNCM est un des derniers fleurons de la flotte de commerce française. Ses navires, construits en France et battant pavillon français, participent à la desserte de continuité territoriale de la Corse, mais relient aussi d’autres espaces méditerranéens comme le Maghreb, l’Italie ou la Sardaigne. Jusqu’à peu, la SNCM employait également indirectement d’autres navires de commerce comme les rouliers de la CMN ou les porte-conteneurs de SUDCARGO, ce qui en faisait un maillon incontournable dans la chaîne du transport en Méditerranée. Sous les coups des privatisations et de la libéralisation imposée par l’Union Européenne, la compagnie, autrefois bénéficiaire, est aujourd’hui au bord du démantèlement. 4000 emplois sont directement menacés.
La politique de privatisation menée depuis 2006 s’est révélée désastreuse. Le premier investisseur à entrer au capital en 2006, le fonds de pension Butler Partner Capital, s’est retiré deux ans plus tard, en empochant une plus-value cinq fois supérieure à sa mise de départ. Le deuxième investisseur, Veolia, totalement étranger au secteur de transport maritime de passagers, n’a jamais eu le moindre plan de développement industriel. En 2013, il a affrété des vieux navires sous pavillon grec (cas du Venizelos). La flotte n’a pas été renouvelée, et le 17 mai 2014, le directoire de Veolia votait contre le plan de relance incluant la construction de quatre navires neufs aux Chantiers de l’Atlantique.
La SNCM a été utilisée par Veolia comme monnaie d’échange dans l’acquisition de marchés publics. Selon Henri Proglio, ancien PDG du groupe, Veolia n’a investi dans la SNCM que pour développer « son image auprès de ses clients », « comptant que ses clients [leur] seraient reconnaissants un jour » (rapport Assemblée Nationale, 11 décembre 2013). Le meilleur exemple est l’attribution des marchés publics de l’eau. En octobre 2013, dans des circonstances troubles, Veolia se voyait renouveler pour quinze ans son contrat (3,2 milliards d’euros) par « Marseille Provence Métropole ». Quelques mois plus tard, Veolia annonçait se décision d’abandonner la SNCM en la plaçant sous tutelle du tribunal de commerce. Sur le plan financier, Veolia aura d’ailleurs récupéré sa mise en vendant sur les fonds de départ de l’Etat (140 millions d’euros) et grâce aux cessions d’actifs (parts dans CMN, siège social).
L’Union Européenne a encadré juridiquement ce démantèlement. En interdisant toute aide d’Etat, l’UE a privé de financement une compagnie publique afin de la remplacer par un secteur privé s’affranchissant de la législation nationale. La Commission lui réclame aujourd’hui 440 millions d’euros, soit l’équivalent de deux ans de chiffre d’affaire. En 2000 pourtant, Corsica Ferries, au bord de la faillite, fut aussi renflouée par l’Etat à hauteur de 150 millions d’euros...
La concurrence déloyale menée par Corsica Ferries n’a pu se développer que par la libéralisation européenne des transports maritimes. « Nous ne serions pas là si le 7 décembre 1992 il n’y avait pas eu un nouveau règlement européen régissant le cabotage maritime en Europe. » » ne cache pas P. Mattéi, son directeur.
En effet, avant la mise en place de la politique maritime intégrée de l’Union, il existait en France des obligations de pavillon français (droit français, équipage français, navires construits en France) pour la majorité des trafics touchant aux intérêts nationaux. Tout le cabotage intérieur notamment, dont font partie les lignes Corse-Continent, devait obligatoirement passer par pavillon français (article 257 du Codes des Douanes). De même de nombreuses importations (loi pétrolière de 1928) et exportations (soutenues par la COFACE) bénéficiaient de ce régime en France.
L’entrée en vigueur des règlements CEE du 22 décembre 1986 et du 7 décembre 1992 a interdit toute réservation de pavillon et a ainsi engendré la quasi-disparition du pavillon dit « métropolitain ». Ce règlement a commencé à s’appliquer au trafic Corse-Continent en 1999 et aux règles d’appels d’offre en 2002. Cela a marqué le début de la crise sans fin que connaît depuis la SNCM.
Avec ces règlements, tout type de trafic devenait ouvert à n’importe quel pavillon communautaire, dont les conditions sociales, fiscales, sécuritaires et environnementales étaient moindres. Par ailleurs, le terme de « communautaire » n’était qu’un écran de fumée, puisque tout armateur utilisant un pavillon communautaire pouvait embaucher des marins extra-communautaires aux conditions de leur pays d’origine (arrêt Sloman de la Cour Européenne de Justice de 1992). Les compagnies publiques de cabotage, comme la SNCM, furent mises en concurrence avec des compagnies privées comme la Corsica Ferries battant pavillon italien registre international ou même, sur certaines lignes, le pavillon panaméen. Corsica Ferries qui n’était jusqu’alors qu’une petite compagnie régionale a alors très vite pu dépasser la SNCM.
La SNCM a été sabordée par l’Union Européenne. Le Comité Valmy souligne que son rétablissement et sa sauvegarde durable sont directement liés à la lutte pour la reconquête de notre souveraineté populaire et nationale. Ce combat pour l’indépendance nationale et la démocratie qu’elle conditionne est manifestement une perspective de longue haleine qui s’affirme dès maintenant en les exigences :
· De renationalisation, appropriation sociale sans indemnité, de la SNCM,
· d’intangibilité de la participation de l’Etat dans la compagnie,
· d’instauration de nouveaux critères de gestion impliquant le contrôle par le peuple nation du secteur public et nationalisé,
· de rupture radicale avec la "politique maritime intégrée" de l’euro-dictature,
· de restauration du monopole du pavillon français premier registre sur tous les trafics impliquant les intérêts de la nation.
Comité Valmy, 23 mai 2014