Che4ever
Près de deux cents syndicalistes ont soutenu hier Michaël Prince (poing levé) dont le porte-drapeau des Conti, Xavier Mathieu.
Michaël Prince, délégué syndical chez le transporteur TFE, à Chaulnes, a comparu hier pour contrefaçon d'une chanson à boire produite par son employeur.
«Allez Marcel, encore un d'mi
Qu'on oublie tous nos soucis
Allez Marcel, remets-nous ça
Qu'on oublie tous nos tracas.»
Quand il entend ces paroles sur le CD offert par son entreprise, à Noël 2009,
Michaël Prince est choqué :
« On travaille dans le transport routier. On ne fait jamais de prévention sur l'alcool. Quand un camarade est attrapé en état d'ivresse sur le lieu de travail, il est licencié sans qu'on cherche à l'accompagner. Je me suis dit qu'il y avait un fossé...»
Il bricole donc un clip, où la chanson est illustrée par des phrases de la prévention routière, d'autres de la communication interne de TFE et enfin des images d'accidents routiers (n'impliquant pas des camions de TFE).
« J'ai voulu l'envoyer par mail aux autres délégués syndicaux mais c'était trop lourd,affirme-t-il hier à la barre du tribunal. Alors je l'ai mis sur YouTube mais je n'ai pas coché la case "privé". Il a dû n'y rester que deux semaines. Il n'a été vu que 113 fois ».
L'entreprise TFE entame pourtant une action judiciaire, à laquelle était associée hier la veuve du compositeur, Bruno Aymard.
Maître Félix De Belloy a choisi de parler de cet homme, qui se savait en 2008 condamné par le cancer et à qui son employeur, TFE, a offert l'aboutissement d'un rêve de gosse : sortir un disque... « Il a été humilié. Sans doute que M. Prince ne le souhaitait pas, certainement n'était-ce qu'une mauvaise plaisanterie. En tout cas, il ne peut s'agir de parodie, dès lors qu'existe l'intention de nuire ».
L'humour peut être grinçant
La parodie, le mot est lâché ! Car si contrefaçon il y a dès que l'on diffuse une chanson qu'on n'a ni écrite, ni chantée, la loi prévoit une exception à ce délit : la parodie.
« Il faut clairement une intention humoristique », relève le procureur Éric Boussuge, qui la cherche vainement dans une photo d'accident mortel et requiert 1000€ d'amende avec sursis.
« L'humour est relatif, il peut être grinçant, lui répond Maître Élodie Tuaillon. En voyant le clip, je ne me suis pas esclaffée mais j'ai saisi l'ironie ». Au-delà, l'avocate de Mickaël Prince dénonce "une chasse aux sorcières".
Cette affaire Prince s'inscrit en effet dans le climat délétère qui régnait chez TFE, à Chaulnes, début 2010 et a abouti au départ du directeur du site. Michaël Prince, délégué CFDT, puis CGT, soutenu hier par une manifestation de deux cents personnes, se voit en victime et se demande :
« Jusqu'où iront-ils ? »
Tony Poulain pour le Courrier Picard