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TEXTE REPRIS SUR
LE BLOG DE DIABLO
Commun Commune

Pete-Seeger.jpg

Article AC pour http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/

 

Avec le décès de Pete Seeger, les hommages fleurissent dans la presse dominante pour ce génie modeste de la chanson contestataire, non sans hypocrisie pour celui qui fut persécuté, ostracisé pour ses opinions, ses combats, confondus ou parallèles à ceux des communistes.

 

Comment résumer en quelques phrases la vie et l’œuvre de Pete Seeger ? Celle d'un virtuose de la « folk song » qui a mis humblement son talent au service des plus humbles, des victimes de l'oppression, quelle qu'elle soit, d'où qu'elle vienne.

 


« La voix des opprimés » : ouvriers, amér-indiens, Noirs, pacifistes, oubliés du rêve américain, unissez-vous !

 

C'est dans son adolescence que Pete – enfant d'un musicologue réputé, habitué du quartier des artistes marginaux de New York « Greenwich Village » – croise son intérêt pour la musique, notamment des instruments folkloriques, oukélélé et banjo, avec une conscience sociale.

 

Cette conscience, c'est d'abord celle de puiser dans le meilleur des traditions musicales américaines, d'abord celles des opprimés : mélodies juives, chants de gospel afro-américains, un goût pour le « folk » tant des pauvres colons anglo-saxons que des Indiens dépossédés.

 

A la sortie du lycée, Pete est admis à Harvard. Là-bas, il passe son temps à rassembler ses camarades par ses talents de musicien, chanteur, par des actions d'organisateur du « Syndicat des étudiants d'Harvard » où il édite le journal « Le progressiste d'Harvard ».

 

Il quitte l'université en 1938, à 19 ans. Il a trouvé sa vocation. La réputation de Pete circule, sa carrière s'envole rapidement. Sa rencontre avec Woody Guthrie, avec qui il fonde le groupe « Les Almanac singers » en 1941, sera décisive.

 

Guthrie, de cinq ans son aîné, était lui aussi un exceptionnel compositeur, aux origines de la « protest song » américaine, et un sympathisant communiste depuis le milieu des années 1930. Il aimait appeler sa guitare « la machine qui tue des fascistes ». Leur collaboration fera des étincelles.

 

Le groupe se fait connaître par ses prestations dans des usines en grève, des manifestations populaires, des réunions syndicales. Le 1er mai 1941, ce sont plusieurs dizaines de milliers de travailleurs en grève qui écoutent leurs chansons Madison Square Garden, à New York.

 

Leurs tubes se font connaître dans tout le pays, ils transmettent un message radical : critique du pouvoir des grands trusts, défense de la classe ouvrière et de la syndicalisation, critique de la ségrégation raciale, pacifisme conscient, anti-fascisme radical.

 

Si le premier album du groupe se caractérise par son rejet de la guerre, ainsi que sa dénonciation du pouvoir des trusts sur la vie politique américaine (« Songs for John Doe »), dans leur album suivant (« Dear Mr.President »), les Almanacs mettent l'accent sur la lutte anti-fasciste, derrière le Pdt.Roosevelt.

 

Leur album « Talking union », reprenant des chansons emblématiques du mouvement ouvrier américain – dont le mythique « Which side are you on ? » des mineurs du Kentucky – connaît un tel succès que le FBI et l'ancêtre de la CIA s'inquiètent du succès de ce « groupe de communistes »par mi la jeunesse populaire, noire ou blanche, américaine.

 

Après la guerre, Seeger dissout le groupe, dans un contexte de chasse aux communistes, pour refonder « les Weavers » (les Tisserands, un hommage … aux mineurs Silésiens de 1844, héros de la résistance ouvrière allemande!), le groupe va connaître un succès encore plus massif.

 

Le succès des « Weavers » passe par le maintien d'un message subversif sous une forme faussement innocente, qui conquiert désormais des foules de plus en plus nombreuses à leurs concerts.

 

Le fameux « If I had a hammer » (Si j'avais un marteau) composé par Seeger semble bien anondin (surtout repris par Claude François) pourtant il s'agit bien d'une chanson contestataire pour qui comprend que le « marteau » doit servir à casser l'injustice de cette société, et qu'il ressemble farouchement à un des deux symboles du mouvement communiste !

 

Menacé par la fièvre anti-communiste des années 1950, le groupe est à nouveau dissous. Seeger continue sa carrière en solo dans les années 1960 et devient le héraut de deux grands mouvements de lutte : celui pour les droits civiques et la lutte contre la guerre du Vietnam.

 

Ses chansons sont à nouveau reprises par des millions. Sa récupération de « We shall overcome » - ré-interprété notamment par Joan Baez ensuite – devient à la fois l'hymne du Mouvement pour les droits civiques et de l'opposition à la guerre.

 


Le compagnon de route : un communiste de cœur

 

L'histoire de Pete Seeger est indissociable de celle du mouvement communiste américain dont il a partagé nombre des combats, tantôt de l'intérieur, tantôt comme compagnon de route, refusant toute sa vie durant de renier son engagement.

 

Seeger aime à rappeler son adhésion à la Jeunesse communiste en 1938, celle ensuite au Parti communiste en 1942.

 

Le premier combat qui le fit vibrer, c'est le soutien aux républicains pendant la guerre civile en Espagne. Avec son groupe « Les Almanac singers », il va même composer en 1943 un best-of des meilleures chansons des Brigades internationales, sous le titre « Songs of the Lincoln Bataillon » (nom de la brigade des volontaires américains).

 

On y trouve des chants anglo-saxons (« There's a valley in Spain called Jarama »), espagnols (« Los cuatro generales ») ou encore allemands (« Le chant des marais », « Einheitsfrontlied »). Une pièce unique !

 

En 1948, il mène un deuxième combat qu'il va perdre, celui pour la candidature à la présidence de Henry Wallace, alternative de gauche au faucon Harry Truman. Par la suite, commence le mouvement McCarthyste qui le mettra en accusation pour « activités anti-américaines ».

 

Tous les combats de Seeger furent ceux qui font la gloire du Parti communiste américain : lutte pour l'organisation des ouvriers, conquête des droits civiques, retrait des troupes américaines du Vietnam (avec son « Bring'em home »!), combat contre la propagande anti-communiste et pro-impérialiste (« Why did you learn at school ? »).

 

Seeger évoqua qu'il « s'était éloigné dans les années 1950 du Parti communiste », les médias ont toujours essayé depuis d'obtenir de lui des aveux de son « erreur », un reniement de son engagement passé ou présent, la réponse de Seeger a toujours été aussi ferme, malicieuse, quasi galiléenne.

 

Sur le passé, Seeger aimait toujours opposer à ceux qui péroraient sur « les crimes du communisme » leur double discours qui occultait les crimes dus aux religions, au colonialisme, à l'impérialisme, plus largement au système capitaliste.

 

Sur le présent, quand on lui demandait s'il était encore communiste, il répondait « qu'il en était depuis l'âge de sept ans, et qu'il était encore communiste » car il voulait « un monde sans millionnaire ».

 


Le maître de la chanson contestataire : Joan Baez, Bob Dylan, Bruce Springsteen, une influence unique

 

L'influence, l'héritage de Pete Seeger furent colossale non seulement sur la société américaine mais aussi dans le champ musical américain.

 

Il suffit de penser au nombre de chansons entrées dans la légende grâce à lui. Que l'on repense au « If I had a hammer » qui devient dans sa reprise de 1963 n°3 au TOP 50 et un des hymnes du Mouvement des droits civiques.

 

Son influence, ce fut aussi sa paternité sur la « protest song » des années 1960 et du « revival folk » de la période. Inspiration de Joan Baez, il faut aussi celui qui dénicha Bob Dylan, les deux invités au Newport Folk Festival sur sa recommandation, marquant le début de leur grande carrière.

 

Parmi les chanteurs contemporains qui ne cessèrent de clamer leur dette envers Seeger, Bruce Springsteen, évidemment. Le « Boss » avait même enregistré en 2006 un album de reprises de chansons écrites par le père du folk américain.

 

Son 90 ème anniversaire avait été fêté devant des dizaines de milliers de fans à Madison Square Garden sous le parrainage de Springsteen qui l'avait alors présenté comme « la mémoire musicale vivante de l'Amérique et sa conscience, un testament du pouvoir de la chanson à faire l'histoire ».

 

Le grand débat sur les liens entre l'art et la politique, Seeger l'avait résolu à sa manière. Toujours du côté des « powerless » (sans pouvoir) contre l'oppression, il s'était fait le compagnon de route des communistes, les seuls à prendre ce parti systématiquement.

 

Quand on lui demandait quel était le pouvoir de la musique dans le champ culturel ou politique, il répondait : « Cela vous donne le sens de l'histoire ».

 

Plus qu'une litanie de mots toujours vains en ces occasions, au nom des damnés de la terre, Pete, un seul suffira cette fois : merci.

 


Quelques chansons emblématiques composées ou reprises par Pete Seeger :

 

What did you learn at school today ? http://www.youtube.com/watch?v=VucczIg98Gw&hd=1 

Tag(s) : #Culture
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