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Le 27 août dernier, à l'Université de Montréal, les anti-émeutes attendaient les étudiants québécois. Déjà après deux jours de rentrée, plusieurs arrestations ont été faites. Sur les médias sociaux, certains étudiants confirment également la tenue de souricières sur le campus. Un journaliste de Radio-Canada, Dominic Brassard, avançait quant à lui sur Twitter que l'accès aux médias sur le campus était refusé.

Après le printemps érable que nous avons vécu au Québec, il n'était pas étonnant de s'attendre à une rentrée scolaire tendue. Après six grandes manifestations nationales rassemblant chaque fois plus de 100 000 personnes, après le tintamarre des casseroles, après l'échec des négociations avec le gouvernement, voilà que les étudiants québécois reviennent en classe en pleine période électorale. En effet, c'est par milliers qu'ils ont refusé, en mars dernier, la hausse des frais de scolarité qui était imposée d'abord à 75% puis à 82%. Malgré la fin du printemps, l'essoufflement de l'été, voilà que quelques surprises attendaient les étudiants en ce jour de rentrée. Le mouvement de grève le plus important de l'histoire du Québec ne semble pas avoir pris fin.

Après la loi 78 devenue la loi 12, aussi surnommée la "loi matraque", après les milliers d'arrestations, après les gaz lacrymogène et les bombes fumigènes, après la menace et les coups de matraque, que reste-t-il de la démocratie québécoise?

Le calme était revenu depuis le début de la campagne électorale. Sans crier gare, Guy Breton, recteur de l'Université de Montréal, a donné une drôle de couleur à la rentrée montréalaise. Une couleur grisâtre, presque noire. Une couleur qui nous rappelle le carré noire porté au moment le plus difficile de la crise sociale qui a terni le printemps québécois.

***

Au Québec, les frustrations se font entendre de partout. Les réactions fusent sur le médias sociaux. Camille Robert, la coporte-parole de la CLASSE, l'une des plus importantes associations étudiantes, s'exprime sur Facebook: "Sérieusement pas envie d'entendre parler de partis politiques, ni d'élections, ni de tweets, ni de plateforme (...) Le problème n'est pas partisan, il est social, systémique. Quand un recteur se permet de faire entrer la police dans une université, c'est la société qui est en crise."

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L'Université de Montréal

Dans son blogue du Journal Voir, Ianik Marcil, économiste québécois, critique sévèrement le geste de Guy Breton, recteur de l'Université de Montréal, d'envoyer les troupes anti-émeutes pour la rentrée estudiantine:

                  "Votre rôle, monsieur le recteur, est d'assurer la liberté d'enseignement. D'apaiser les tensions lorsqu'elles existent. D'aller vers les étudiants et les professeurs grâce auxquels votre autorité vous est accordée, pas de les confronter. Ni d'envoyer des flics armés jusqu'aux dents.Vos gestes sont une honte à tout l'héritage occidental de l'institution à laquelle vous devez tout."

Dans sa diatribe, Ianik Marcil remettait en cause le rôle que prend aujourd'hui l'université.

Les réactions d'ahurissement sont nombreuses. Le sort des étudiants est toujours incertain. Avec le chaos de la rentrée et les signes d'intimidation de la police, les Québécois ont quelque peu de difficulté à croire qu'ils sont bien chez eux.

Blandine Parchemal, étudiante au doctorat en philosophie à l'Université de Montréal, était également présente sur le campus.

Toujours dans les pages du Voir, elle exprime elle aussi un lettre au recteur: "Nous n'aurions pu imaginer que des gardes de sécurité nous filmeraient dans les couloirs, nous montreraient du doigt, nous menaceraient et obligeraient nos professeurs à donner leurs cours et ce, sous peine d'amendes salées."

L'intimidation

N'est-ce pas là de l'intimidation?

Est-ce acceptable dans une société démocratique dans laquelle nous vivons de voir des enjeux de société se régler sous le joug de la présence policière ?

Non, ce n'est pas à coup de menace, de pression et de chantage que la question de l'éducation se règlera. Après l'adoption de la loi matraque, voilà encore un triste événement qui nous laisse croire que nous vivons dans un esquisse d'État policier au Québec.

Pour plusieurs, il semble injuste de croire qu'un problème de société aussi important puisse se régler ainsi sous la couleur de l'intimidation institutionnalisée.

À croire qu'on ne souhaite pas avoir de réel débat de société.

À croire que la marchandisation du savoir est une invention d'énergumènes.

À croire qu'on ne doit pas questionner le rôle de l'université.

À croire que les milliers d'étudiants qui ont manifesté dans les rues le printemps dernier n'avaient pas de légitimité.

À croire que Guy Breton prend les étudiants pour des imbéciles.

C'est du moins l'image méprisante qu'il renvoie lorsqu'il accueille les étudiants de l'Université de Montréal avec des troupes anti-émeutes.

Après les élections?

Les Québécois attendent, en partie, de voir le résultat des élections provinciales du 4 septembre pour mieux évaluer la situation des étudiants. En effet, Jean Charest, chef du Parti libéral du Québec, brigue pour un troisième mandat le poste de premier ministre du Québec.

C'est bien son gouvernement qui a imposé la hausse de 82% des droits de scolarité. Sa rivale ayant le plus de chances de le remplacer, Pauline Marois, chef du Parti québécois, a promis d'abroger la "loi matraque". Elle compte également émettre un moratoire sur la hausse des frais de scolarité jusqu'à la tenue d'un Sommet sur l'éducation supérieure.

Le 4 septembre arrivera bien vite, mais en attendant, nous sommes bien pantois de voir avec quelle maladresse les universités ont décidé d'accueillir les étudiants québécois. Ceux-ci n'ont d'ailleurs pas dit leur dernier mot, car aucun réel débat de société n'a été entamé sur l'avenir des universités, du savoir et de l'éducation des générations québécoises futures.

Léa Clermont-Dion

 

Tag(s) : #Lutte de Classe
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