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Peter Franssen |
En 2008, la Chine a contribué pour 22 pour cent à la croissance économique dans le monde. C’est plus que les États-Unis. Cette année (2009), la Chine prend à son compte la moitié de la croissance de l’économie mondiale. Ces quinze dernières années, ce sont les pays en voie de développement qui ont gagné le plus, dans cette croissance. Avant le déclenchement de la crise financière de 2007-2008, les prix des matières premières avaient augmenté à un rythme rapide parce que la Chine est le premier consommateur mondiale en : aluminium, cuivre, plomb, nickel, étain, minerai de fer, acier, ciment, charbon, céréales, riz, huile de palme, coton et caoutchouc. Ses principaux fournisseurs sont les pays du tiers monde. Cet article est la dernière des cinq parties du dossier "Comment la Chine change le monde".
La Chine est le principal facteur du bouleversement des flux commerciaux dans le monde. De même, l’Inde, le Brésil et l’Afrique du Sud y contribuent. Chacun de ces pays constitue une alternative aux anciens pays coloniaux et, comme on peut s’y attendre, chacun d’entre eux se voit balancer à la tête le reproche d’être « un nouveau pays impérialiste et colonialiste ». Pourtant, c’est en premier lieu la Chine qui, avec la croissance phénoménale de son commerce extérieur, fait régresser le commerce Nord-Sud typique au profit du commerce Sud-Sud. Déjà, en 2004, le commerce avec les pays en voie de développement était pour près de la moitié un commerce Sud-Sud. Chaque année, cette part dans la commerce mondial s’agrandit. Les investissements Sud-Sud croissent rapidement eux aussi Une fois encore, ici, la Chine est le principal facteur. En 2008, la part des pays du Sud dans les investissements mondiaux a été de 43 pour cent. Dans la lutte contre la crise économique et financière, ce ne sont ni les États-Unis ni l’Union européenne qui prennent les devants, mais bien les pays en voie de développement, et surtout la Chine qui, avec une croissance économique probable de 8,3 pour cent en 2009, a contribué à endiguer les conséquences de la crise en tout premier lieu dans le tiers monde. Stephen King, le principal économiste de la banque HSBC, le dit : « Le monde où nous vivons n’est plus dirigé par les États-Unis mais par les marchés en expansion, dont le moteur, cela va de soi, est la Chine. » De ce fait, l’importance du G7 a fortement diminué. Le G7 est le groupe des sept pays les plus riches de la planète. Depuis 1973, régulièrement, ils se sont réunis entre eux pour statuer sur le sort du monde. Ce sont les États-Unis, la Grande-Bretagne, l’Allemagne, le Japon, la France, l’Italie et le Canada. Ensemble, ils représentent une petite minorité de la population mondiale. Au moment où la crise financière battait son plein, le G20 s’est réuni pour la première fois. En font partie : la Chine, l’Afrique du Sud, le Brésil, l’Indonésie, le Mexique… Le G20 représente plus de deux tiers de la population mondiale. Lors de cette rencontre, le président Obama, la chancelière Merkel et le président Sarkozy ont déclaré, en s’adressant aux pays du Sud : « Nous avons besoin de vous pour aborder ensemble les problèmes de la planète. » Bien sûr. À l’issue de la Seonde Guerre mondiale, il aura fallu attendre 65 ans pour que l’Occident l’avoue.
Le chamboulement des objectifs américains Hank Paulson, l’ancien ministre du Commerce et l'ancien président de la banque Goldman Sachs, avait déclaré : « Le gouvernement américain veut que la Chine ait beaucoup à dire dans les décisions du Fonds Monétaire International. Mais nous espérons aussi que la Chine agisse, de ce fait, selon l’esprit et la lettre du FMI. On ne peut exercer des fonctions dirigeantes sans prendre ses responsabilités. » Secundo, les États-Unis espéraient également que l’intégration de la Chine à l’ordre mondial existant allait aboutir à l’abjuration du socialisme. Le professeur Kishore Mahbubani, de Singapour, exprime comme suit les espérances américaines : « La meilleure façon de réformer politiquement la Chine consiste à promouvoir la prospérité et l’intégration internationale. » Ou, pour reprendre les mots de l’ancienne ministre américaine des Affaires étrangères, Condoleezza Rice : « Plus la Chine deviendra entreprenante, plus il y aura de chance de liberté politique. » Tertio, l’intégration de la République populaire ouvrirait le marché chinois aux entreprises américaines. Avec les deux premiers objectifs, les choses se sont moins bien passées. Le monde des entreprises et le monde politique américain reconnaissent que le socialisme chinois ne s’est pas affaibli, mais bel et bien renforcé. L’American Enterprise Institute écrit : En outre, la Chine renforce son secteur d’État au détriment du privé, écrit le magazine Foreign Policy : Le Financial Times constate lui aussi que le capitalisme privé perd du terrain : Quant à l’objectif d’intégrer la Chine afin d’asseoir et consolider l’ordre international sous la direction unique des États-Unis, il suffit de citer Francis Fukyama. Frustré, ce chantre de l’hégémonie américaine écrit : Personne ne peut prédire comment les États-Unis vont en sortir En 2008 et 2009, il y a eu dans les provinces chinoises du Tibet et du Xinjiang des troubles graves fomentés par des individus et des groupes bénéficiant du soutien financier et logistique des États-Unis. L’an dernier, le ministère américain de la Défense a décidé de transférer des troupes et du matériel de la région atlantique vers l’océan Pacifique. La flotte américaine provoque et tente d’intimider la flotte chinoise dans la mer de Chine méridionale. Les forces aériennes américaines envoient des drones (avions sans équipage) pour espionner l’espace aérien chinois. Des commissions d’experts chinois étudient la manière dont la guerre froide contre l’Union soviétique a été lancée et les moyens mis en œuvre par les États-Unis pour finalement démembrer complètement l’Union soviétique. Ce sera nécessaire car les États-Unis vont ressortir tout leur arsenal de la guerre froide pour sauver leur position dans le monde. Car il est un fait établi que l’économie américaine va prendre une raclée, si les États-Unis ne peuvent plus utiliser le tiers monde comme leur terre à profit.
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