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Et si les profs' étaient mieux payés, la sélection serait plus exigente
Le Point
 
Académie de Créteil :
des profs au rabais ?
 
Le succès inattendu de la session supplémentaire de recrutement des professeurs des écoles laisse sceptique : les candidats seront les recalés des autres académies.
Avec plus de 11 600 candidats pour 500 recrutements prévus, la session supplémentaire du concours de professeurs des écoles organisé dans l'académie de Créteil a tout l'air d'une réussite.

Avec plus de 11 600 candidats pour 500 recrutements prévus, la session supplémentaire du concours de professeurs des écoles organisé dans l'académie de Créteil a tout l'air d'une réussite. © AFP PHOTO / PHILIPPE DESMAZES

 

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Postes vacants, professeurs non remplacés, recours à des centaines de contractuels pour pallier le manque d'enseignants : lorsque la ministre Najat Vallaud-Belkacem s'est rendue en novembre dans une école de Bondy, elle ne pouvait que reconnaître les besoins "singuliers" de l'académie de Créteil, qui regroupe les départements de Seine-et-Marne, Val-de-Marne et Seine-Saint-Denis.

L'académie avait même défrayé la chronique en recrutant des professeurs sans concours via l'ANPE. Pour pallier la pénurie de professeurs des écoles dans ces départements où ils faisaient le plus défaut, la ministre avait annoncé neuf mesures.

Avec l'une d'elles, le ministère de l'Éducation nationale jouait son va-tout.

Coup de bluff ou coup de folie, l'idée - sur le papier - était simple : déroger à la sacro-sainte règle qui stipule que dans le premier degré, le concours est organisé une unique fois par an, et que le recrutement se fait à l'échelon académique. En permettant ainsi à des candidats recalés dans une autre académie d'avoir une seconde chance dans cette académie que tous abhorrent (y obtenir le concours implique d'y enseigner... et donc de s'y installer), tout le monde en sortirait gagnant : les profs qui embrassaient enfin la carrière qu'ils voulaient, et l'académie qui pouvait recruter plus aisément.

Avec plus de 11 600 candidats pour 500 recrutements prévus, soit 23 aspirants-enseignants par poste, cette session supplémentaire du concours de professeurs des écoles organisé dans l'académie de Créteil a tout l'air d'une réussite. L'an dernier, la moyenne nationale pour l'ensemble des académies était de huit candidats pour un poste, et seulement quatre candidats en Seine-Saint-Denis.

L'académie honnie serait-elle devenue l'académie chérie ?

Un concours plus facile à obtenir

Rien n'est moins sûr. Certes, le ministère se défend d'avoir mis en place un "concours au rabais", arguant à juste titre de ce que dans d'autres académies très prisées, comme Rennes ou Bordeaux, la sélection est plus rude : de bons candidats seraient ainsi laissés sur le carreau, alors même qu'ils seraient au niveau pour enseigner. C'est justement ce genre de profils que le ministère souhaiterait récupérer pour l'académie de Créteil. 

"L'objectif est de desserrer la règle du concours académique unique, qui conduit chaque année à passer à côté de très bons candidats qui n'ont pas été retenus parce qu'ils ont passé le concours dans une académie très sélective, alors qu'ils auraient été bienvenus dans une autre académie. (...) Le taux de sélectivité de ce nouveau concours assurera un recrutement de grande qualité d'enseignants titulaires pour des écoles de l'académie de Créteil", s'est réjoui le ministère dans un communiqué.

D'autant que d'ordinaire, le concours est bien plus facile à obtenir dans cette académie qu'ailleurs en France, puisqu'il y a moins de candidats par postes : l'année dernière, près de sept candidats sur dix qui se sont présentés au concours ont été reçus, avec un seuil d'admissibilité en dessous de 5/20.

Crise des vocations

Mais il semble cependant plausible que la réalité ne soit pas si reluisante qu'elle n'en a l'air. Il est vraisemblable que ne seront recrutés dans cette session exceptionnelle que des candidats ayant échoué à la session classique de leur académie. Le nombre de candidats sera ainsi sans aucun doute à revoir à la baisse après la salve de résultats des sessions ordinaires, rendant ce concours supplémentaire bien moins sélectif qu'il n'y paraît.

Reviendra alors sans doute la rumeur selon laquelle ces professeurs seraient moins bons que les autres. Qu'au fil des mutations, ils se retrouveront disséminés dans toute la France, faisant baisser le niveau général des enseignants, et donc de l'Éducation nationale ! Mais ce débat ne fera que masquer le problème majeur auquel aucun ministre ne semble pouvoir remédier : la crise des vocations chez les bons étudiants.

Tag(s) : #Education nationale
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