Les manifestants ont bloqué la circulation sur le rond-point de Family Village. L’électricité a été coupée moins d’une heure dans la zone commerciale. - Photo Thomas Jouhannaud
Électricité coupée à Family Village. Circulation bloquée sur la rocade nord de Limoges. Avant la manifestation nationale de mardi, les opposants à la loi Travail ont encore mené des opérations coup-de-poing, ce jeudi.
« Toute la zone a été coupée. On veut faire monter la pression, y compris sur le MEDEF. Ce n’est pas la CGT qui fait la loi, mais ce ne sont pas les patrons non plus. » Responsable de la CGT Mines et énergie, Laurent Monteil ne cache pas son envie de voir la mobilisation anti-loi Travail monter en tension. Ce jeudi 9 juin, son syndicat a pourtant fait l’inverse et couper le courant dans la zone commerciale de Family Village, au nord de Limoges. « Une coupure symbolique », assure le cégétiste.
Quatre clients ont été touchés, autour de 11h30, précise Jean-Luc Gauthier, directeur régional d’Enedis (ex-ERDF). La durée de coupure a été inférieure à une heure. On a tout fait pour que la remise en tension se fasse le plus rapidement possible. » « Au mépris de toutes les règles de sécurité », avance Laurent Monteil. « Faux, rétorque la direction, Les procédures d’exploitation ont été respectées à la lettre. Je tiens également à dire que nous condamnons toutes les coupures intempestives. » Il pourrait pourtant y en avoir d’autres. « Des actions plus fortes et qui dure plus longtemps », prévient le syndicaliste.
La coupure de courant s’est déroulée en marge du blocage du rond-point qui scelle l’accès à Family Village. Entre 150 et 200 personnes, de la CGT, FO et FSU, étaient présentes. Mais l’impact est resté limité, la police ayant dévié la circulation en amont, à Couzeix et Grossereix. À partir de 11 heures et jusqu’en début d’après-midi, Bruno Grimaux (FO) et une cinquantaine de salariés de la métallurgie, à Bessines, ont également bloqué ce point névralgique du trafic limougeaud, où se déverse la circulation de l’A 20. « C’était chaud, une ou deux voitures nous ont foncé dessus », raconte le syndicaliste, qui ne décolère pas contre la loi El Khomri. « Les sénateurs veulent arrêter les 35 heures, mais qu’ils viennent les faire en usine. Je les fais avec eux. Et la semaine d’après, on fera 48 heures, on verra s’ils en sont capables. »
Au final, la journée d’action ce ce jeudi est symbolique d’une mobilisation, qui semble sur courant alternatif. « On n’est pas comme en 2003 ou en 2006, analyse Arnaud Raffier, représentant CGT. Mais il y a toujours du monde et les salariés se relaient. C’est ça qui est intéressant. » « Si la mobilisation est fluctuante, le mécontentement, lui, est toujours là, prévient Arnaud Zerbib, représentant FO Cheminots. On ne lâchera pas. » Depuis neuf jours, les agents SNCF sont en grève et FO et CGT ont reconduit le mouvement, hier. « Nos revendications, c’est d’avoir des éléments de haut niveau dans l’accord de branche et pas dans l’accord d’entreprise, comme le veut le gouvernement, explique Benoît Lematelot, de la CGT Cheminots. Sans ça, la SNCF va faire du dumping social et c’est notre mort assurée dans deux-trois ans. Et encore plus avec la loi Travail. »
La manifestation à Paris « bien enclenchée »
Un nouveau pic de tension se prépare pour la semaine prochaine, avec la manifestation nationale à Paris. Une dizaine de cars et « pas loin de 500 personnes », selon la CGT, feront le déplacement au départ de Limoges. « C’est bien enclenché », estime Arnaud Raffier. Les représentants syndicaux d’entreprises locales se mobilisent. « Avec une dizaine de personnes, on monte à Paris, explique Édouard Cabirol, représentant CGT chez Madrange. La mobilisation ne s’essouffle pas. On se garde juste quelques points forts, comme le 14. »
Au sein de l’entreprise de charcuterie, les discussions salariales sont tendues et la troisième réunion obligatoire pour les négociations salariales, le 16 juin, pourrait également constituer une nouvelle acmé dans un printemps social, déjà chargé. « Avec la loi Fillon, les patrons ne veulent plus que les salaires dépassent 1,6 SMIC, pour bénéficier des exonérations, explique le cégétiste. Les grands groupes en profitent et ça met à mal la politique salariale. Et avec la loi El Khomri, ça serait pire. » Là, se trouve peut-être le terreau de la fronde anti-loi Travail : le mécontentement après des années passées à se serrer la ceinture. « Qu’on ne nous dise pas que l’on gagne trop, conclut Bruno Grimaux. Quand on gagne des mille et des cents, c’est une insulte de dire ça à des gens au SMIC. »