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C'est une nouvelle révélation dont se serait bien passée François Fillon. L'"ami" qui a offert en février ses deux costumes d'un montant total de 13.000 euros n'est autre que le sulfureux avocat franco-libanais, Robert Bourgi. Une information, révélée par Le Monde, et confirmée vendredi 17 mars de source judiciaire. L'intéressé avait jusque-là nié être le généreux donateur.
Reste que ce nouveau pavé dans la mare, dans la désormais tentaculaire affaire Fillon, porte un sévère coup au candidat de la droite et du centre à la présidentielle. Ancien conseiller de l'ombre de Jacques Chirac, Dominique de Villepin et Nicolas Sarkozy, Robert Bourgi est en effet l'un des piliers les plus controversés des réseaux de la "Françafrique".
Antoine Glaser, le journaliste spécialiste du continent africain, le résume à grands traits comme la personnalité du "dispositif gaulliste qui faisait voter comme un seul homme les communautés françaises d'Afrique pour Jacques Chirac"
Intermédiaire de la Françafrique
Né en 1945 au Sénégal dans une famille libanaise, ce très discret avocat et intermédiaire entre la France et de nombreux chefs d'Etats africains, crée la polémique en 2011 en affirmant dans les colonnes du Journal du Dimanche, avoir transporté, pour le compte de plusieurs dignitaires africains -Omar Bongo (Gabon), Denis Sassou Nguesso (Congo), Obiang Nguéma (Guinée Equatoriale)...- des valises de billets d'un montant de 20 millions de dollars à destination de Jacques Chirac et Dominique de Villepin.
Plus tard, il accuse également Jean-Marie Le Pen d'avoir reçu des fonds occultes de dirigeants africains pour financer sa campagne de 1988 -information alors niée par l'ex-leader du Front national mais confirmée par l'un de ses conseillers de l'époque.
En plein scandale des "biens mal acquis", basée sur le détournement présumé de fonds publics de dignitaires africains notamment pour l'achat de logements de luxe en France, ces révélations sont alors prises très au sérieux par le Parquet de Paris qui se saisit de l'affaire. Des faits et affirmations qui avaient coûté à l'époque à l'avocat franco-libanais une suspension d'activité de deux ans, dont six mois ferme, par le barreau de Paris. "La formation de jugement n°1 a été saisie à la suite de poursuites contre un avocat auquel il était reproché d'avoir laissé entendre, en qualité d'avocat, dans plusieurs médias, qu'il aurait servi d'intermédiaire pour le compte de tiers dans le cadre de transferts de fonds, destinés à des financements politique, appartenant à ses clients qui le rémunéraient au moyen de paiements forfaitaires", indiquait la décision.
Autant de faits constitutifs de manquements à l'honneur, aux principes d'indépendance, d'absence de conflit d'intérêt, de non respect du secret professionnel... N'en jetez plus.
L'"amitié" de Robert Bourgi et François Fillon n'est pas nouvelle. Dès 2012, il lui avait ouvert son carnet d'adresses très étoffé. "En novembre 2013, il avait notamment contribué à l'organisation de son voyage au Sénégal, puis en Côte d'Ivoire, où il entretient les meilleures relations. M. Bourgi avait aussi tenté, en vain, de réconcilier MM. Fillon et Sarkozy", rapporte notamment Le Monde.
La révélation de cette amitié précieuse avec l'avocat franco-libanais tombe d'autant plus mal pour François Fillon, après les indiscrétions de Mediapart sur le client libanais de la société de conseil de François Fillon 2F Conseil. Si l'ancien Premier ministre affirmait il y a encore quelques jours sur Europe1 que ces cadeaux n'avaient "rien à voir" avec la politique, ces derniers éclairages viennent à nouveaux mettre à mal la défense du candidat qui avait pourtant fait de la probité et de l'intégrité le fer de lance de sa stratégie électorale.