La famille Reimann, l'une des plus riches d'Allemagne, à la tête d'une entreprise possédant notamment les produits anticalcaire Calgon ou la chaîne de restauration rapide Prêt à manger, a reconnu dimanche avoir eu des liens avec le régime d'Adolf Hitler. La famille a décidé de faire un don de 10 millions d'euros après avoir appris le rôle de certains de ses aïeux pour soutenir la montée au pouvoir d'Hitler dans les années 1930 et avoir eu recours au travail forcé pendant la Seconde guerre mondiale, a affirmé le porte-parole de la famille, Peter Harf, au journal Bild am Sonntag . «Reimann senior et Reimann junior étaient coupables. Les deux entrepreneurs sont morts mais leur place serait en prison», a estimé Peter Harf. Albert Reimann senior est mort en 1954, son fils en 1984.
Albert Reimann senoir était un donateur d'Adolf Hitler dès 1931, deux ans avant qu'il accède au pouvoir, selon Bild am Sonntag, qui s'appuie sur des lettres et documents d'archives. Sa société, qui fournissait la Wehrmacht et l'industrie de l'armement, avait été estampillée «essentielle» pour l'effort de guerre en 1941. En 1943, elle avait recours à 175 travailleurs forcés et employait un contremaître connu pour maltraiter les employés. Il n'y a jamais eu aucune compensation accordée à ces travailleurs forcés, a affirmé Peter Harf. «Mais nous examinons ce que nous pouvons faire maintenant», «nous voulons faire plus et donner dix millions d'euros à une organisation appropriée», a-t-il annoncé. La plupart des grandes entreprises allemandes ont entretenu des liens avec le Troisième Reich. Le constructeur automobile Volkswagen avait notamment eu recours à de la main d'oeuvre provenant des camps de concentration et des camps de prisonniers de guerre.
raconte :
Le 20 février 1933, un mois avant les élections générales, une réunion secrète se tient à Berlin autour d'Hermann Goering et du nouveau chancelier allemand Adolf Hitler. Elle réunit "le nirvana de l'industrie et de la finance". "Ils étaient vingt-quatre, près des arbres morts de la rive, vingt-quatre pardessus noirs, marron ou cognac, vingt-quatre paires d'épaules rembourrées de laine, vingt-quatre costumes trois pièces, et le même nombre de pantalons à pinces avec un large ourlet", raconte Éric Vuillard.
Parmi ces vingt-quatre, Gustav Krupp, Wilhelm von Opel, le patron de Siemens, d'IG Farben... Avec Éric Vuillard, nous sommes dans ce salon à Berlin et aujourd'hui, en 2017. "A présent, Opel est bien plus vieille que de nombreux États, plus vieille que le Liban, plus vieille que l'Allemagne même...", écrit-il. Ces industriels vont donner aux nazis tout l'argent qu'ils réclament pour les élections. Si les nazis l'emportent "ces élections seront les dernières pour les dix prochaines années et même pour cent ans", dit Goering dans un éclat de rire sans provoquer l'effroi.
Le nazisme s'effondrera mais, rappelle Vuillard, BASF, Bayer, Agfa, Opel, IG Farben, Siemens, Allianz, Telefunken "sont là, parmi nous, entre nous". "Tous survivront au régime et financeront à l'avenir bien des partis à proportion de leur performance".
Aujourd'hui encore, "notre quotidien est le leur. Ils nous soignent, nous vêtent, nous éclairent (...) Ces noms existent encore. Leurs fortunes sont immenses".
Et "Le Monde Diplomatique" conclut :
Le patronat allemand, notamment celui de l’industrie lourde, est à l’avant-garde d’une opposition « nationale » contre le Parlement et les syndicats. Le Parti nazi sera son allié privilégié. Le 11 octobre 1931, il constitue avec lui une plate-forme – le Front de Harzbourg – qui réclame un gouvernement dirigé par un « homme fort », sous-entendu Hitler, afin d’extirper de l’Allemagne « le chaos du bolchevisme ».
Au lendemain de l’accession de Hitler à la chancellerie, Gustav Krupp lui exprime son soutien au nom de la Confédération de l’industrie qu’il préside.
Les industriels, indique-t-il, ne peuvent que « coopérer » avec un gouvernement qui prend à cœur le « bien-être du peuple allemand ».