La municipalité d’Auby a ce dimanche matin, dans la cour d’honneur de la mairie, rendu un hommage à un fait de résistance qui tend à être oublié régionalement, ne serait-ce par la simple disparition de la profession qui l’a initiée. Durant quinze jours, du 27 mai au 10 juin 1941, 100 000 mineurs du Nord et du Pas-de-Calais, sur 141 000, se mettent progressivement en grève pour lutter contre la dégradation de leurs conditions de travail imposé par le commandement allemand.
Les médias français célèbrent la répression de Tien Amen en Chine , mais ne commémorent jamais la résistance ouvrière en France face à l'Occupant allemand
SOURCE : Ufac Bagnolet
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Fermées durant les opérations, les mines rouvrent dès le 15 juin 1940 et retrouvent une activité normale en septembre. L'occupant décide alors de supprimer les pauses, d'allonger les journées de travail et de geler les salaires afin d'accroître les rendements.
La situation des familles de mineurs est d'autant plus difficile que les problèmes de ravitaillement se font ressentir. L'apparition des cartes de rationnement et du marché noir en atteste. Dans les mines le mécontentement s'accroît. Les mineurs entament des grèves partielles répétées qui entraînent une baisse notable de la production.
Le 1er Janvier 1941, une orfonnance militaire allemande durcit davantage les conditions de travail des mineurs. Les responsables communistes tirent profit du mécontentement suscité par cette décision. Dès le 2 janvier 1941, ils commencent une série de grèves perlées. La contestation se propage dans une quinzaine de puits du bassin minier. Après l'arrestation d'une centaine de mineurs, le soulèvement s'arrête. Mais après une nouvelle grève en mars, les Allemands sont occuper les puits par leurs troupes.
C'est dans ce climat tendu que les instances communistes, épaulées par les comités d'union syndicale et d'action, s'entendent pour organiser un grand mouvement de protestation. Il ne manque plus qu'un élément déclencheur: la décision des compagnies minières de payer les ouvriers par équipes et non plus individuellement, ce qui entraîne le risque d'une perte de salaire.
Parti de la fosse n° 7 de Dourges au puits dit "le Dahomey", le mouvement s'étend à l'ensemble du bassin minier. Le 27 mai, lorsque les contremaîtres imposent le salaire par équipes, celles-ci se mettent en grève. Les mineurs réclament des augmentations de salaire, de meilleures conditions de travail et une amélioration du ravitaillement.
En cinq jours, c'est la grève générale. Le mouvement provoque l'arrêt des industries annexes (cokeries, centrales électriques et textiles). Les femmes participent activement à ce conflit. Elles bloquent l'accès aux puits et exhortent les hommes à la grève. Elles manifestent devant les bureaux des compagnies et établissent des barrages routiers.
Néanmoins, la repression et la faim entament la détermination des grévistes. Après deux semaines de grève, le mouvement s'essouffle. Il prend fin définitivement le 10 juin 1941.
Les autorités d'occupation répriment sévèrement la grève. Les lieux publics sont fermés, des affiches placardées annoncent la condamnation des grévistes et incitent les mineurs à reprendre le travail. Les cartes de ravitaillement ne sont plus distribuées et les salaires suspendus. (voir les reproductions ci-dessous)
Le bilan est lourd: plusieurs centaines de personnes sont arrêtées. En juillet 1941, près de 300 mineurs sont déportés en Allemagne. D'autres seront fusillés comme otages au cours de cette même année. Ceux qui échappent à l'arrestation choisissent de passer dans la clandestinité.
La grève, qui au départ, apparaissait comme une lutte sociale et une atteinte à l'économie de guerre allemande a pris une dimension patriotique, s'inscrivant comme un acte de résistance face à l'ennemi. Malgré la répression, les Allemands acceptent in fine les revendications les plus importantes des mineurs.
Un service spécial pour le ravitaillement est créé, distribuant nourriture et vêtements de travail. Une hausse générale des salaires est également obtenue. Cette grève a fait perdre 500 000 tonnes de charbon à la machine de guerre allemande.
Sébastien Le Coz / Les Chemins de la Mémoire / 216 /06_11
Origines des documents: Archives de la région Nord-Pas-deCalais et Musée de la Résistance Nationale de Champigny (94