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Le renard et les raisins

Certain Renard Gascon, d'autres disent Normand,
Mourant presque de faim, vit au haut d'une treille
Des raisins mûrs apparemment,
Et couverts d'une peau vermeille.
Le galant en eût fait volontiers un repas ;
Mais comme il n'y pouvait atteindre :
"Ils sont trop verts, dit-il, et bons pour des goujats. "
Fit-il pas mieux que de se plaindre ?

Cette fable est la plus courte écrite par La Fontaine. Dans une perspective psychanalytique elle illustre le déni comme réaction aux frustrations douloureuses issues des conflits entre nécessité, besoin ou désir, et de l'incapacité à les satisfaire. Prise sous l'angle de la psychologie sociale elle illustre la réduction de la dissonnance cognitive par le changement de locus de contrôle ; le renard fini par se convaincre qu'il ne mange pas les raisins non parce qu'ils sont hors de sa portée mais parce qu'ils sont trop verts.

Philippe Martinez semble, lui,  trouver à son goût les raisins verts....

 

L'Opinion

La CGT met du vert dans son rouge

 

 

Né le 8 janvier 2020, Plus jamais ça ! , dont la CGT est membre, réunit ses comités locaux à la fin du mois. Dans une lettre datée du 19 mars, la fédération des cheminots proteste contre cette démarche de sa confédération.

 

Lancé le 5 mars 2919, le Pacte du pouvoir vivre, autour de la CFDT, présentera une actualisation de ses 66 propositions à la rentrée de septembre. D’ici là, ses groupes locaux soumettront des idées aux candidats aux élections régionales et départementales.

Syndicat de l’atome et de l’acier, la CGT est-elle en train de changer ? Il y a un an, Philippe Martinez, son secrétaire général, a scellé une alliance avec une vingtaine d’organisations syndicales et associatives pour répondre à l’urgence climatique et sociale. Le voilà embarqué dans un mouvement dont certains membres prônent la sortie du nucléaire. Cette cohabitation n’est pas sans poser des problèmes internes. Elle révèle aussi le besoin des syndicats de mener des combats politiques en s’accolant à des thèmes porteurs. L’écologie en est un.

Le 8 janvier 2020, huit organisations signent un appel pour la justice sociale et le climat dans Le Journal du dimanche. Parmi elles, Attac, les Amis de la terre, Oxfam, la CGT, la Confédération paysanne, etc. Elles sont rejointes par d’autres et le premier confinement forge leur indignation commune et le nom de leur initiative : Plus jamais ça ! Si le pangolin est devenu le meilleur ennemi de l’homme, c’est que quelque chose ne tourne plus rond sur notre planète.

« Climaticides ». Le 27 mars, le mouvement dresse son réquisitoire et fournit sa réponse en forme de 34 propositions. Elles marient l’agenda classique de la gauche de la gauche en matière sociale (hausse des salaires, semaine de 32 heures, droit garanti aux revenus, lutte contre la fraude fiscale) avec sa déclinaison écologique (une loi pour soumettre les entreprises à l’Accord de Paris, l’interdiction des dividendes « climaticides », l’arrêt du soutien public aux acteurs polluants, l’arrêt de tous les accords de commerce et d’investissement, etc.)

« Notre regroupement, qui débute à l’automne 2019, fait le pari que l’on peut faire des choses ensemble sans mettre les désaccords sous le tapis, mais sans qu’ils soient bloquants, explique Marie Buisson, membre de la Commission exécutive confédérale de la CGT et pilote de son collectif environnement. Nous voulions mener une action par mois, mais en raison de la crise sanitaire, nous en avons réalisé trois. »

La plus emblématique est le combat pour la Chapelle Darblay, dont l’usine de Seine-Maritime est menacée de fermeture définitive : un cas d’école où le sauvetage de l’emploi rencontre la vertu environnementale, le site produisant du papier journal 100 % recyclé. Parmi ses prochaines activités, Plus jamais ça ! publiera, d’ici au 9 mai, un rapport pour dire comment concilier emploi et transition écologique ; les 28 et 29 mai, il réunit, en visioconférence, sa trentaine de collectifs départementaux.

Cette stratégie de la CGT a beau caresser l’air du temps, elle est contestée en interne. « Le problème est qu’elle est arrivée de nulle part, note l’un de ses opposants. Il n’y a pas eu de débats sur la pertinence d’aller dans ce sens. »

En première ligne dans ce combat, les fédérations du monde de l’industrie, comme la chimie, l’énergie et surtout les cheminots. Son secrétaire général Laurent Brun – crédité de l’ambition de succéder à Philippe Martinez – a écrit au bureau confédéral (organe exécutif de la CGT), le 19 mars, pour protester contre « la création de collectifs locaux en dehors de nos structures statutaires ».

La fédération des cheminots voit dans cette démarche la création d’une nouvelle entité hors la CGT, qui noue des partenariats avec des organisations qui font du « lobbying », sans « base sociale ». Aux yeux des cheminots, le fond ne vaut pas mieux que la forme. « La création de collectifs locaux est encore plus fourre-tout puisque nous y retrouvons des associations antinucléaires (Tchernoblaye, Halte au nucléaire Gard, Sortir du nucléaire, etc.), Stop Linky/5G, collectifs gilets jaunes, parti occitan… », écrivent-ils.

« Il est normal qu’il y ait un débat autour de ces sujets, répond Marie Buisson, mais Plus jamais ça ! fonctionne au consensus : il n’a pas de position sur le nucléaire parce que tous ses participants n’ont pas le même avis. Cela ne change pas ce qu’est la CGT. » Ces questions ont beau être « normales », elles sont aussi un écho de la vie interne de la confédération : le pouvoir de Philippe Martinez est à la fois solitaire et contesté.

Pourtant la nébuleuse syndicale contestataire, avec la CGT, épouse la même démarche que la constellation réformatrice, autour de la CFDT. Celle-ci a ouvert la voie, puisque son Pacte du pouvoir de vivre est vieux de deux ans. Les 19 associations des débuts sont devenues 64. « Nous travaillons à préciser et actualiser nos 66 propositions pour les présenter à la rentrée, dit Christophe Dague, secrétaire confédéral à la CFDT et responsable du Pacte du pouvoir de vivre. D’ici là, nos groupes locaux vont décliner des idées à l’intention des candidats aux élections régionales et départementales, à partir de la fin de mai. » Jusqu’à présent le mouvement était concentré sur les militants des organisations qui le constituent. Désormais, il veut populariser son action auprès du grand public.

La CGT, elle aussi, veut sortir de l’isolement. « Elle se vivait comme détentrice du monopole du discours sur la transformation sociale, elle a compris qu’elle devait chercher des alliés en dehors du camp syndical, analyse Stéphane Sirot, historien, spécialiste du syndicalisme. Le syndicalisme ne peut pas se dispenser d’intervenir dans le champ politique, vu l’importance des enjeux, numériques, écologiques, et l’affaiblissement des partis de gauche. »

Passerelles. Entre les deux mouvements, des passerelles existent. Arnaud Schwartz est l’une d’entre elles. Le président de France Nature Environnement est à la fois membre du Pacte du pouvoir de vivre et de Plus jamais ça !.

« Dans les deux collectifs, on peut discuter de manière conflictuelle, dit-il. Nous, nous voulons sortir du nucléaire, pas les deux syndicats [CGT et CFDT]. J’ai déjà eu des discussions avec Philippe Martinez sur le sujet. La conscience des individus progresse, y compris au sein des syndicats. »

Des rencontres ont eu lieu entre dirigeants des deux structures. « En octobre 2020, huit de nos organisations (dont la CFDT, l’UNSA, le Secours catholique, la Fondation Abbé Pierre…) ont échangé avec la CGT, les Amis de la terre, Greenpeace, la FSU, Attac, etc. sur nos activités respectives », rapporte Christophe Dague. Mais pas de programme commun en vue.

Les propositions du Pacte ont une coloration plutôt « gauche réformiste » et ses tenants insistent davantage sur la méthode, la participation de la société civile à la définition des politiques. Toutefois, un sujet pourrait les unir : la perspective d’une arrivée au pouvoir de l’extrême droite.

Le 14 avril, lors d’une réunion plénière du Pacte, Arnaud Schwartz a lancé l’idée de « faire quelque chose ensemble ». Trop tôt pour dire si elle fera son chemin

Tag(s) : #CGT
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