La chaîne LCP a offert, au soir du 4 août,
un document d'un grand intérêt politique,
au-delà de la chronique historique. Le film, à partir d'actualités d'époque, retrace le chemin qui nous mène de l'idée de nation et de souveraineté française, que Georges Pompidou valorise toujours après Charles de Gaulle, au libéralisme "no border", que le capital financier et mondialisé impose, dès 1983, à la France avec François Mitterrand qui ouvre le bal.
Tous les présidents qui suivront - jusqu'à Emmanuel Macron - accentueront le mouvement.
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Dans les années 50 et 60, deux forces politiques occupent des positions dominantes dans la vie française : le communisme et le gaullisme. L'un et l'autre défendent l'indépendance nationale face à un centre qui gouverne, regroupant la SFIO et la droite, déjà tournées vers la construction européenne.
Avec le retour au pouvoir du général de Gaulle, en juin 1958, et pendant dix ans, l'indépendance de la France est au coeur de la politique élyséenne.
Les événements de mai 68 marque le début de sa mise en cause avec le mouvement étudiant. C'est l'époque où, aux USA, se développe, avec Milton Friedman, l'ultralibéralisme qui oppose le marché ouvert et sans limites à l'interventionnisme de l'état. C'est l'individu et non la collectivité qui doit être au centre de l'activité humaine. Les assemblées étudiantes de la Sorbonne ne prônent pas autre chose, même habillées de drapeaux rouge et noir et de portraits de Lénine...
Valéry Giscard d'Estaing le ministre des Finances des toutes dernières années de Gaulle, va incarner les idées libérales et la proximité avec les Etats-Unis au sein du gouvernement. Ce qui montre déjà la pénétration des idées qui correspondent à la mutation du grand capital, qui d'hexagonal devient lui aussi "sans frontières".
La suite du film nous montre les chemins de traverse et les chausses-trappes qui vont fissurer de l'intérieur le monde gaulliste, avec dans les premiers rôles , d'abord Chaban-Delmas et sa "nouvelle société", ensuite Jacques Chirac (qui fera élire le très libéral Giscard d'Estaing en 1974), et qui trahira successivement tous ses amis pour devenir président de la République en 1995.
Quand au monde communiste, il croit avec Georges Marchais, que l'alliance avec le Parti socialiste, vampirisé par François Mitterrand en 1971, permettra à la France de connaître un régime de progrès social avancé à partir d'un "programme commun" de gouvernement où le PCF s'épanouirait...
Las, Mitterrand veut, lui par cette entente, se faire élire et réduire l'influence communiste à 15%. Ce qu'il promet à ses amis socialistes européens. Mais des difficultés enflent entre les deux partis. Le refus du PS de nationaliser la sidérurgie en violente crise - ses usines lorraines ferment les unes après les autres - montre les limites d'un éventuel gouvernement commun.
Et en 1981, François Mitterrand à la présidence - avec un PC à 16% - va imposer, dès 1983, la politique de "rigueur".
La messe est dite.
C'est la rupture en 1984 entre communistes et socialistes.
De son côtés, le mouvement gaulliste n'est plus que l'ombre de lui-même.
Le film décrit à sa façon la décrue du PCF, nourrie de déception populaire, face à une stratégie électorale perdante et aux changements de cap de Marchais à l'égard de l'Union soviétique, alors que depuis la fin des années 70, la campagne se déchaîne en France contre le "stalinisme", en fait contre l'URSS et le communisme.
Le champ est libre pour le totalitarisme libéral, qui va submerger la France.
On en mesure les effets aujourd'hui.
Jean LEVY