Cette image, extraite d’une séquence vidéo publiée le 29 mars 2022 par la présidence turque, montre l’oligarque russe Roman Abramovitch (2e rang au centre) lors des premiers entretiens en tête-à-tête entre la Russie et l’Ukraine depuis des semaines au palais de Dolmabahce, à Istanbul.
Les pourparlers entre la Russie et l’Ukraine, mardi 29 mars, à Istanbul, ont été « substantiels » et pourraient donner lieu à une rencontre entre le président russe, Vladimir Poutine, et le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, pour mettre fin au conflit qui a débuté il y a plus d’un mois, ont estimé les négociateurs des deux camps après trois heures de discussions.
Les progrès dans les négociations pourraient avoir des implications militaires sur la nature de l’offensive russe en Ukraine. A l’issue de la session de mardi, le vice-ministre de la défense russe, Alexandre Fomine, a annoncé que Moscou entendait « réduire radicalement [son] activité militaire en direction de Kiev et Tchernihiv ». Présent à Istanbul, il a évoqué une décision prise « pour accroître la confiance », au moment où « les négociations au sujet d’un accord sur la neutralité et le statut non nucléaire de l’Ukraine [entrent] dans une dimension pratique ». Vendredi, Moscou avait déjà annoncé son intention de concentrer ses efforts sur la « libération du Donbass ».
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Après l’annonce de ces avancées qui semblent marquer un tournant dans les discussions entre Kiev et Moscou, les Etats-Unis ont fait part de leurs doutes, par la voix de leur secrétaire d’Etat, Antony Blinken. « Je n’ai rien vu qui puisse suggérer qu’il y a un véritable mouvement parce que nous n’avons pas vu de signes de réel sérieux de la part de la Russie », a-t-il déclaré, en visite au Maroc, lors d’une conférence de presse.
Les annonces de mardi font suite à ce que le chef de la délégation russe et représentant du Kremlin, Vladimir Medinski, a qualifié de propositions « claires » de l’Ukraine. Selon lui, Kiev s’engagerait à une neutralité sous réserve d’avoir des puissances étrangères garantissant sa sécuritéa neutralité revient pour Kiev à renoncer à intégrer l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), qui constituait une ligne rouge pour Moscou. L’Ukraine accepterait aussi de ne pas accueillir de bases militaires étrangères et d’adopter un statut « non nucléaire », mais demanderait en retour que des Etats occidentaux garantissent sa sécurité.
Le négociateur en chef ukrainien, David Arakhamia a précisé que Kiev réclamait un « accord international » signé par plusieurs pays garants qui « agiront de façon conforme à l’article 5 de l’OTAN et même de façon plus ferme ». L’article 5 du traité de l’Alliance atlantique dispose qu’une attaque contre l’un de ses membres est une attaque contre tous. M. Arakhamia a cité, parmi les pays que l’Ukraine voudrait avoir comme garants, les Etats-Unis, la Chine, la France et la Grande-Bretagne – membres permanents du Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies (ONU) – ainsi que la Turquie, l’Allemagne, la Pologne et Israël.
Kiev propose que ces garanties ne couvrent pas dans l’immédiat la Crimée, annexée par la Russie en 2014, ni les territoires sous contrôle de séparatistes prorusses depuis 2014. Ces différends devront faire l’objet de négociations séparées. Pour résoudre la question spécifique de la Crimée, annexée par la Russie en 2014, Kiev propose « quinze ans » de pourparlers russo-ukrainiens séparés, selon un autre négociateur ukrainien, Mykhaïlo Podoliak.
Selon le négociateur russe, Kiev veut que Moscou s’engage à ne pas s’opposer à une adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne.
Le ministre des affaires étrangères turc, Mevlüt Çavusoglu, a salué les « progrès les plus significatifs » depuis le début de la guerre, précisant que les pourparlers ne reprendraient pas mercredi. « Désormais, il reviendra aux ministres des affaires étrangères des deux pays de se réunir pour résoudre les questions les plus difficiles », a-t-il ajouté, au terme des discussions entre les délégations russe et ukrainienne. Selon les médias turcs, les chefs des deux délégations se sont retrouvés en tête-à-tête en marge des discussions.
M. Medinski a qualifié l’approche ukrainienne de « constructive » et expliqué que la Russie lui « donnerait une réponse ». Selon lui, un éventuel accord serait signé par les chefs des diplomaties des deux pays, en présence de MM. Poutine et Zelensky. De son côté, M. Arakhamia a estimé que les conditions étaient désormais « suffisantes » pour une rencontre au sommet entre les deux chefs d’Etat.
Le négociateur russe a rappelé que, selon lui, une rencontre de MM. Zelensky et Poutine, ainsi que de représentants d’Etats garants, serait possible en cas d’accord pour mettre fin aux hostilités. « Après la discussion substantielle d’aujourd’hui, nous nous sommes entendus et proposons que la rencontre se fasse pour parapher l’accord », a-t-il dit. « A condition d’[effectuer] un travail rapide sur l’accord et de trouver les compromis nécessaires, la possibilité de conclure la paix se rapprochera », a affirmé M. Medinski.
- Joe Biden s’est entretenu de l’Ukraine
- avec des dirigeants européens
Le président américain, Joe Biden, devait s’entretenir avec des dirigeants européens, mardi, de la guerre en Ukraine, a annoncé la Maison Blanche. L’appel téléphonique avec les dirigeants français, britannique, allemand et italien visait à « discuter des derniers développements concernant l’invasion de l’Ukraine par la Russie », a précisé un porte-parole.
Dans l’après-midi, le secrétaire d’Etat américain affichait son scepticisme quant aux dernières négociations. « Je n’ai rien vu qui puisse suggérer qu’il y a un véritable mouvement parce que nous n’avons pas vu de signes de réel sérieux de la part de la Russie », a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse au Maroc. « Mais si l’Ukraine considère qu’il y en a [du mouvement], c’est bien et nous soutiendrons cela », a toutefois nuancé le diplomate américain. « Il y a ce que dit la Russie et ce que fait la Russie. Nous nous concentrons sur ce qu’elle fait », a avancé M. Blinken, estimant que les Ukrainiens négocient avec « un pistolet littéralement sur leurs têtes ». « Nous jugerons Poutine et son régime sur ses actes, pas sur ses paroles », a également déclaré un porte-parole du premier ministre britannique, Boris Johnson, aux journalistes.
- Les Bourses européennes accélèrent
- et prennent autour de 3 %
Les progrès dans les négociations entre l’Ukraine et la Russie, qui font espérer aux investisseurs un potentiel cessez-le-feu, ont amplifié la hausse des Bourses européennes ; elles ont terminé en hausse autour de 3 % tandis que la Bourse de Wall Street a ouvert en hausse.