L'écrivain péruvien Mario Vargas Llosa fait partie de ce que ses amis appellent 'l'intelligencia'. A ce titre, Le Monde (daté du 23 novembre) lui offre ses colonnes pour dire tout le mal qu'il pense du président du Venezuela. Mais il y a critique et critique. Llosa commente à sa manière l'incident survenu lors du dernier sommet latino-ibérique entre le roi d'Espagne et Hugo Chavez dans un style tout à fait particulier :
"L'enseignement le plus évident de ce psychodrame, c'est qu'il existe encore une Amérique latine anachronique, inculte et barbare, et ce serait une perte de temps et d'argent de tenter d'associer à la communauté civilisée, démocratique et modernisatrice que les sommets latino-américains aspirent à créer".
Et de préciser qui sont ces "barbares incultes" :
"Cette aspiration sera vaine tant qu'il y aura des pays latino-américains avec des dirigeants tels que Chavez, Ortega ou Evo Morales, sans parler de Fidel Castro".
Mario Vargas Llosa explique pourquoi :
"Qu'ils soient ou aient été populaires et qu'ils gagnent les élections ne fait pas d'eux des démocrates. Au contraire, cela montre la profonde inculture politique, la fragilité des convictions démocratiques de sociétés capables de porter au pouvoir, lors d'élections libres, des personnages de ce genre".
Curieuse conception de la démocratie ! Des élections libres, une majorité issue du suffrage sont, pour l'écrivain, des notions aggravantes à porter au débit des peuples immatures qui osent choisir des dirigeants honnis par Llosa. Ah ! Si on pouvait aussi changer le peuple ...Mais il ne faut pas désespérer :
"Bien sûr qu'il y a une autre Amérique latine plus décente, honnête, cultivée et démocratique que celle représentée par ces énergumènes", par ailleurs traités de "guignols".
L'auteur ne contrôle plus son langage chatié d'homme cultivé. Il écume de rage. Pour montrer que Chavez n'est pas un démocrate, il raconte l'histoire à sa manière :
"Comble de la supercherie : les états de service de M. Chavez le privent de toute respectabilité civile et démocratique puisque, le 4 février 1992, il a trahi son uniforme et s'est conduit en félon quand il a tenté un coup d'Etat militaire contre un gouvernement constitutionnel et légitime".
En fait, Chavez s'est dressé contre un gouvernement qui avait massacré plus de 2000 Vénézuéliens qui manifestaient pacifiquement. Et Chavez, en tant qu'officier, avait refusé de tirer sur le peuple. De quoi, pour Llosa, le mettre au ban d'infamie !
Mais, cela, les lecteurs du Monde n'en saurons rien.
Alors, pourquoi le quotidien du soir lui offre une page entière ?
La raison est simple : Hugo Chavez comme Evo Morales, après Fidel Castro, s'en prend aux multinationales qui ont l'habitude d'adouber des gouvernements, souvent des dictatures, leur permettant de réaliser sur le dos des peuples, des profits considérables. C'est cela la faute impardonnable, le péché originel commis par ces "énergunèmes" qui n'ont ni foi, ni loi... du marché !