Le 'pélerinage' de Nicolas Sarkozy au Vatican, l'hommage qu'il a rendu "au très Saint-Père" au nom de la République, car c'est en cette qualité qu'il a été reçu en audience par le Pape, ont de quoi inquiéter les Français. Notre pays est régi par des lois. L'une d'elles, datant de cent deux ans, explicite la séparation des Eglises et de l'Etat. Le président de la République devrait en être le garant. La teneur des paroles qu'il à prononcées officiellement sous les ors pontificaux, selon les dépêches d'agences, pourrait laisser croire que la France est redevenue "la fille ainée de l'Eglise".
S'adressant au "souverain pontife", Nicolas Sarkozy a déclaré :
"La désaffection progressive des paroisses rurales, le désert spirituel des banlieues, la disparition des patronages, la pénurie des prêtres n'ont pas rendu les Français plus heureux".
On comprend mieux, par ces fortes paroles, "la vocation" qui l'inspire et qu'il partage, a-t-il dit, avec le pape.
Et d'ajouter, sentencieux, le catholicisme "est la source majeure de la civilisation française".
Des formules bien plus édulcorées, telle celle sur "l'héritage religieux de l'Europe", avaient été retirées dare-dare du texte du précédent projet de constitution européenne pour tenter de sauver l'essentiel.
Aujourd'hui, Sarkozy se croit en mesure d'aller plus loin. Il ne cache pas son intention de "moderniser" la loi de 1905, c'est-à-dire de la rendre caduque au nom de la "laïcité positive", pour reprendre sa propre définition.
Il n'emploie pas le terme de "réforme" (comme pour les régimes spéciaux de retraites, le Code du Travail ou la Sécu), car le mot "réforme", en ce qui concerne la religion, a pour la Sainte Eglise Apostolique et Romaine, une ôdeur de soufre. Mais pour Sarkozy, l'objectif est de revenir et vite sur la laïcité, telle qu'elle s'était imposée avec la Troisième République, au début du XXème siècle.
En effet, actifs et nombreux, les curés dans les villages et dans les banlieues seraient, pour le Président, plus efficaces que des escadrons de CRS pour répandre la morale des riches. Les dames patronesses remplaceraient, à meilleurs compte, les employés de la Sécurité sociale, les prêtres, comme dans le bon vieux temps, prêcheraient la concorde, en lieu et place des "agitateurs" qui sèment la lutte de classe.
Nous aurions ainsi une bonne société, calme et obéissante aux ordres du Seigneur.
Devinez qui serait le Seigneur !