72% des Français, selon les sondages, expriment leur défiance à Nicolas Sarkozy.
Ainsi accusé par la majorité de l'opinion, un an après son installation à l'Elysée, le Président de la République était dans l'obligation de présenter sa "défense", jeudi soir, 24 avril.
Cette fois, face aux téléspectateurs, notre Nicolas a troqué sa cape de prestidigitateur*, pour un complet foncé, très strict, autre déguisement qui change selon les publics.
Pendant 90 minutes, interrogé par deux meneurs de jeu (l'expression est plaisante !), Patrick Poivre d'Arvor, de TF1, et David Pujadas, d'Antenne 2 et trois journalistes choisis, Sarkozy, a pour une fois, adopté une posture volontairement modeste, reconnaissant, à plusieurs reprises, qu'il vait "certainement commis des erreurs", jamais sur le fond, seulement sur la forme (la communication, la pédagogie ). Mais ces regrets, la "confession" publique concédée, lui permettaient de justifier l'intégralité de l'ensemble des "réformes" entreprises. Il a en outre affirmé la nécessité de les mener simultanément du fait de leur cohérence. Sachant fort bien l'impopularité de sa politique, il s'est affirmé conscient du "mécontentement" qu'elle engendre, de "la mauvaise humeur" ambiante dans le pays. Mais, c'est aussitôt pour confirmer sa volonté de les poursuivre sans infléchissement, en un mot, "de poursuivre le cap".
Sur le pouvoir d'achat, il s'est contenté de rappeler les mesures prises en ce qui concerne les heures supplémentaires dégrevées de charges sociales et défiscalisées. Et de rappeler son slogan : "Travailler plus pour gagner plus !", comme s'il s'agissait de générosité de payer davantage un temps supplémentaire de travail !
Confirmant la généralisation, en 2009, du "revenu de solidarité active" (RSA), Sarkozy a annoncé que pour financer cette disposition "sociale", il réduirait "la prime à l'emploi", supplément accordé à ceux qui retrouvent un job, pour les inciter à accepter du travail à bas prix. Ainsi, les salariés les plus pauvres devront payer le différenciel entre les indemnités chômage, augmentées d'allocations, et le salaire retrouvé.
Le Président a osé prétendre que "tout droit nouveau doit avoir pour corollaire des devoirs". Dans cet esprit, le projet de loi prévoit que ces "profiteurs", réintégrés dans le marché du travail, devront obligatoirement accepter l'emploi proposé, sur deux offres effectuées, avec un salaire amputé de 30% par rapport à la rémunération précédente. D'autre part, le nouveau lieu de travail pourra se trouver à une heure de son domicile (donc, avec deux heures de trajet par jour).
Pour être franc, Sarkozy n'a pas rappelé ces conconditions, hier, à la télé.
Comment, en effet, parler de "gagner plus" avec 30% en moins ?
De même, le slogan sied mal aux nouveaux embauchés qui ne vont pas "gagner plus" en travaillant que lorsqu'ils étaient au chômage !
Aucun journaliste n'a relevé cette réalité. Il est vrai qu'ils n'étaient pas là pour cela .
Pour augmenter le pouvoir d'achat, Nicolas Sarkozy a, de nouveau présenté "l'intéresement" des salariés, slogan usé depuis quarante ans par tous les gouvernements qui refusent de majorer les salaires.
Parlant du régime de retraites, Sarkozy a maintenu son objectif de porter à 41 annuités le temps nécessaire pour obtenir une pension à taux plein.
Et de réitérer également sa volonté de réduire le nombre des fonctionnaires, des enseignants, en particulier.
Sur tous les sujets, le Président appliquera la politique qu'il a définie. Le fait de confirmer cette volonté sur une voix posée, ne change rien à l'affaire. Ni ses admonestations visant "le capital financier qui marche sur la tête".
Choisi par le monde des affaires, la bande des Quarantes valeurs, pour privatiser la France, considérée comme leur bien propre, Nicolas Sarkozy avec ses grimaces de circonstance, ne leur fait guère peur. Ils doivent bien en rire, quand ils se rencontrent ensemble au Fouquet's, ou sur le yacht de Vincent Bolloré.
Le seul probléme, pour Sarkozy, c'est la réaction des salariés. Ils "préférent de la bonne soupe au beau langage".
Premier test : le Premier mai.
Et le 15, les enseignants seront à nouveau dans la rue, avec les lycéens.
Ce jour-là, les fonctionnaires se joindront peut-être au mouvement.
Et pourquoi pas le secteur privé ?
* Voir LE PRESTIDIGITATEUR, blog du 9 janvier 2008