Aujourd'hui, a l'appel de l'ensemble des organisations syndicales, les salariés du public et du privé doivent se mobiliser pour protester contre les décisions du pouvoir sarkozien, visant à imposer 41 annuités de cotisations de retraite et l'âge de 61 ans pour percevoir une pension complète. De source syndicale, on s'attend à une forte mobilisation, essentiellement sous forme de manifestations. Le chiffre 500.000 participants, dans environ 80 rassemblements en France, est avancé. On se souvient qu'en 2003, déjà sur les retraites, on comptabilisait, selon les sources de 1 à 2 millions de salariés dans les rues, accompagnés de grèves massives. Cette fois, on reste plus prudent, en matière de prévision, en ce qui concerne les arrêts de travail. Et de mettre en avant, d'une part le coût individuel d'une journée retenue, d'autre part, l'obligation de se déclarer personnellement gréviste, deux jours à l'avance dans les transports. A ce sujet, l'acceptation passive de ces nouvelles dispositions, pose question.
Pourquoi, à l'occasion de la mise en pratique de la nouvelle loi, les confédérations, la CGT en premier, n'ont-t-elles pas appelé les cheminots et les travailleurs de la RATP, à passer outre collectivement, à partir d'assemblées générales, dépôt par dépôt ?
Le respect de la "légalité" conduit-elle les syndicats à s'incliner devant des dispositions anti-grève ? Mais 'la loi" n'est q'une arme aux mains du gouvernement et des patrons, pour mettre en cause le droit de grève !
Rappelons-nous : en 1963, le général de Gaulle, au sommet de sa popularité (la fin de la guerre d'Algérie datait de moins d'un an), avait décrété la réquisition des mineurs en grève. Ceux-ci, pour défendre leur droit, avaient répliqué en refusant de se soumettre. Ils avaient brûlé dans d'immenses feux de joie, les avis individuels de réquisition. Par ce geste, les mineurs avaient défié, avec succès, le pouvoir. Et entourés de la solidarité ouvrière et populaire, ils avaient gagné leur bataille.
Appliquer une loi liberticide conduit inexorablement, de reniement en reniement, à se laisser désarmer sans combattre.
Pensons aux hommes et aux femmes, d'origine juive, qui, en octobre 40, ont obtempéré aux lois de Vichy en acceptant de se faire recenser dans les commissariats. Beaucoup d'entre eux ont payé de leur vie cet acte de soumission à la légalité du pouvoir en place.
Alors pourquoi, aujourd'hui, la CGT n'a-t-elle pas renouvelé l'acte d'indiscipline réalisé, il y a 55 ans ? Pourquoi limiter chaque bataille sociale à un seul motif de mécontentement , un jour sur les retraites, un autre sur la réduction du nombre des fonctionnaires, un troisième sur le pouvoir d'achat (motif essentiel de la colère des salariés) ? Déjà, Thibault, en 2003, n'avait-il pas déclaré que son objectif n'était pas de "paralyser la France" ?
On peut comptabiliser les batailles perdues, dont certaines n'ont jamais été livrées, telles celles concernant les privatisations de pans entiers des secteurs publics, les lois anti-grève (le service minimum) en acceptant d'emblée de limiter ce droit essentiel par accord préalable, loi qui vise aujourd'hui les enseignants, les régimes spéciaux dans les transports, avec une grève d'une ampleur inconnue, et brisée dès le premier jour, la casse permanente du Code du travail, la la précarité par la généralisation des CDD.
La colère gagne des secteurs entiers de la société.
Chaque mesure du pouvoir sarkozien frappe une une nouvelle catégorie de citoyens.
Les dockers, les ouvriers des ports, sont en grève pour défendre leur statut public.
Les marins-pêcheurs veulent vivre de leur travail, et leurs bateaux se mettent en travers des rades. Dans nombre d'entreprises, usines et grandes surfaces, les salariés réclament leur dû, et des conditions de travail décentes, alors que leur exploitation forcenée, les réduit à l'état de détresse. Les retraités ne veulent plus de pensions et d'allocations qui leur imposent un niveau de vie, bien au-dessous du minimum. Les statistiques font état de "travailleurs pauvres" qui n'ont plus les moyens de se loger. D'autres salariés, par dizaines de milliers, parce qu'ils sont immigrés, sont placés en marge de la société, faute de papiers. Les chômeurs vont devoir accepter des emplois au rabais, amputés de 30%.
Sans parler des coupes budgétaires qui suppriment des hôpitaux de proximité, des classes et des écoles, des bureaux de poste, des juridictions proches des citoyens, de la loi qui livre l'Université aux intérêts privés, qui organise un enseignement à deux vitesses.
Tout concourt à multiplier le mécontentement de la population.
N'est-il pas grand temps de fédérer ces colères multiples ? Car elles sont toutes le résultat d'une politique unique, celle conforme aux intérêts d'une minorité de privilégiés qui nagent dans l'opulence, qui osent déserter l'impôt en protégeant leur fortune à l'étranger. Le pouvoir sarkozien a été mis en place par cette caste de 'milliardaires en euros' (ils seraient deux cents familles, en France, dans ce cas).
Au-delà des confédérations syndicales, qui savent tout cela mais qui font semblant de l'ignorer, l'union doit se créer à la base pour imposer une nouvelle politique, car la bataille est politique. Réduire la lutte sociale à une suite d'escarmouches contre chaque effet de la politique du pouvoir est criminel.
En refusant le "Tous ensemble", les organisations syndicales organisent la défaite ouvrière.
Aux salariés, à leurs syndicats de base de se prendre en mains pour organiser la riposte.
Il est grand temps.