Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

 

Le 6 juin 44, il y a 65 ans, les forces anglo-américaines débarquent sur les côtes normandes.

L’organe officiel du parti nazi, le Völkischer Beobachter, annonce la nouvelle sur toute la largeur de sa première page :

« sur l’ordre de Moscou, l’invasion à l’Ouest a commencé…Le combat contre les troupes d’invasion en France du Nord est en cours »

Et d’ajouter, en guise d’éditorial : « Pour la vie et la liberté de l’Europe »

 

Le « second front », tant attendu, devient réalité. Staline réclame sa mise en œuvre depuis 1942. En effet, l’Armée Rouge supporte, seule depuis trois ans, le poids de la totalité des forces nazies.

Après les victoires de Stalingrad  (où la VI Armée allemande fut anéantie), et de Koursk, la plus grande bataille de chars de l’histoire, les Soviétiques avancent inexorablement vers l’Ouest, libérant progressivement le territoire de la Biélorussie, tout en pénétrant au nord, en Finlande, au sud, en Roumanie.

En cet été 1944, les forces allemandes se répartissent inégalement en Europe : 60 divisions en France, 26 en Italie, 35 dans les Balkans et 200 sur le front de l’Est, contre l’Armée rouge. On mesure ainsi le rapport de force de la Wehrmacht engagée sur les divers fronts.

Avec l’Opération Overlord, en Normandie, le haut commandement allié avait prévu d’appliquer en France un plan d’occupation, dénommé l’AMGOT, l’Allied Military Government of Occupied Territories, avec sa monnaie (le dollar), et son autorité administrative. Cet objectif va se heurter à la réalité de la Résistance française, de ses nombreuses actions militaires développées par les Forces Françaises de l’Intérieur, (dont les Francs Tireurs et Partisans), qui opèrent dans les villes et à partir des maquis. Elles  ont déjà libéré de nombreuses régions, coupant de nombreuses voies de communication, réalisant des sabotages quotidiens et administrant de nombreux  territoires,. Les Allemands et leurs forces supplétives - en particulier la Milice - doivent faire face à ce front intérieur. Déjà en avril, SS, Milice et GMR ont anéanti le maquis du Vercors, semant la mort et les ruines. Le 10 juin, aux environs de Limoges, alors qu’elles tentent de rejoindre la Normandie, des unités de la division Das Reich, composée de Waffen-SS alsaciens, réduisent en cendres la ville d’Oradour et ses centaines d’habitants, selon une « technique » éprouvée mille fois en Russie et en Yougoslavie, où bourgs et villages sont hérissés de potences, avec des milliers de partisans suppliciés.

L’effet militaire des actions de sabotages généralisés sur les arrières allemands réalisés par la Résistance, déjà mobilisée dans l’attente du débarquement,  sera reconnu par le général Eisenhower lui-même. Le commandement en chef allié estimera cette aide à la puissance de plusieurs divisions.

Mais il faudra attendre le 12 juillet, pour que le président Roosevelt annonce la reconnaissance du Comité Français de Libération Nationale, présidé par le général de Gaulle, comme  Gouvernement de « facto » dans les régions de la France libérée.

Le 14 juillet, des manifestations populaires importantes, impulsées essentiellement par le Parti Communiste et la CGT clandestine, ont lieu dans toutes les villes françaises. Elles sont violemment réprimées par les Allemands,  et aussi  la Milice, aux ordres de Darnand et de Pétain. A Paris, Yves Toudic, initiateur de la manifestation parisienne, sera abattu par les « brigades spéciales » de la police.

 

La bataille se poursuit en Normandie, âpre et sanglante. Les forces américaines et alliées sont en vue de Saint-Lô, le 16 juillet, et devront attendre fin juillet pour briser le front allemand.

Ayant subi des lourdes pertes le 6 juin et les jours suivants sur les plages du Calvados, les GI, pauvres bougres mobilisés venus d’outre-atlantique - les « noirs » formant naturellement les premières vagues d’assaut – nous sont présentés aujourd’hui comme les uniques Libérateurs de la France et de l’Europe.

Reconnaissant leur courage et le rôle qu’ils ont joué, cet été là, il faut le répéter : sans le front de l’Est, qui accaparait l’essentiel des forces allemandes, jamais les Alliés n’auraient pu débarquer en France.

Et, si les Etats-Unis et la Grande-Bretagne ont tenté l’expérience, c’est aussi pour contrer au plus vite l’avance de l’Armée rouge, pour éviter que les Soviétiques libèrent, seuls, l’Europe entière.

Le débarquement en France n’était pas, pour les Alliés occidentaux, sans arrière-pensées.

André Rossel dans un album consacré à l’ « Eté 44 », paru en 1974, le confirme :

« Il est historiquement indiscutable que les projets des conjurés du 20 juillet  (1944), contre Hitler étaient de demander un armistice à l’Ouest et de continuer la guerre à l’Est ; il est certain que Franco, Salazar et, probablement le Pape, ont fait des démarches dans ce sens (…) Il faudra 1947 pour que ce renversement des alliances se produise. »

 

En 1974, André Rossel ignorait encore l’existence de l’opération ‘Sunrise’, qui débute en Suisse, le 22 février 1945. Il s’agit de tractations secrètes menées entre des chefs nazis, parmi lesquels le général des SS, Karl Wolf (n° 3 de l’Ordre Noir, chef de la sécurité allemande en Italie), des banquiers suisses et italiens, et des émissaires américains, tel Allan Dulles, le chef des renseignements US en Europe.

Bénie par le Vatican, l’opération avait pour objectif la capitulation des forces allemandes d’Italie du Nord et un retournement d’alliance des Alliés contre les Soviétiques.

Pour les milieux d’affaires italiens, suisses et américains (dont Dulles était leur avocat), le bolchevisme constitue le danger principal.

Pour sa part, Karl Wolf, sentant la guerre perdue, donnait des gages à l’Ouest, pour sauver sa tête en se retrouvant dans le camp des vainqueurs.

Mais il est trop tard : le drapeau rouge flotte, le 2 mai, sur la capitale du Troisième Reich, et le 8 mai, l’Allemagne tout entière capitule.

Allan Dulles, après la guerre, fit en sorte que Karl Wolf ne soit pas jugé à Nuremberg. Il en savait trop. Isolé pendant quatre ans par les Américains, le général SS retrouva sa liberté avec le début de la guerre froide.

 

Nul doute que le président Obama, ce jour, en Normandie, n’en soufflera pas mot.

Tag(s) : #Histoire
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :