C'est hors de nos frontières que tout se décide
LE POUVOIR EUROPEEN SIEGE A BRUXELLES
COULISSES DE BRUXELLES
11 JUILLET 2013
Qui doit décider de la restructuration des banques de la zone euro dans la future union bancaire qui avance à grand pas ? La Banque centrale européenne, chargée de la surveillance bancaire, ne peut le faire, car son indépendance lui interdit de rendre des comptes.
La Commission a donc proposé hier qu’elle soit chargée de faire le ménage en cas de besoin.
Michel Barnier, le commissaire européen chargé des services financiers explique son projet dans l'entretien ci-dessous.
Pour rappel, l'union bancaire a été décidée en juin 2012 et devrait être achevée fin 2014, un record de vitesse rarement égalé dans l'histoire. Cette dernière proposition de la Commission est différentes de celle approuvée le mois dernier par les ministres des finances qui visait à créer un cadre national de résolution des crises bancaires .
Cette fois-ci, il s'agit du dernier étage de la fusée (le compromis franco-allemand du mois de mai portait justement sur cette question, même s'il n'abordait pas la question de la place de la Commission dans le système).
Pourquoi la Commission est-elle la mieux à même de restructurer une ou plusieurs banques en cas de nécessité?
La Commission fait partie du « mécanisme de résolution unique » mais ce n’est pas elle qui va restructurer les banques. Pour des raisons juridiques, Il faut une institution européenne pour déclencher la résolution, "pousser sur le bouton" si on veut dire les choses simplement. Dans le cadre du traité actuel, la solution la plus sûre est que ce soit la Commission qui joue ce rôle. Mais elle le fera sur la base d'une recommandation du « Conseil de Résolution unique » qui préparera et mettra en œuvre les plans de restructuration.
Pourquoi ne pas créer une autorité européenne de résolution ad hoc?
Au-delà des mots, agence, conseil ou autorité, c'est bien ce que nous faisons sur le fond! Une des leçons de la crise c'est que la supervision de banques actives dans plusieurs pays par des autorités nationales juxtaposées est moins efficace qu'une approche intégrée.
C'est pourquoi nous avons proposé l'an passé de confier cette mission à la Banque Centrale Européenne au sein de la Zone Euro. Ce problème est encore plus aigu en cas de difficultés ou de crise dans une banque. Depuis 5 ans, nous avons bien vu que la gestion des difficultés bancaires par les autorités nationales a rendu plus complexe et plus longue leur résolution et in fine plus couteuses pour les contribuables.
C'est cela que nous voulons changer avec le Conseil de Résolution qui agira en lien étroit avec les autorités nationales.
Certains pays, dont l'Allemagne, estiment que l'on ne peut confier la résolution des crises bancaires à la Commission sans modifier les traités européens.
Ma proposition est tout à fait en ligne avec les traités et notamment avec l'article 114 sur le bon fonctionnement du marché unique. Une zone euro qui fonctionne est essentielle pour le Marché unique. Encore une fois, il ne s’agit pas de confier à la Commission la résolution des crises bancaires, il s’agit d’établir un mécanisme pour résoudre ensemble une crise, comme nous avons établi un mécanisme pour superviser ensemble les banques.
La Commission pourra-t-elle faire appel au Mécanisme européen de stabilité pour recapitaliser une banque alors que celui-ci fonctionne avec la garantie des budgets nationaux?
Tout ce que nous faisons, la proposition d'aujourd'hui mais aussi toutes les règles que nous avons adopté ces 3 dernières années pour renforcer le système bancaire, c'est précisément pour éviter de devoir utiliser de l'argent public pour venir à la rescousse des banques. Pour faire en sorte que les contribuables n’aient plus à payer pour les banques.
Le mécanisme unique de résolution prévoit un fond européen de résolution qui mutualisera les fonds nationaux privés financés par les banques (entre 60 et 70 milliards d’euros). On ne peut jamais exclure qu'un besoin d'argent public soit aussi nécessaire mais de telles situations ont vocation à devenir exceptionnelles.
Si cela est nécessaire, ce financement devra respecter les règles sur les aides d’Etats et pour le MES, les règles de mise en œuvre de cet instrument qui exigent l’unanimité des Etats. Le Mécanisme de résolution unique ne change pas cela.