Dunkerque
mercredi 09.02.2011,
Les portuaires duHavre, Marseille, Fos, Saint-Nazaire... visitent les Dunkerquois non grévistes.
Pour emporter le bras de fer engagé contre Nicolas Sarkozy, la CGT des ports et docks a marqué le terrain des collègues dockers dunkerquois, non grévistes, tous affiliés à un autre syndicat, celui du Cappelois Franck Gonsse[/EMPTYTAG][TEXTE]
C'est « insupportable » que tous les dockers de France soient en grève (dockers et grutiers portiqueurs à tour de rôle, toutes les fins de semaine, depuis plus d'un mois), sauf les Dunkerquois, « pour revendiquer la reconnaissance de la pénibilité de nos métiers », pestent les adhérents de la fédération CGT des ports et docks, rassemblés lundi midi au Pavillon des maquettes, à Dunkerque.
A la clé l'obtention d'années de départ en retraite anticipée, de quatre années négociées entre les parties fin 2010, tombées à deux ans après une volte-face du gouvernement reconnu, et regretté, par tous. Surtout, vécue comme une « injustice faite aux travailleurs », martèle Johann Fortier (secrétaire général des dockers du Havre). La pénibilité, ce n'est pas un concept. Durant huit heures, dresser dans les cales, des fûts de glucose de 320 kg, se souvient un docker. « Le métier de force a été compensé par des cadences infernales », rajoute le responsable havrais. « Une espérance de vie écourtée de 8 années. Une dangerosité que d'aucun a connue avec tous ces drames vécus dans tous nos ports ».
La main tendue
de la CGT à la CNTPA
Le combat contre le gouvernement, contre le président de la République, ils l'entendent le mener dans « l'unité ». Venir lundi à Dunkerque, sonnait comme un avertissement à l'adresse de Franck Gonsse, le secrétaire général national de la CNTPA, le syndicat ultra majoritaire des dockers dunkerquois, et qui tente d'exister au niveau national.
Traduction : 150 dockers et ouvriers portuaires CGT étaient montés du Havre, de Marseille, Fos... Le rendez-vous était fixé au port ouest, sur le terminal conteneurs, lundi à 9h30. « Tout le monde s'est présenté pour nouer un dialogue avec les gens présents sur le site. Ils travaillaient deux bateaux. Donc les Dunkerquois étaient 30 ou 40, mais on n'a vu personne. Ils avaient des consignes pour nous éviter », répète Dominique Carney, docker dunkerquois. « Tout le monde a peur. Peur de tous ces jeunes, de ne pas trouver du travail, s'ils écoutaient la CGT ». « Nous étions venus tendre des mains ; pas donner des coups », ajoute Stéphane Stamatiou (secrétaire général des dockers du Golfe de Fos). « Tout simplement parce l'adversaire est puissant, comment faire ensemble pour mieux y résister ? »
L'orgueil de la classe ouvrière
Surtout, les portuaires ont été piqués dans leur orgueil de classe ouvrière. C'est ce bastion que l'Elysée veut abattre, « par tous les moyens, et par médias interposés ». « Ils essaient de nous faire passer pour des nantis », clame Pascal Galeoté (secrétaire général CGT des salariés du port de Marseille).
Ne leur dites pas qu'ils gagnent de 3 500 à 4 500 euros net pour moins de 12 heures de travail hebdomadaire, comme le pointe le quotidien Le Figaro, se basant sur un rapport de la Cour des comptes.
Au-delà des grilles de salaire conventionnelles, ils reconnaissent des primes de quart, de salissure, etc. « On doit gratter à fond, avec tant de week-ends et tant de nuits travaillés. Quand on entend que la conduite équivaut à trois heures quotidiennes, c'est oublier les heures de maintenance qui suivent dans la journée. Un travailleur portuaire administratif gagne de 1 200 à 1 500 euros ; un grutier de 2 000 à 2 700 euros », détaille Laurent Delaporte (secrétaire général CGT des salariés du port du Havre).
En butte sur la réforme portuaire depuis mars 2008, et aux prises avec la notion de pénibilité depuis le 3 janvier, grévistes, ils disent soustraire 500 euros sur leur fiche de paie mensuelle.
Quant à « en appeler à notre responsabilité » dans la survie économique des ports, ils rétorquent « qu'il est facile de pointer le doigt vers nous, alors que les véritables responsables sont les décideurs qui n'ont rien fait pour enrayer notre perte de compétitivité. Rotterdam investit 1 milliard d'euros, contre 175 millions par l'Etat français à l'ensemble de nos sept ports ».
Un blocage du port de Dunkerque ne semble pas à exclure.
Mercredi soir, les représentants de la fédération des ports et docks CGT devaient rencontrer l'UPF et l'UIMM.
Durcir, pourquoi pas ?
Même le Transmanche, dixit les Calaisiens, pourrait s'inscrire dans ce que le secrétaire général CGT des salariés du port de Dunkerque, Didier Fauconnier avance « tôt ou tard, comme une amplification du mouvement » : tout bloquer et pas strictement 4 à 5 jours par semaine.
A quand, aussi, une nouvelle expédition des barons de la CGT chez le corsaire Gonsse ? « On reviendra assez rapidement », glisse Pascal Galeoté. « On a planté la graine. Il faudra l'arroser, car on ne gagnera pas la confiance des gens en une seule fois ». Cela promet des échanges fleuris.
Ludovic BOUTIN
Le Phare Dunkerquois
repris sur
LE BLOG DE JACQUES TOURTAUX