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TEXTE REPRIS SUR

LE BLOG DE JACQUES TOURTAUX

Jacques LACAZE s'invite au débat :

"lutter, débattre, construire !"

"CANEMPECHEPASNICOLAS" estime nécessaire de poursuivre 

un large débat entre militants révolutionnaires, sans tabous, ouvert

et respectueux des opinions des autres, pour mieux lutter, mieux débattre

et mieux construire le mouvement populaire nécessaire au changement de

société, auquel nous travaillons tous ensemble.

JACQUES LACAZE :

LUTTER, DEBATTRE, CONSTRUIRE !

 

Le débat qui s’est engagé sur le blog de Jacques Tourtaux est très important, même si Jacques lui donne un contour très vif et personnel, voire passionnel, et si les réponses apportées par les camarades du FSC sont quelques peu décalées. Je propose à partir d’une expérience politique et syndicale, une analyse sur quelques aspects des problèmes que nous avons à affronter.

Je sais qu’on va me reprocher d’engager un tel débat.

Mais l’heure est à la franchise et au débat de fond, au débat politique. Ceux qui l’esquiveront prendront une lourde responsabilité. Je mesure par ailleurs le contexte qui est le nôtre du point de vue des forces syndicales et politiques qui agissent pour l’émancipation des travailleurs. À savoir, d’une part que ces forces sont extrêmement divisées en une multitude de petits groupes, mais aussi d’autre part que les partis et syndicats historiques sont profondément gangrenés par l’idéologie politique qui permet à la bourgeoisie de conserver le pouvoir et qui a nom : parlementarisme.

 

Je suis tombé dans le Parti communiste en naissant, il y a 70 ans. Les guerres d’Algérie puis du Viet-Nam ont marqué notre jeunesse. J’ai eu la chance de ne pas partir faire la guerre au peuple algérien. Comme beaucoup de camarades, j’ai été très actif en 68 et je reste un soixante-huitard non-repenti. 68 a été deux grand mouvements, celui des étudiants et intellectuels et le grand mouvement gréviste de masse de la classe ouvrière. La fusion de ces mouvements pour laquelle j’ai milité sur le terrain n’a pas eu lieu. La quasi-totalité des forces politiques s’est dressée vent debout pour l’empêcher. La responsabilité du PCF et de la CGT dans cette action est écrasante. Ils ont assimilé les leaders gauchistes à la masse des étudiants. On sait ce que ces personnages sont devenus, dans leur écrasante majorité. Et l’idée totalement fausse de ne retenir qu’un aspect de 68, soit le mouvement étudiant soit le mouvement gréviste, persiste et témoigne d’un parti pris, d’un aveuglement lourd de conséquences.

 

J’ai exercé la médecine sous forme libérale et salariée durant 32 ans à partir de 1974, sans véritable engagement politique. Je suis revenu à un engagement précis après les événements de 95 : j’ai rejoint le groupe qui allait donner naissance au PRCF en janvier 2004. Je l’ai quitté, il y a bientôt trois ans. Je veux faire quelques remarques sur les raisons de ce départ, car je pense qu’il s’agit d’un problème de fond, plus exactement qu’il témoigne de quelques aspects du problème conjoncturel que nous rencontrons dans nos efforts militants.

 

En bon petit soixante-huitard, j’ai orienté au maximum mon militantisme vers les entreprises en luttes. Au début, j’ai participé aux actions menées par le mouvement de chômeurs de l’hiver 97-98 et tout naturellement j’ai milité à la CGT. J’ai été rapidement très favorable au regroupement des syndicalistes de classe et de masse face à la ligne réformiste dominante.

 

Une pétition a été lancée par des membres du PRCF dénonçant cette ligne. Cette pétition a connu un succès équivalent à toutes les pétitions antérieurement mises en route par cette organisation (environ 800 signatures), au niveau du retour des listes papiers proposées par les militants. Mais sur Internet, son succès a été 10 fois plus élevé, ce qui est fréquent pour toutes sortes de pétition. Je pensais – et je pense toujours – qu’on ne pouvait que très faiblement compter sur ces signataires. L’avenir l’a démontré amplement. L’idée était dans l’air de se regrouper dans une mouvance large : un Front Syndical de Classe.

Le titre était bon et porteur.

Mais les camarades du PRCF ont choisi de créer une association 1901, avec statuts, président, trésorier etc. Je n’étais pas d’accord, et rapidement je n’ai pas suivi. À une réunion à Lens, j’ai exposé la situation dans le Pas-de-Calais, où de nombreux syndicats et la majorité des Unions Locales se regroupaient pour lutter. Je pensais – et pense toujours – que c’était la voie à suivre. On m’a répondu, qu’il fallait avant tout faire vivre le FSC sous sa forme associative, l’organiser et le renforcer. Un site a été créé etc etc.

 

C’est là très précisément que se trouve le problème : lutter sur le terrain et au sein du syndicat, se coordonner, réfléchir, débattre, construire pas à pas les nécessaires directions des luttes, où s’organiser pour l’essentiel à l’extérieur des syndicats, appeler à la lutte sur des programmes – parce que, c’est la vérité toute crue – échafaudée par des camarades qui détiennent la vérité. Conséquence, on publie régulièrement de grands appels et de grandes déclarations qui n’ont que très peu de chance d’être opérationnels.

 

Le PRCF, qui a joué un rôle décisif dans cette orientation et dans la mise en place de ce FSC a une longue habitude de ce type de fonctionnement. Dans sa presse, ses affiches et ses tracts, l’analyse politique et les mots d’ordre sont avec une grande constance et sans changement sur le fond, répétés à longueur de mois.

 

C’est parce que nous sommes dans une telle conjoncture concrète, qui concerne toutes les mouvances, que je relate avec précision ce qui s’est passé dans cette mouvance. Il suffit de regarder, ça fonctionne comme ça partout. Il existe de nombreux groupes révolutionnaires et il s’en crée toujours des nouveaux. Chacun à sa ligne, incluant l’action syndicale (ou la nécessité de créer autre chose et de quitter les syndicats, ce qui revient au même), mais aussi son type d’organisation, de fonctionnement (comité central, fédération, section ….) et bien sûr, chacun détient la vérité. L’aspect organisation, joue alors à plein. La tâche centrale devient défendre « mon organisation » qui est bien sûr le « véritable embryon » du parti dont les travailleurs et les syndicalistes en particulier ont besoin.

 

Bref, soit on continue dans cette orientation, et, on va tout droit au mur, car la conséquence inéluctable est le lamentable débat qui s’est développé autour des prises de position sur les dernières élections et celle de Jacques Tourtaux en particulier. Un minimum de recul historique le démontre. L’histoire ne se répète pas. Le changement de société pour lequel nous luttons tous ne se fera pas comme en 1789, ni comme en 1917, ni comme en 1945, ni comme en Chine ou au Vietnam. Le rouleau compresseur de l’idéologie bourgeoise a joué à plein.

 

Soit on change de fusil d’épaule, on considère qu’il est plus que prématuré de centrer l’action sur une ligne définie en petit comité et de créer dans la foulée son machin. On admet que la réalité est bien plus riche, qu’aujourd’hui, personne n’a la vérité vraie, qu’il faut continuer à agir à se mobiliser comme à l’automne 2010, à se rencontrer, à s’entraider, à débattre démocratiquement. Que nous devons contribuer à construire une unité de la classe et du peuple sur les problèmes que nous avons à résoudre aujourd’hui. Ce qui ne doit pas exclure la lutte idéologique, mais au contraire la renforcer sur des bases démocratiques.

C’est à un véritable changement de culture qu’il faut aller.

 

Le démocratisme, le parlementarisme de nos sociétés est un obstacle majeur à surmonter (voir le petit et remarquable livre de Jean Salem : « Elections piège à cons ? Que reste-t-il de la démocratie ». Ce dévoiement par les forces de la réaction, du suffrage universel, effectivement conquis de haute lutte, mais aussi de la forme parti, reprise aussi par la bourgeoisie, doit au minimum nous interroger. Pour moi, c’est clair, nous devons laisser l’électoralisme en dehors de nos préoccupations. Ce que nous venons de voir avec la présidentielle est on ne peut plus démonstratif. Mélenchon, car il faut appeler les choses par son nom, a prononcé beaucoup de discours, a permis des rassemblements très importants, a électrisé des foules de travailleurs mêlés à la petite bourgeoisie intellectuelle.

Chaque chapelle a fait un bilan minutieux  : ça c’est bien, là je ne suis pas d’accord, là ça avance, là ça recule, et puis tu as vu ce qu’il leur a foutu dans la gueule etc etc.

Mais pourquoi est-il resté strictement dans le moule électoraliste avec comme objectif d’arriver par les urnes au pouvoir dans 10 ans ? Pourquoi n’a-t-il pas changé de terrain et n’a-t-il pas organisé ses meetings et réunions à la porte des usines en luttes, des camarades métallurgistes de Lorraine par exemple ?

Il y avait – et il y a toujours - l’embarras du choix, tellement les luttes sont nombreuses. Il est clair, et tout un appareil politique avec lui n’entendait pas sortir d’un millimètre du consensus électoral. Il est allé saluer les métallurgistes qui venaient de faire une longue marche depuis leur usine, et le héros, c’est lui ! Non, les héros, ce sont ceux qui résistent par la lutte sur le terrain et au quotidien, pour défendre leur travail , c’est-à-dire leur vie et celle de leur classe.

 

Je voudrais terminer en notant, que beaucoup de camarades pensent en termes d’organisation: tu adhères où, que je sache qui tu es. Et parce que tu es à tel parti, à tel syndicat, à telle organisation tu penses – ou tu dois penser – comme ci comme ça. Ou d’autres passent leur temps à savoir pour qui tu roules, tu votes. Ou d’autres encore possèdent un riche vocabulaire pour caractériser les camarades : gauchistes, droitier, opportuniste, j’en passe, le meilleur étant stalinien !

Un vocabulaire inventé par le mouvement communiste et adopté avec délectation par l’idéologie bourgeoise pour stigmatiser ceux qui luttent. Les hommes de main de la bourgeoisie qui véhiculent et défendent cette idéologie anti-populaire savent changer le sens des mots.

 

Oui, vraiment : lutter, débattre, construire !

 

Jacques Lacaze, 12 mai 2012.

Tag(s) : #Politique française
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