Karachi :
la phrase de l'Elysée
qui vend la mèche ?
L’Elysée joue aux pompiers pyromanes. En voulant éteindre la polémique autour du rôle de Nicolas Sarkozy dans le supposé financement occulte de la campagne d’Edouard Balladur en 1995, en lien avec le volet financier de l’affaire Karachi, la présidence a ouvert un nouveau foyer.
Dans un communiqué très ferme, la présidence a assuré jeudi, après la mise en examen de Nicolas Bazire, l’ancien directeur de campagne d’Edouard Balladur, que «Nicolas Sarkozy n’apparaît dans aucun des éléments du dossier».
Mais comment la présidence peut-elle en être aussi sûre sans avoir eu accès aux éléments du dossier, ce qui serait anormal en vertu de la séparation des pouvoirs?
Cette phrase a fait réagir la classe politique et les syndicats de magistrats. L’Union syndicale des magistrats s’est étonné que «les services de la présidence de la République fassent aussi clairement référence au contenu des pièces d'une procédure judiciaire, montrant qu'ils ont pu en avoir connaissance, dans l'irrespect apparent du secret de l'instruction».
«C'est assez incroyable que l'Elysée reconnaisse aussi benoîtement qu'il a eu accès à des pièces», a réagi Christophe Regnard, le président de l’USM, ajoutant: «Il ne faut pas être naïf. On sait que les informations remontent. Mais d'habitude cela demeurait caché.»
Matthieu Bonduelle, du Syndicat de la magistrature, a lui estimé qu’il «y a manifestement des incursions scandaleuses de l’exécutif, en particulier de l’Elysée dans le cours de la justice», ce qui est «totalement inacceptable». Sur I-Télé, Ségolène Royal s’est elle dit «très étonnée que l'Elysée ait déjà eu communication des auditions, qui sont couvertes normalement par le secret de l'instruction. Il faut que ces intrusions cessent, parce que c'est une atteinte très grave au fonctionnement des institutions et à l'autorité judiciaire dont le président de la République est normalement le garant.»
Les membres du gouvernement peinent à justifier cette phrase.
Pour Eric Besson, le ministre de l’Industrie, «le communiqué n’est pas choquant» parce qu’il reprécise simplement que Nicolas Sarkozy n’était pas «en charge du financement» de la campagne en 1995.
Pour Nadine Morano, si l’Elysée peut affirmer que Nicolas Sarkozy n’apparaît pas dans le dossier, ce n’est pas parce que l’Elysée a eu accès au dossier mais en raison des déclarations de l’avocat de Nicolas Bazire, lorsque son client est sorti de son audition, et en s’appuyant sur un article paru dans la presse, sans préciser le nom du journal, datant selon elle de décembre 2010.
De plus, cette affirmation de l’Elysée est factuellement fausse. Un rapport de la police luxembourgeoise remis au juge Van Ruymbeke en 2010 désigne le chef de l’Etat comme le maître d'œuvre de la mise en place de circuits financiers au Luxembourg, par lesquels sont passées les commissions du contrat pakistanais
Cette polémique intervient alors que Brice Hortefeux a été mis en cause ce vendredi, par des écoutes téléphoniques, selon lesquelles il a eu accès aux déclarations devant un juge d’un témoin-clé de l’affaire, a révélé Le Monde.
Sur cri du Peuple 1871 :