Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog


Retour sur mon intervention chez Fogiel sur Europe1
par
Paul Villach


Il ne faut pas bouder son plaisir quand l’occasion est si belle. Mercredi 18 novembre 2009, Marc-Olivier Fogiel, sur Europe n° 1, avec Guy Carlier, « attendait (le rédacteur d’) Agoravox (que j’étais), au coin du bois  », comme l’a si joliment noté Zorro, ce « justicier masqué vêtu de noir qui combat l’injustice en chantant » (1).

Mais à vouloir m’empêcher de parler à tout prix, ils ont été tout de même obligés de répondre aux « scuds » ou, si l’on préfère, aux « peaux de banane » que je leur ai lancés quand je pouvais placer trois mots… Ils ont ainsi pu livrer « en direct » un peu de la rigolade qui constitue ce catéchisme erroné de l’information dispensé dans les écoles de journalisme, du moins si on en croit le grand-prêtre Guy Carlier (Voir la vidéo).
 
Le traitement de l’information, une médaille avec un endroit et un envers
 
 L’image de la médaille du traitement de l’information avec un endroit et un envers, que je leur ai glissée sous le nez, a mis en particulier Marc-Olivier Fogiel dans tous ses états. La preuve ? Il y est revenu par deux fois.
J’ai, en effet, parlé des deux étapes du traitement de l’information :
 
1- dans un premier temps - ou endroit de la médaille - on vérifie et recoupe l’information. Les journalistes adorent présenter ainsi leur métier.
C’est normal, ils font ainsi l’unanimité. 
Qui pourrait les contredire ? 

2- Mais il leur arrive parfois de recouper l’information si menue qu’il n’en reste rien : précisément, dans un second temps - ou envers de la médaille - se pose le problème de savoir si on diffuse ou non l’information vérifiée et recoupée. Quels critères permettent alors d’en décider ? 
De ce choix, jamais les journalistes n’en parlent, comme si ça allait de soi ! Car c’est un sujet qui fâche et divise, forcément.
 
Marc-Olivier Fogiel a fait, à ce propos, étalage de son ignorance ou de sa duplicité, et non par inadvertance puisqu’il y est revenu par deux fois. Est-ce dans une école de journalisme qu’il a appris ces âneries ? (2)
Si c’est le cas, il faut vite prévenir ceux qui y sont : qu’ils en sortent de toute urgence, les malheureux ! 
 
Me répondant, en effet, directement, il a osé d’abord affirmé ceci :
« S’il y a des choses qu’on ne dit pas, c’est peut-être qu’elles ne valent pas le coup d’être dites ! Si on ne les donne pas au public, c’est qu’il y a des raisons : l’info n’est pas suffisamment recoupée, peut-être qu’elle ne veut rien dire, il faut la mettre dans un contexte. Et ce n’est pas simplement en la délivrant… Vous pouvez être très contre-productif en délivrant une information sans la mettre en perspective. »
 
Puis, en conclusion de l’émission, nous avons eu cet échange :
« J’espère, a-t-il dit, qu’on a alimenté l’information et la réflexion de nos auditeurs puisque le matin Europe 1 c’est ça, c’est amener de l’information pour alimenter une réflexion, mettre en perspective, analyser. Pour ça, il y a une centaine de journalistes qui sont là pour travailler.
- Et quelquefois la dissimuler ! ai-je corrigé.
- Jamais !
- Oh ! Vous plaisantez !  » ai-je répliqué. (Voir la vidéo)
 
Informer, c’est parfois autant dissimuler que révéler
 
Comment nier aussi effrontément qu’informer c’est parfois au moins autant dissimuler que révéler ?
 
1- À cela, d’abord, nulle malignité ! C’est une affaire de place disponible. On ne peut pas transvaser le contenu d’un tonneau dans une bouteille. Innombrables sont les informations chaque jour et extrêmement exigus, l’espace et le temps de diffusion disponibles dans les colonnes de journaux et sur les antennes.
Donc, forcément, un tri draconien doit être effectué : on parle d’une dizaine de volumes de deux cents pages pour la seule production quotidienne d’une seule agence comme l’Agence France-Presse !
En regard, combien d’informations figurent dans un journal ?
Combien sont élues en première page ?
Sur quels critères élire ou exclure ces informations soigneusement vérifiées ?
Ce n’est pas une mince affaire.
 
 2- Une deuxième contrainte y pourvoit. La contrainte des moyens de diffusion et de réception de l’information n’est pas seule à s’exercer. Il en est une autre aussi rigoureuse : c’est la contrainte des motivations de l’émetteur. Pour être diverses, ces motivations n’en obéissent pas moins toutes au principe fondamental de la relation d’information  : nul être sain ne livre volontairement une information susceptible de lui nuire. Personne ne souhaite s’exposer aux coups d’autrui. Un gamin qui fait l’école buissonnière, sait ça : qu’on relise la nouvelle de Daudet où un enfant dans cette situation lance à sa mère, en rentrant en retard, ce leurre de diversion : 
« Maman, si vous saviez !... Le pape est mort !  » (3).
Des informations sont donc, à cette fin, soigneusement dissimulées. Qui n’en fait pas l’expérience tous les jours ? 
Europe 1,
Fogiel et leur patron Lagardère échapperaient-ils à la règle ? D’ailleurs, en croyant utile à ses intérêts de dire publiquement au micro que « jamais  » Europe n°1 ne dissimule d’informations, M.-O. Fogiel a paradoxalement confirmé le principe fondamental de l’information.
Mais il a trompé ses auditeurs.
 
Deux exemples
 
Pressé par M.-O. Fogiel de fournir un exemple où j’aurais «  amené » de l’information (4), j’ai été « amené » à évoquer, pendant l’émission, « l’affaire des Irlandais de Vincennes ». On y trouve de beaux exemples de dissimulation de l’information : il a fallu, par exemple, attendre le 5 décembre 2006, - soit 24 ans ! - pour que M. Prouteau reconnût à la barre, devant la Cour d’appel qui jugeait l’affaire des « écoutes téléphoniques de l’Élysée », que « Paul (Barril) avait chargé la mule  », le 28 août 1982 : c’était sa façon imagée de dire que les armes avaient été non pas « amenées » mais apportées par ses soins au domicile des Irlandais pour mieux les confondre !!!
 
Quant au président Mitterrand, peut-on oublier la façon dont il s’indigne devant des journalistes belges qui l’interrogent dès 1993 sur ces écoutes téléphoniques ?
Il n’en a jamais vu, il ne sait même pas comment c’est fait !
Et, l’air outragé, il se lève et interrompt l’interview !
Or, la justice a établi qu’il a été le prescripteur de ces écoutes !
 
 La dissimulation, une règle de survie
 
Ainsi, qu’il s’agisse d’un individu, d’une entreprise, d’une profession, d’une institution, d’une nation ou a fortiori d’une radio, la dissimulation d’information est une règle de survie ! Il faut rappeler à M.-O. Fogiel la maxime prêtée à Churchill :
« En temps de guerre, la vérité est si précieuse qu’elle devrait toujours être protégée par un rempart de mensonges  ».
Or, peut-on ajouter, il en est de même en temps de paix, car les conflits entre les hommes ne cessent pas, à des degrés variables d’intensité. La première guerre qu’ils se livrent, est d’ailleurs celle de l’information !
Un proverbe latin dit même que "qui ne sut dissimuler ne sut jamais régner" !
 
L’exhaustivité de l’information est donc une illusion comme celle de l’iceberg qui montre moins qu’il ne cache. Dès lors, s’est-on demandé, faut-il accuser M.-O. Fogiel d’ignorance ou de duplicité ?
On ne sait, lui seul peut y répondre !
Mais qu’importe ! Dans les deux cas, le journalisme qu’il pratique, en ressort un peu plus discrédité, rendant Agoravox encore un peu plus nécessaire ! 

Paul Villach 
 
(1) « Sur Europe1, Fogiel attendait AgoraVox au coin du bois ! »
 http://www.agoravox.fr/actualites/medias/article/sur-europe1-fogiel-attendait-65260
(2) Selon Wikipédia, il n’aurait pas dépassé le stade des deux premières années d’Université !
(3) Alphonse Daudet, « Les contes du lundi » : « Le pape est mort ».
(4) M. Fogiel ignore sa langue française : on « amène » un être vivant qui marche sur ses jambes ou ses pattes, mais on « apporte » ce qui ne peut se déplacer seul…
Tag(s) : #Politique
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :