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Les dissidents sont à l’Ouest

Les Crises

Dans la peau de Julian Assange

Comme vous le constatez, nous sortons une sélection des billets les plus importants que nous avons consacrés à Julian Assange depuis l’année dernière.

Comment ne pas être indigné face au traitement inhumain d’Assange – dénoncé même par l’ONU – et par le silence complice des médias, qui étaient bien contents en 2011 de vendre du papier grâce au travail de Wikileaks. Défendre avec acharnement ses sources ? So XXe siècle..

 

Mais le pire est quand même cette incroyable extraterritorialité du Droit américain, car Assange est Australien et n’a commis aucun crime sur le sol Américain, quoiqu’essaie d’en dire l’administration Trump…

Il ne manque plus que la Russie passe une loi condamnant toute personne ne publiant pas des informations sensibles nécessaires à la sécurité de la Russie pour que, si vous avez les informations Wikileaks : si vous les publiez, extradition direction Washington et si vous ne les publiez pas, direction Moscou ? Avant que nous soyons tous extradés à Rihad pour tâter du fouet, car nous respectons peu les lois de ce charmant pays… ?

Bref ce qui arrive à Assange est très inquiétant pour la liberté de la presse, la protection des lanceurs d’alerte et du droit d’asile. Espérons que la justice européenne sera à la hauteur de ce défi.

Olivier Berruyer, 12 avril 2019

(Article suivant initialement publié le 30 octobre 2018)

 

Source : ContraSpin, Suzie Dawson,

Certains journalistes auraient consulté un almanach pour Washington DC la nuit des élections de 2016, et auraient commencé cet article par quelques mots pittoresques et imagés sur les vents glaciaux qui soufflaient sur la capitale en attendant les résultats avec impatience.

Mais j’ai plus de respect que ça pour mes lecteurs.

J’irai donc droit au but.

Cette élection

En 2016, un candidat accusé de prédation sexuelle en série s’est présenté à la présidence des États-Unis contre l’épouse notoirement corrompue d’un Président précédemment poursuivi en procédure d’impeachment – également accusé de prédation sexuelle à répétition.

Que ces faits à eux seuls n’aient pas suffi à invalider la totalité de la campagne témoigne de l’audace avec laquelle le pouvoir corrompu opère en Occident et de la façon dont le public est conditionné à consommer les produits pervers issus de ses machinations sans scrupule.

Possiblement les élections les plus controversées dans l’histoire récente, le prédateur en série inculpé à gagné.

Durant la campagne, le rédacteur en chef de Wikileaks Julian Assange a décrit les deux candidats de manière appropriée comme « le choléra contre la blennorragie ». Edward Snowden a lancé un sondage sur Twitter demandant à ses abonnés s’ils voteraient plutôt pour « un méchant calculateur », « un monstre irréfléchi » ou « littéralement n’importe qui d’autre ». 67% ont choisi le dernier. Or, ceux qui ne voulaient pas être forcés de faire un choix biaisé entre Clinton et Trump, sont devenus les voix oubliées, la majorité silencieuse ; largement exclus des débats sans fins, insipides, des médias mainstream sur le résultat.

Les descriptions de Julian et Edward étaient de parfaites métaphores des candidats à la présidence ; des personnages de dessins animés qui, mis ensemble et présentés comme un choix démocratique légitime, tournent en dérision le concept entier de représentation politique.

Malheureusement, cette imposture n’était pas aussi irrégulière qu’elle pouvait sembler lorsqu’on la considérait sous cet angle simpliste. Les fautes morales étaient affaires courantes dans une « démocratie » moderne. Peu importe qui gagne, le public mondial allait être soumis à la continuité des mensonges flagrants d’Obama et des trahisons populistes de sa plate-forme pour « l’espoir et le changement ».

Les concurrents pour le leadership sont les vrais stars de la TV, (maintenant, tout-à-fait littéralement) d’un théâtre intergénérationnel renouvelable : Un exercice de quatre ans dans le rétablissement massif des droits du public, où deux aspirants figures de proue bidimensionnelles promettent de réaliser les rêves de leur population. On vous dit ça quand vous votez, que le candidat de votre choix commencera par mettre fin aux guerres et ramener la transparence dans le gouvernement, investir dans les infrastructures ou assurer les droits humains et l’égalité pout tous- et pourtant une fois élu, le vainqueur se tourne vers la caméra en douce, comme Kevin Spacey dans House of Cards et dit : « Vous ne pensiez pas vraiment que je ferai ça n’est-ce pas ? »

Pendant ce temps, les médias et le pouvoir de l’argent qui tirent leurs ficelles ignorent l’évidence flagrante et travaillent fébrilement à donner une apparence de crédibilité à la procédure. En tandem, les grandes sociétés de données et de médias sociaux en ligne avec le gouvernement utilisent de plus en plus de technologies détestables pour remodeler l’histoire humaine en temps réel.

Ce révisionnisme historique industrialisé exige l’excoriation de la réputation publique des vertueux, l’aseptisation des compromis et la manipulation constante de la mémoire vivante des deux.

Ce sont les principes fondamentaux de la fabrication du consentement. Ils ne font pas que nous mentir ; ils préparent déjà les mensonges qu’ils diront à nos arrière-petits-enfants à naître.

Ce sont certaines de ces couches de conneries inventées et courantes que cet article a l’intention d’éplucher.

Au cœur du problème, il y a une bataille entre authenticité et mensonge sur une large échelle. Avec la plupart d’entre nous pris en sandwich quelque part entre les deux avec, en tête et au centre, WikiLeaks. Parce que WikiLeaks est le dernier vestige disponible d’une vérité publique vérifiable et non falsifiée.

C’est pourquoi ils sont haïs par ceux qui craignent les révélations que WikiLeaks facilite et pourquoi la réputation publique de WikiLeaks est dénigrée chaque jour. C’est pourquoi toutes leurs colonnes de soutien sont systématiquement sapées et pourquoi Julian Assange est assassiné si lentement sous nos yeux.

Nous, les citoyens, sommes leur dernière ligne de défense. Une partie de la protection de WikiLeaks – et en fin de compte de nous-mêmes – consiste à comprendre la nature implacable des opérations psychologiques employées contre eux ; que les épreuves infligées par les ennemis du progrès humain ne sont pas seulement des atteintes à la réputation ou financières mais aussi physiques, que pour ceux qui mènent cette guerre sans merci pour la vérité en notre nom, c’est une question de vie ou de mort.

Et c’est pourquoi nous devons combattre.

C’est pourquoi nous devons dire la vérité à leur sujet.

Abrutir de paroles

Il y a quelque chose d’un voyeurisme morbide sur la majeure partie des conversations à propos de Julian Assange, qui se passent dans le monde de l’activisme et du journalisme ces derniers temps.

Alors que beaucoup de leurs critiques les plus sévères professent hypocritement leur soutien idéologique au plus célèbre rédacteur du monde, trop peu d’entre nous agissent de manière conséquente pour le libérer. Beaucoup d’autres sont piégés, provoqués ou incités à débattre sans fin dans nos cercles sociaux ce que je ne peux décrire que comme des choses plutôt frivoles – ce qu’a dit Assange sur tel ou tel ou à qui, ce que pense Assange de ceci ou de cela, ce qu’a fait ou n’a pas fait Assange – pendant que son corps décline lentement face au reste du monde.

Intentionnellement, ces débats créent des fissures sociales et des points de rupture. Elles constituent à la fois une distraction par rapport à l’urgence évidente de s’attaquer aux circonstances plus vastes de sa dégradation apparemment inévitable et une tactique dilatoire, créant un prétexte qui nous empêche d’agir et qui sert à justifier notre inaction.

Parce que ne rien faire est une option facile et tentante. Agir demande du courage. Du sang, de la sueur, des larmes.

Le manque d’effort cohérent pour faire pression sur les forces puissantes qui persécutent Julian, se combine à l’absence de création d’un mouvement significatif pour y parvenir. L’absence d’unité de vision pour sauver la vie de quelqu’un qui a lui-même sauvé la vie de beaucoup d’autres, y compris quelques uns qui nous tiennent le plus à cœur, nous laisse à la contemplation des abysses de l’échec moral le plus grand de cette génération.

Ce que nous faisons collectivement, c’est l’incarnation de la phrase de Bob Marley : « Combien de temps vont-ils tuer nos prophètes pendant que nous restons à côté à regarder ? » Sauf que, de façon encore plus perverse, nous ne faisons pas que regarder. En tant que communauté et société, nous disséquons déjà Assange comme un cadavre. Nous nous partageons ses os comme des vautours, alors qu’il s’accroche encore à la vie.

C’est odieux et ignoble à regarder.

Dépouiller la cible

L’histoire d’Assange est allée bien au-delà de ce qu’il y a dans les livres, films ou légendes : un homme qui change le cours des médias, de la politique, de la technologie, de la société, pour toujours.

Comme si être la cible d’une chasse à l’homme du Pentagone en 2010, n’avait pas envoyé Assange assez loin dans la liste noire du Deepstate, en 2017, Wikileaks a été déclaré cible prioritaire par la CIA.

Oui, cette agence tristement connue pour avoir détruit les vies de millions de gens en se livrant à toutes les sortes de comportements malfaisants répertoriés dans l’histoire de l’humanité, y compris un nombre incalculable d’assassinats et la déstabilisation active de douzaines de pays, utilise maintenant ses conférences de presse pour annoncer que la cible qu’elle vise, n’est pas un despote, ni un marchand d’armes, ni un criminel de guerre ou un trafiquant de drogue – mais un directeur de publication.

Un journaliste

Si le caractère sacré de l’ambassade dans laquelle Julian réside demeure intact, c’est uniquement dû à la mince persistance du peu de lois internationales encore respectées qui en garantissent l’existence. Dans un climat géopolitique où presque tous les pactes internationaux ont été violés, même ce sanctuaire offert par la Convention de Vienne sur les relations consulaires et le peuple équatorien ne peut être tenu pour acquis.

Incapables à court terme de s’emparer directement de son corps physique, les pouvoirs qui, pendant des années, ont ouvertement menacé la vie d’Assange se sont plutôt consacrés à saper d’autres aspects de son existence : ses relations, ses finances, les organisations auxquelles il est associé, ses réalisations, sa réputation, sa capacité à communiquer et même les affaires intérieures du pays qui lui a donné refuge.

Une partie de la technique du diviser pour régner consiste à diviser les alliés naturels. Nous le voyons dans la détermination à rompre les relations entre nos plus importants informateurs afin qu’ils ne puissent jamais devenir une force unie.

Manning, encouragée à prendre ses distances avec Snowden parce que Snowden n’est pas resté pour faire face à des accusations et/ou à la torture et/ou la mort. Brown, poussé à détester Assange. Et ainsi de suite.

Effacer les archives

Une partie de la sape d’Assange et de Wikileaks (et bien sûr pour toute autre cible), est de leur dénier toute réalisation. Des récits sont élaborés et circulent pour les dépouiller rétrospectivement de leurs réalisations, pour en réduire leur signification.

On peut observer cela dans les tentatives constantes de minimiser les efforts de Wikileaks pour défendre et organiser le soutien à Chelsea Manning et autres lanceurs d’alertes.

Mais il y a des exceptions intelligentes qui n’hésitent pas à apporter des soutiens là où ils s’imposent.

Le prétendu « hacker » anglais Lauri Love, qui a fait échoué par une victoire historique, une tentative d’extradition vers les États-unis, a été prompt pour créditer Julian Assange et la Fondation Courage.

 

L’hommage de Lauri à ceux qui ont consacré des années de leur vie à le soutenir est louable et les efforts déployés pour affranchir ce dernier de la menace d’extradition ont créé un précédent juridique important.

En revanche, une grande partie de l’histoire numérique détaillant la genèse de la campagne pour libérer Chelsea Manning a disparu. Bon nombre des principales contributions de ses supporters initiaux ont été effacés des archives.

Les comptes Twitter @freebradley & @savebradley ont été suspendus

Les sites Web originaux de la campagne de soutien, standwithbrad.org et bradleymanning.org sont tous deux en panne. Freebradley.org ressemble à ceci :

 

Privatemanning.org ressemble à ça :

 

Le site Web actuel du réseau de soutien officiel de Chelsea Manning possède des archives de nouvelles qui ne remontent qu’à 2016. Toutes les mises à jour précédentes ont disparu ou n’ont en fait jamais été copiées sur ce nouveau site. Une perte de six années d’activités de sympathisants, de publications, d’actions et de mises à jour.

Et ce n’est pas tout ce qui a disparu. De courts liens vers des informations d’une importance capitale, comme celles qui suivent, ont également été supprimés. (Certains sont disponibles par l’intermédiaire des services d’archives ; beaucoup ne le sont pas)

 

L’histoire vraie est sur le timeline Twitter de WikiLeaks. Depuis le jour même où Manning, après avoir été trahie sans pitié par Adrian Lamo, un agent du FBI, a été arrêtée :

 

Sunshine Press est la maison d’édition de WikiLeaks. Preuve que dès le moment où Manning a été arrêté, WikiLeaks se mobilisait déjà en sa faveur.

Le réseau de soutien Bradley Manning fut bientôt établi :

 

 

Quelques jours après son arrestation, WikiLeaks avait lancé la première campagne de lettres en faveur de Manning – alors qu’elle était encore dans une cage au Koweït :

 

Moins d’une semaine après son arrestation, WikiLeaks était déjà en train de démystifier les calomnies des médias dominants sur Manning :

 

WikiLeaks a dépassé ce que l’on pouvait attendre de n’importe quel site d’informations, dans son soutien à sa prétendue source harcelée :

 

Quelque chose que je n’ai encore jamais vu quelqu’un d’autre arriver à faire : même la fameuse semaine de fin août 2010 où Julian Assange était en train de subir ses propres attaques contre la loi et la diffamation publique, WikiLeaks était toujours en train de tweeter sans relâche des annonces de soutien à Manning :

 

La censure du réseau de soutien par les entreprises a débuté tôt avec WikiLeaks, qui a annoncé en septembre 2010 que le groupe Facebook de 10 300 membres de Manning avait été bloqué par l’entreprise de médias sociaux.

Malgré cela, trois mois à peine après la création du réseau de soutien par WikiLeaks, 20 villes manifestaient en solidarité avec la lanceuse d’alerte :

 

L’équipe juridique exemplaire de WikiLeaks a pris publiquement la défense de Manning :

 

Si vous pensiez que Paypal et/ou Pierre Omidyar ont mal fait en coupant le financement de WikiLeaks, vous serez probablement encore plus furieux de découvrir qu’ils ont aussi par la suite coupé le financement du Réseau de soutien à Manning :

 

…trois semaines après que WikiLeaks eut coordonné les appels à la Maison Blanche pour la libération de Manning :

 

L’avocat de Manning s’est plaint qu’elle n’était pas traitée comme les autres prisonniers.

 

Le « traitement spécial » de Manning par les autorités préfigure sinistrement le cas de Julian Assange. Des années plus tard, les courriels des procureurs britanniques obtenus à la demande de la journaliste italienne Stefania Maurizi en vertu du FOIA [Freedom of Information Act , NdT] révéleraient qu’ils avaient dit à leurs homologues suédois : « Ne pensez pas que l’affaire est traitée comme toute autre demande d’extradition ».

Tag(s) : #Médias, #Libertés

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