Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

 

Collectif "PasEnNotreNom"

 

ÉMIRATS 

 


>

 

La question du jour

 

Démystification...du Qatar

 

 

 

Bien entendu, personne ne doit avoir jamais pensé, même pendant une fraction de seconde, que le Qatar a quelque chose à voir avec la démocratie. Pareille illusion d’optique est d’autant moins possible, en effet, que ce pays répond parfaitement à la définition d’un État totalitaire, qui se concentre sur sa propre défense, quitte pour cela à se doter de la bombe, ce tout petit pays – mais tout à la fois un puits de pétrole, une base américaine, et une chaîne de télévision (ces deux dernières se trouvant à un jet de pierre l’une de l’autre) – fait profession de s’ingérer dans les affaires internes des pays arabes (ceux qui sont des républiques, jamais les monarchies) en apportant toute l’aide dont il est capable aux mouvements démocratiques qui y apparaissent.

 

Un État totalitaire qui se mêle de faire triompher la démocratie ailleurs que chez lui, personne non plus n’aurait cru que la chose appartienne à l’ordre du possible. On sait maintenant que oui, que cette chose existe bel et bien et qu’elle s’appelle le Qatar.

 

Cette chimère, si remuante, aurait-elle pu s’appeler autrement ?

Arabie saoudite, par exemple ? Revêtir l’identité d’une autre monarchie pétrolière et arabe ? Jusqu’à un certain point, oui.

 

Le Qatar et l’Arabie saoudite s’entendent à merveille sur le dos d’une république du voisinage qui se met à vaciller sur ses fondements. Ils ne sont jamais les derniers à vouloir lui porter le coup de grâce en en appelant, notamment, à l’intervention étrangère sous prétexte de défendre les populations civiles.

 

Mais il est des limites dans l’ingérence que l’Arabie saoudite se garderait sans doute de franchir de peur de nuire grandement à son rôle de gardienne des Lieux saints de l’islam.

 

Ainsi, elle ne peut pas se permettre d’être la plus grande base américaine hors des États-Unis, quelque envie qu’en ait sa classe dirigeante.

Le Qatar, lui, ne nourrit pas ce scrupule-là.

 

Il est probable, il est même certain qu’aucun pays de la région, à part lui, n’aurait accepté de se voir assimiler à une base américaine. Ce statut difficile à porter pourrait bien expliquer, au moins en partie, le fait que ce soit lui qui soit devenu un danger pour la stabilité des républiques arabes. Et qu’il soit craint par elles, qui plus est, chacune préférant l’avoir pour ami plutôt que comme ennemi.

 

Aussi ne lui refusent-elles rien, pourvu qu’il reste à l’écart de leurs problèmes internes, qu’il ne cherche pas à transformer en révolution toute effervescence apparaissant ici ou là, et qui d’aventure ne veut pas se laisser dissiper.

 

Mais que ce champion de la démocratie-ailleurs-que-chez-soi aille jusqu’à se moquer des apparences, voilà qui a constitué une surprise pour tous, et à coup sûr une source d’embarras pour ceux qui dans le monde, au premier chef les États-Unis, lui ont permis de se lancer dans une mystification de cet acabit.

 

Personne ne pouvait s’imaginer que dans le même temps où il se dépensait, dans tous les sens de ce mot, pour faire tomber des dictatures arabes, il n’hésiterait pas à condamner à perpétuité un poète du cru dont le seul crime a été de chanter le Printemps arabe et, comme emporté par sa verve, de souhaiter qu’il s’étende aux monarchies du Golfe.

 

 

Mohamed El Ajami croupit dans les geôles du Qatar depuis une année. La mobilisation pour sa libération est désormais assez puissante pour espérer le voir bientôt tiré d’affaire. Mais rarement une atteinte à la liberté d’expression aura été aussi scandaleuse. Et un poème aussi puissamment démystificateur.

A lui tout seul le poète Qatari a réussi là où tout le monde a échoué : mettre à nu le roi des rois du moment.


>

Par Mohamed Habili

 

Tag(s) : #Contre l'impérialisme
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :