Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

L'opinion de
LA RIPOSTE


Les travailleurs de la RDA ont été trompés.
On ne leur avait pas dit que le retour à l’économie de marché signifierait le chômage de masse, les fermetures d’entreprises, la destruction d’une grande partie des bases industrielles de la RDA, une forte inflation, la démoralisation d’une section de la jeunesse.
On ne leur avait pas dit qu’ils seraient considérés comme des citoyens de seconde classe, dans leur propre pays. On ne leur avait pas dit tout cela, mais ils en ont fait l’amère expérience.


La réunification a précipité un effondrement catastrophique du PIB de l’Allemagne de l’Est : -15,6 % en 1990, puis - 22,7 % en 1991.
Des millions d’emplois ont été détruits. De nombreuses entreprises d’Allemagne de l’Est ont été achetées par des capitalistes de l’Ouest, puis fermées. A partir de 1992, il y a eu quatre ans de reprise économique, puis une période de stagnation. Vingt ans après la réunification, le chômage est toujours deux fois plus important qu’à l’Ouest, et les salaires nettement plus faibles.


En RDA, il n’y avait pratiquement pas de chômage. Or, entre 1989 et 1992, quelque 3,3 millions d’emplois ont été supprimés. Le PIB de l’Allemagne de l’Est s’établit à peine au-dessus de son niveau de 1989, et le taux d’emploi se situe à 60 % de son niveau de la même année.
Aujourd’hui, le taux de chômage officiel, pour toute l’Allemagne, est de 8 %, mais il est de 12,3 % en Allemagne de l’Est.
En fait, certaines sources officieuses l’estiment à 20 %.

Les femmes, qui avaient conquis un haut degré d’égalité en RDA, comme dans les autres pays d’Europe de l’Est, ont été particulièrement frappées. Selon les statistiques officielles, 15 % d’entre elles sont au chômage, contre 10 % chez les hommes.


Entre 1991 et 1995, le PIB par habitant de l’Allemagne de l’Est est passé de 49 % à 66 % de celui de l’Allemagne de l’Ouest. Mais depuis, l’écart a cessé de se réduire. La croissance économique n’a pas créé d’emplois.
En conséquence, l’Allemagne de l’Est se vide de ses habitants. Depuis la réunification, 1,4 million de personnes sont parties à l’Ouest, dont beaucoup de jeunes diplômés. Ajouté à une baisse sérieuse de la natalité, ce phénomène a provoqué un déclin de la population d’Allemagne de l’Est – et ce chaque année depuis la réunification.


Suprême ironie de l’histoire, vingt ans après la réunification, les gens quittent l’Est non pour fuir la Stasi, mais le chômage. Bien sûr, quelques-uns s’en sont bien sortis. Comme le rapporte un journaliste de la BBC, « de grandes maisons bourgeoises, qui jusqu’en 1989 étaient encore marquées par les balles de la seconde guerre mondiales, ont été restaurées dans leur vieille gloire ».
Mais pour la masse de la population, l’avenir est sombre.


Le retour du marxisme


Hans-Juergen Schneider, un ingénieur de 49 ans, est sans emplois depuis janvier 2004. Il a répondu à 286 annonces – sans succès.
« L’économie de marché ne peut pas résoudre nos problèmes », dit-il. « Les grosses entreprises prennent tous les profits sans assumer la moindre responsabilité ». Il n’est pas seul à penser ainsi. D’après un sondage publié par Der Spiegel, 73 % des Allemands de l’Est pensent que la critique marxiste du capitalisme est toujours valide.


D’après un autre sondage, publié en octobre 2008 dans Super Illus,
52 % des Allemands de l’Est pensent que l’économie de marché est « en déroute ».
43 % se disent favorables à un système économique socialiste, car « cela protège les plus faibles des crises financières et d’autres injustices. »
55 % des sondés rejettent les « plans de sauvetage » des banques par l’Etat.


En 2008, plus de 1500 exemplaires du Capital de Marx ont été vendus par les éditions Karl-Dietz-Verlag. C’est trois fois plus qu’en 2007, et beaucoup plus encore qu’au début des années 90.
Joern Schuetrumpf, qui dirige cette maison d’édition, raconte :
« Même des banquiers et des managers nous achètent Le Capital. Ils veulent comprendre ce qu’ils nous ont fait. Marx est clairement "in", ces temps-ci. »


La crise du capitalisme a convaincu de nombreux Allemands, à l’Est comme à l’Ouest, que le système capitaliste a échoué. « Je pensais que le communisme était mauvais, mais le capitalisme est encore pire », dit Hermann Haibel, un ancien forgeron de 76 ans.
« J’avais une vie assez bonne avant la chute du Mur. Personne ne se souciait trop de l’argent, car cela ne comptait pas vraiment. On avait tous un emploi. L’idée communiste n’était pas si mauvaise ».

« Je ne pense pas que le capitalisme soit le bon système pour nous », dit Monika Weber, une employée municipale de 46 ans. « La répartition des richesses est injuste. On le voit, désormais. Les petites gens comme moi devront payer, par des impôts, pour le chaos financier provoqué par des banquiers avides. »


Le résultat des récentes élections, en Allemagne, est encore plus significatif que les sondages d’opinion. Le parti Die Linke y a fait une nette percée. Il a recueilli près de 30 % des voix en Allemagne de l’Est, où les partis bourgeois n’ont pas de majorité.
Les travailleurs d’Allemagne de l’Est ne veulent pas le capitalisme. Ils veulent le socialisme démocratique de Marx, Engels, Liebknecht et Rosa Luxemburg.


Alan Woods

Publication : lundi 9 novembre 2009

Tag(s) : #Internationalisme
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :