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«Recommandations» de la Commission européenne : l'UE surveille les politiques nationales

RT France

 

La Commission européenne publie annuellement ses «recommandations» portant sur la politique de chaque pays membre de l'UE. Quelle est la fonction de ces documents ? Sur quels domaines portent-ils ? Quelles sont leurs implications ? Réponses.

Le 5 juin 2019, la Commission européenne a rendu publiques ses «recommandations» adressées aux 28 Etats membres de l'Union européenne (UE). Cette année, la France est par exemple appelée à «réduire les dépenses» publiques ou encore à «réformer les retraites». De quoi s'agit-il ?

 

Elaboration et objectifs des recommandations

 

Annuellement, en fin de premier semestre, la Commission adresse à chaque pays membres de l'UE ses «recommandations». Celles-ci participent à un système de coordination des politiques économiques et budgétaires des Etats membres, qu'on appelle depuis 2010 le «semestre européen».

Aux alentours du mois d'avril, chaque pays est ainsi tenu de mettre à jour ses engagements auprès de l'UE pour les trois ans à venir, permettant ainsi notamment à la Commission de suivre attentivement la trajectoire des finances publiques de chacun.

En effet, les pays membres soumettent tous les ans à Bruxelles un «programme de stabilité» et un «programme national de réformes», en fonction desquels l'organe exécutif de l'UE renouvelle certaines recommandations.

Fait notable cette année : en France, Emmanuel Macron avait organisé un «Grand débat national» en début de 2019 ; et, en amont de la clôture de celui-ci, le gouvernement s'était engagé auprès de Bruxelles à ce que les décisions pouvant en découler «s’inscri[vent] dans l’objectif de soutenabilité de[s] comptes publics», soulignant : «Le programme de stabilité a été établi indépendamment des conclusions qui pourront être tirées du Grand débat national.»

«Les recommandations adaptent au niveau national les priorités définies à l'échelle de l'UE et de la zone euro», explique Jacques Sapir, directeur d'études à l'EHESS, contacté par RT France. L'économiste précise que dans le cas des recommandations adressées aux pays membres de la zone euro, «des avis supplémentaires sont fournis par la banque centrale européenne (BCE) ainsi que par l'Eurogroupe [réunion mensuelle et informelle des ministres des Finances des Etats membres de la zone euro], structure qui n'a pas d'existence légale formelle au sein de l'UE».

Qui décide de quoi ?

 

Les recommandations de la Commission pour chaque pays doivent ensuite être validées par le Conseil de l'Union européenne, ce dernier pouvant décider de s'y opposer, dans ce cas à la majorité qualifiée.

Le Conseil de l'Union européenne est l'institution qui réunit les ministres de chaque Etats membre de l’UE, en fonction des domaines politiques traités, et a notamment pour rôle de coordonner les politiques de ceux-là. «C’est donc le Conseil et non la Commission européenne qui a le pouvoir d’adopter les recommandations, puis de vérifier leur respect par les différents pays», souligne Jacques Sapir.

Quand un pays diverge de manière trop importante des recommandations, en particulier sur les questions établies dans les traités européens, comme par exemple celles de la dette et du déficit publics (thèmes sur lesquels l'UE entend exercer un contrôle via le Pacte de stabilité et de croissance), la Commission peut diligenter une procédure de surveillance.

«La Commission fait alors des propositions au Conseil pour l’inscription du pays en infraction dans le cadre d’une procédure, celle-ci pouvant aboutir à la condamnation dudit pays», explique Jacques Sapir, avant de préciser que «toute inscription n’implique pas condamnation à une amende». La procédure peut par exemple conduire à la soumission du pays inscrit en infraction à une «surveillance renforcée».

 

Quelle idéologie ?

 

Les recommandations de la Commission européenne s'inspirent des principes fondateurs de l’UE, qui ont notamment façonné le marché commun européen, en particulier «le principe de concurrence libre et non faussée», rappelle Jacques Sapir.

Ainsi, dans la dernière mise à jour de ses recommandations adressées à la France, la Commission pointe une réglementation française parfois insuffisante en matière de liberté de concurrence : «Malgré les progrès réalisés et l’adoption de réformes ambitieuses, il subsiste des barrières à l’entrée dans les services aux entreprises et dans les professions réglementées, et la concurrence y demeure faible.» Afin d'atteindre des objectifs de concurrence mais aussi de veiller au respect des traités européens (dette, déficits...), les recommandations portent, de façon générale, sur les politiques nationales de chaque Etat membre.

Elles peuvent porter sur des domaines allant du budget de l'Etat à l'organisation nationale du marché du travail, en passant par l’ensemble des réglementations sociales qui en découlent. La Commission, toujours dans ses recommandations adressées à la France le 5 juin 2019, pointe par exemple le fait que «les dépenses [françaises] de santé n’ont cessé d’augmenter au fil des ans». L'exécutif européen, dans le même document, demande en outre à Paris de «réduire les dépenses» ou encore de «réformer le système de retraites».

Le domaine des retraites est d'ailleurs un sujet sur lequel la Commission n'a pas manqué d'épingler la Pologne, lui demandant de relever l’âge légal de départ à la retraite, celui-ci ayant récemment été abaissé à 65 ans pour les hommes et 60 ans pour les femmes.

Si elle dévoile habituellement ses recommandations annuelles pour chaque pays membre aux alentours du 20 mai, la Commission européenne les a cette année rendu publiques le 5 juin, soit 11 jours après les élections visant à renouveler le parlement européen.

Fabien Rives

Lire aussi : L'UE, synonyme de «paix» et «liberté» ? Ce tweet de la Commission qui ne convainc pas tout le monde

Tag(s) : #Union européenne
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