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Les routes nationales en début ou fin d'autoroute vont pouvoir être privatisées selon un décret paru cet été.

Les routes nationales en début ou fin d’autoroute vont pouvoir être privatisées selon un décret paru cet été. (©Adobe Stock)

actu.fr

Va-t-on vers une large privatisation des routes nationales ? C’est le débat du moment alimenté notamment par Jean-Luc Mélenchon après la parution cet été, dans la plus grande discrétion, d’un décret cédant des kilomètres de routes nationales aux sociétés d’autoroutes.

Ce décret du 14 août 2020, paru le lendemain et relevé par Le Monde, permet en effet de classer certaines portions de routes nationales en sections d’autoroutes. Quelles en sont les conséquences ? On fait le point.

 
Les autoroutes, ça ne leur suffit pas pour faire du fric sur le dos des automobilistes ! Le gouvernement veut maintenant privatiser... les routes nationales.
Ce que dit le décret du 14 août

Ce décret d’application de la loi d’orientation des mobilités (LOM) de décembre 2019 précise les conditions selon lesquelles « les autoroutes peuvent comporter des sections à gabarit routier ».

Il prévoit qu’une « section de route » peut être « classée dans la catégorie des autoroutes »« à condition d’être située dans le prolongement direct d’une voie bénéficiant déjà du statut autoroutier », et à condition que l’aménagement en « 2 × 2 voies et chaussées séparées » soit « impossible ou anormalement coûteux ».

Des routes nationales
désormais payantes ?

Ces morceaux de route nationale ainsi privatisées vont-elles devenir payantes, comme le redoute le chef de file de La France Insoumise, Jean-Luc Mélenchon ? 

 

 

 

Interrogé par l’AFP, Jean-Baptiste Djebbari a expliqué que ce décret visait à « traduire dans le droit ce qui était déjà existant dans la pratique », à savoir «la gestion des derniers kilomètres avant d’entrer sur l’autoroute ». Le ministre délégué a assuré qu’il ne s’agissait pas « d’avancer le péage de quelques kilomètres » ou d’« augmenter le péage des autoroutes ».

Entretien des routes
contre concessions plus longues

Pour l’Etat, c’est avant tout un moyen de se désengager du coût de rénovation d’une partie de ses routes, jugées très coûteuses.

Lorsqu’il était encore ministre de la Transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot avait rappelé dans le plan de sauvegarde des routes pour 2019 que « le sous-investissement des dernières décennies a été manifeste sur le réseau routier non concédé ». Il estimait alors que « 40 % des surfaces de chaussées sont à renouveler ».

« Dans la plupart des cas, il ne s’agit pas de « grands travaux » mais d’aménagements simples », précisait la ministre des Transports de l’époque, Elisabeth Borne.

D’où un entretien et une rénovation de ces portions de route nationale concédées aux trois grands acteurs qui se répartissent les concessions autoroutières, à savoir le groupe Vinci, la société Eiffage et l’espagnol Albertis. Ils exploitent et entretiennent déjà plus de 9000 km sur les 11 000 km du réseau autoroutier français.

En échange, les sociétés concessionnaires d’autoroutes (SCA) pourront bénéficier d’un prolongement de leur durée de concession, selon les informations du Monde, alors qu’elles étaient censées s’arrêter entre 2031 et 2036.

Une rentabilité trop élevée

Cette mainmise des sociétés autoroutières est pourtant décriée. Un récent rapport du Sénat pointe le manque à gagner pour l’Etat dans la vente de son réseau autoroutier en 2006, pour 14,8 milliards d’euros. Ce « processus de cession au secteur privé » a fait perdre à l’État « 6,5 milliards d’euros de recettes potentielles (7,8 milliards d’euros en valeur 2020) ».

Le rapport dénonce aussi une rentabilité trop élevée de ces concessions, déjà pointée du doigt par la Cour des Comptes et l’Autorité de la Concurrence

Deux des trois groupes autoroutiers pourraient atteindre la rentabilité attendue lors de la privatisation 10 ans avant la fin des concessions. 

D’ici 2036, les dividendes versés sont estimés à environ 40 milliards d’euros, dont 36 milliards pour Vinci et Eiffage, alors qu’ils devraient atteindre leur rentabilité autour de 2022.

Sollicitées, aucune des deux sociétés n’a répondu à nos demandes de précisions.

 

Des péages toujours plus chers ? 

« Privatisées en 2006 pour 14,8 milliards d’euros, les sociétés concessionnaires d’autoroutes (SCA) sont aujourd’hui grandes gagnantes des concessions, au détriment à la fois des usagers et de l’État », alerte de son côté l’association 40 millions d’automobilistes, qui pointe du doigt des « tarifs sans cesse en hausse pratiqués aux péages ».

Sur son blog, Jean-Luc Mélenchon alerte lui aussi « sur l’expérience désastreuse de la privatisation des autoroutes » et ajoute : 

Celle des routes nationales aura les mêmes conséquences : augmentation des prix pour les automobilistes, moindre entretien des routes.

Les sénateurs, tout comme l’autorité indépendante de régulation des transports (ART), demandent « de ne plus prolonger la durée des concessions » afin de « remettre à plat le système autoroutier ».

L’autorité de régulation des transports préconise « une tarification des péages adaptée à la congestion du trafic » et des « évolutions de tarifs annuels adaptés à l’évolution du pouvoir d’achat des usagers ».

Tag(s) : #Transports, #Services publics
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