Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

En catimini,

le Sénat allège le délit
de prise illégale d'intérêt !
 
Jeudi 24 juin, en pleine journée de mobilisation populaire, sans tambour ni trompette, le Sénat a allégé drastiquement le délit de prise illégale d'intérêt. Quelques irrespectueux évoquent une légalisation du financement occulte des partis politiques...
Jeudi dernier, en pleine journée de mobilisation populaire, et au moment où Sarkozy accueillait Thierry Henry à l'Elysée, le Sénat analysait la proposition de loi n°268 du sénateur Bernard Saugey (UMP - Isère) "visant à réformer le champ des poursuites de la prise illégale d'intérêts des élus locaux".

Pour faire bref, le délit de prise illégale d'intérêt, régi par l'article 432-12 du Code pénal, est défini comme le fait, pour le responsable d'une collectivité publique, de "prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt quelconque dans une entreprise ou dans une opération dont [il] a, au moment de l'acte, en tout ou partie, la charge d'assurer la surveillance".
Ce délit est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75000 euros d'amende. Exemple : si un maire attribue un marché public à une entreprise, et s'il fait affaire à titre personnel avec cette même entreprise, il se rend coupable de "prise illégale d'intérêt".

Actuellement, la prise illégale d'intérêt sanctionnant l'appauvrissement de la collectivité, le délit peut donc être constitué sans enrichissement personnel ! Si l'élu tire bénéfice de son acte, l'on parlera alors de corruption passive. Nuance de taille. Car la proposition de loi se propose de remplacer les mots "intérêt quelconque" par "intérêt personnel distinct de l'intérêt général".
Et hop, ni vu ni connu, je t'embrouille...

Le but de cette loi serait donc en réalité de dépénaliser les situations ou l'élu favorise un tiers avec qui il n'a pas de lien personnel. Favoriser son épouse, son fils ou son beau-frère resterait puni, mais plus, par exemple et au hasard, le fait de faire en sorte qu'une partie des fonds publics que l'on gère favorise son parti politique.

On notera que cette nouvelle rédaction laisse aussi le champ libre à l'enrichissement personnel qui ne se ferait pas (en apparence) au détriment de l'intérêt général.
Exemple : Si un maire bénéficie des largesses d'une entreprise privée concomitamment en affaire avec sa commune, l'élu pourra toujours arguer que sa collectivité n'y a rien perdu, voire qu'elle y a gagné, pourquoi pas.
Aussi simple que ça.

Le délit de prise illégale d'intérêt supprimé ?

Par ailleurs, il y a de fortes chances que le terme d'"intérêt personnel" soit interprété par les juges (surtout lorsqu'ils feront partie de la même loge maçonnique que les élus mis en cause…) comme un profit sonnant et trébuchant, au contraire de l'"intérêt quelconque".
 
Si c'est le cas - l'avenir nous le dira - le délit de prise illégale d'intérêt disparait en tant que tel, puisque la malversation en cause tomberait alors sous le coup de la législation sur la "corruption passive".


Précision : la proposition de loi a été, comme de bien entendu, adoptée à l'unanimité…
Tag(s) : #Politique française
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :