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Chacun, en France, se réclame de la laïcité. Mais, derrière ce mot, le contenu peut varier jusqu'à évoquer le contraire de l'esprit  de la loi de 1905. Celle-ci imposait la séparation des Eglises et de l'Etat. Au-delà de ce principe juridique, la loi faisait la démarcation entre la religion, affaire privée, et la politique, affaire publique. Traduite en langage populaire, cela donnait : "Marianne et l'instituteur à l'école, le curé dans son église, et à la maison".
Certains voudraient réduire la laïcité à une tolérance envers toutes les croyances, à une neutralité de bon aloi, accueillant tous les dogmes. Ces gens qui répandent ces fariboles mettent les religions au niveau des philosophies, et l'athéisme, limité à une offre intellectuelle parmi d'autres. Ignace de Loyola égalerait Darwin.
Où allons-nous avec cette dérive idéologique ?
 
Jusqu'à la Seconde guerre mondiale, la République était laïque, dans le concept de 1905. Certes, les milieux d'extrême-droite, et la droite tout court, faisaient bon ménage avec le catholicisme. On vendait L'Action Française à la porte des églises, dans les beaux quartiers. La Croix, l'un des quotidiens des milieux bien-pensants, lié à la hiérarchie, voyait 'rouge', si l'on peut dire, quand les cortèges ouvriers chantaient l'Internationale. Les prêches, sous les voutes obscures, s'en prenaient au Front populaire, et prônaient le "bon vote" contre lui. La gauche était alors naturellement anticléricale. Parfois, elle  "bouffait du curé". D'un côté, les scouts en cohorte et  les patronages du prêtre en soutane, tendaient à détourner la jeunesse du "virus communiste"; de l'autre, la culture populaire et le sport ouvrier, chantaient "au devant de la vie", dans la banlieue rouge. 
La polémique était donc vive, mais l'Etat, même mené par des équipes de droite, n'osait remettre  en cause la laïcité, ni dans ses attitudes, ni dans ses actes.

Avec la débâcle, les premiers accrocs virent le jour. Le dernier gouvernement de la Troisième République, avec Paul Reynaud en tête, "remettait la France dans les mains du Sacré Coeur", dans un office célébré en juin 40, à Notre-Dame.  Ce qui ne changea rien. La défaite se mua en   désastre , organisé de longue date par la bourgeoisie qui trouvait dans Hitler un guide et un modèle. 
Mais il fallut "expliquer" les raisons de la capitulation. Pétain, secondé par l'ensemble de la hierarchie de l'Eglise catholique, voulut faire croire aux Français que "l'esprit de jouissance l'avait emporté sur l'esprit de sacrifice". L'abandon de la foi, les moeurs dissolues, les instituteurs laïcs, le Front populaire, et bien sûr, la République, étaient à l'origine de la défaite. 
Des prélats allèrent même jusqu'à considérer celle-ci comme une "Divine surprise' et une "chance pour la France" ! Pour se "régénérer", les Français devaient faire contrition et retourner à la religion. 
L'Etat français, celui de Vichy, sous couvert des baïonnettes allemandes, après avoir été validé par un vote honteux d'une majorité de parlementaires, le 10 juillet 1940, s'employa à biffer tout ce qui rappelait la République, l'Ecole laïque, en premier.  
Ce fut la revanche de la religion d'Etat contre la laïcité. 
Face à cette emprise, l'engagement contraire de quelques militants et intellectuels catholiques dans la Résistance, a permis à l'Eglise, totalement compromise, de s'en sortir, à la Libération. 
De Gaulle passa l'éponge au prix d'une épuration infime, sans opposition des milieux  de gauche, préoccupés de maintenir l'union d'une résistance, faussement jugée oecuménique.
Et tout au long de la Quatrième République, à travers l'école publique visée, la laïcité subit en permanence des offensives en faveur de l'école privée qui, de loi en loi, marqua des points.  Cette politique se prolongea et s'emplifia avec l'avènement de la Cinquième République, en 1958. La réaction du peuple laïc fut massive, mais des considérations politiciennes laminèrent la résistance opposée aux menées cléricales.

Aujourd'hui, face à l'attitude plus que favorable  vis-à-vis du rôle des religions, Nicolas Sarkozy,  avec ses discours de Latran et de Riad, remet le problème de la laïcité au coeur du débat public.
Ainsi, en Arabie Saoudite, le président de la République, devenu chanoine par la grâce de Benoït XVI, a osé écrire :
"Le temps n'est pas pour  les religions à se combattre entre elles, mais à combattre contre le recul des valeurs morales et spirituelles, contre le matérialisme". 
On dirait du Pétain, en juillet 40. 
Il faut dire que l'objectif est le même : faire des églises, les garants de l'ordre social européen, au service des intérêts du capital, aujourd'hui,  devenu financier et transnational.
Sarkozy et les siens utilisent les dogmes religieux comme le rempart idéologique le plus sûr contre le socialisme. Ce faisant, il lui faut, pour réussir dans cette voie, casser la laïcité. Car un peuple attaché à son libre arbitre, à sa liberté de penser et de réflêchir, n'acceptera jamais d'être mis en laisse.
Ainsi, défendre la laïcité, la vraie, celle qui permet à chaque homme d'être "libre dans sa tête", devient une priorité dans le combat politique contre la domination du parti de l'Argent.

La volonté idéologique de détruire la laïcité, cette idée de base de la République,  répond donc au projet d'établir une société européenne, sans peuple et sans nation.

Tag(s) : #Politique
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