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Un trafiquant d'armes, un certain Viktor Bout, vient d'être arrêté et incarcéré à Bangkok.
Les médias français dénoncent avec les mêmes termes ce méchant "marchand de mort".
Libération comme Le Figaro en font leur titre. L'un et l'autre établissent la sinistre liste des "clients" de Viktor Bout. Celui-ci aurait vendu indifféremment armes de pointe, fusils d'assaut et missiles aux camps opposés dans de nombreux conflits en Afrique, en Asie, en Amérique latine...
Sur le continent noir, il aurait alimenté d'un même coeur les combattants "des deux bords" au Libéria, en Angola, les gouvernements et leurs rebelles.  En Afghanistan, la Ligue du Nord et ses adversaires talibans, auraient bénéficié de livraisons massives d'engins de mort. Mais pour Washington qui suivait vainement la piste  de Bout depuis des années, la faute n'était pas là. Ce que les Américains reprochent à l'aventurier, ce sont ses ventes d'armes à  la guerrilla des FARC.  C'est le seul motif de son incarcération en Thaïlande : Viktor Bout est "inculpé d'assistance à une organisation terroriste". 
Ce n'est donc pas une question morale. On s'en doutait un peu.
Viktor Bout, jeune pilote russe, a trouvé sa voie à la chute de l'Union soviétique. Prenant exemple en haut lieu, il s'est mis à vendre pour son compte des stocks d'armes laissés à l'abandon. Les dirigeants de l'époque, le président Eltsine  en tête, s'appropriaient les biens de l'Etat pour les vendre aux plus offrants. Notre pilote  a fait de même avec la marchandise dont il pouvait disposer. De là, a commencé un trafic qu'il a "mondialisé".
Devenu ainsi un entrepreneur avisé dans ce commerce particulier, sa figure et ses aventures ont intéressé écrivains et scénaristes. Un livre, "Merchant of"death", un film, "Lord of War", ont fait de lui un personnage de roman et d'Hollywood. Les médias y font référence. Encore qu'ils "oublient"  la fin du film : arrêté par la police étatsunienne, la CIA relâche le méchant pour "service rendus".
Aujourd'hui donc, Viktor Bout a "fini la partie", selon sa propre expression. Les USA exigent son extradition. Sujet russe, les autorités de Moscou auraient mille raisons d'en faire autant.

Nos médias, donc, pointent du doigt  ce "marchand de mort" qui, par son honteux commerce, a répandu le sang aux quatre coins de la planète. Haro sur le baudet ! 
La morale nous oblige à dire amen.
Cependant, à la réflexion, on s'étonne un peu : Le Figaro dénonçant  "un marchand d'armes"  ! Stupéfiant de la part du journal de Serge Dassault, non ? Car pour lui aussi "la mort est son métier".   Certes, son trafic est licite, enfin, selon la loi. Et les Rafales expédiés sur tous les champs de bataille potentiels ne sont-ils pas destinés à larguer la mort par missiles interposés ? Et ces missiles, le buisiness de monsieur Lagardère, autre magna des médias, ne sont-ils pas eux-mêmes vendus pour tuer ?
Il est vrai que ces marchands d'armes ont pignon sur rue. Ils sont inscrits sur les registres de commerce. Ils sont, eux, des gens de bonne compagnie. Et leurs milliards gagnés dans le sang participent au solde de nos exportations. Enfin, si Dassault et Lagardère sont, eux-aussi, des "marchands de mort", leur licence porte le sceau du pouvoir politique qui seul décide du destinataire étranger. Jamais, le gouvernement n'a mis obstacle à vendre simultanément les armes les plus sophistiquées, les plus mortelles, à chacun des béligérants opposés, à  l'Irak de Saddam, agresseur de l'Iran, et à  l'Iran, sa victime. 
Buisiness is buisiness ! 
Il fut un temps, à gauche, on nommait "marchand de canons" les fabricants d'armes, pas seulement les petits artisans qui travaillent hors du circuit officiel, mais aussi et surtout les "industriels de la mort", les de Wendel et les Schneider, par exemple.
Avouons que l'expression sent son archaïsme. Vendre des canons, ça fait un peu périmé au temps des missiles téléguidés, des missiles à l'uranium appauvri, des bombes à fragmentation, destinées à massacrer en masse les civils, femmes et enfants.
Alors, bravo au Figaro, qui n'hésite pas à stigmatiser son propriétaire !


Mille excuses : le quotidien de Serge Dassault ne vise que son concurrent déloyal.

Tag(s) : #Politique
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